J’invite tous ceux qui suivent nos débats à lire son rapport, parce que c’est sans doute le plus documenté sur les comptes publics que j’aie pu lire.
La Cour des comptes estime que la situation financière de la France est profondément dégradée. C’est un état de choses que l’on ne peut pas cacher à nos concitoyens. La situation nette, qui consiste en la différence entre le passif et l’actif, est aujourd'hui négative, à hauteur de 1 115 milliards d’euros. Aucune entreprise, aucun ménage ne pourrait subsister dans une telle situation ! Quand on dit que la France est en faillite, ce ne sont pas que des mots. C’est une réalité dont il faut tenir compte.
Dans ce contexte, il est heureux que les collectivités locales ne puissent emprunter pour financer leur fonctionnement, ce qui n’est pas le cas de l’État. La Cour des comptes relève d'ailleurs que la croissance de la dette, qui atteint près de 60 milliards d’euros en 2015 – ce n’est pas une paille, alors que vous avez parlé d’une stabilisation, monsieur le secrétaire d'État –, n’a servi à financer des investissements que pour une très faible part. Cela signifie donc qu’elle a financé des dépenses de fonctionnement et que nous vivons à crédit.
Certains arguent que les marchés nous font encore confiance. Pour ce qui me concerne, mes chers collègues, je n’ai qu’une confiance limitée dans les marchés. Ils se sont souvent trompés par le passé et je pense que, à l’heure où le volume de liquidités à placer est important, ils commettent encore des erreurs d’analyse sur un certain nombre de pays, et notamment qu’ils se trompent sur la situation financière profonde de la France.
On nous dit que le déficit budgétaire a été réduit. C’est totalement faux ! La Cour des comptes l’évalue, après retraitement des éléments exceptionnels, à 74 milliards d’euros en 2015, ce qui correspond exactement à la moyenne des déficits enregistrés entre 2012 et 2014, c’est-à-dire depuis le début du quinquennat. C’est une signature du sur-place du Gouvernement, de l’absence de réformes visant à faire baisser la dépense publique et de l’attentisme qui marque votre politique budgétaire.
Entre 2000 et 2008, c'est-à-dire durant la période ayant précédé la crise des subprimes, le déficit budgétaire annuel s’élevait, en moyenne, à 42 milliards d’euros. Aujourd'hui, il s’établit à 74 milliards d’euros ! Pourtant, en 2012, votre prédécesseur, monsieur le secrétaire d'État, M. Cahuzac, avait annoncé, dans sa loi de programmation des finances publiques, un déficit de 37 milliards d’euros en 2015… Nous sommes donc très loin des prévisions et des annonces initiales, contrairement à ce que vous affirmez !
La France est également très mal placée si on la compare à ses voisins, puisque, sur les vingt-sept autres pays de l’Union européenne, seuls trois font encore moins bien qu’elle en matière de déficit, à savoir la Grèce, le Portugal et l’Espagne, qui ne sont pas à proprement parler des modèles de rigueur budgétaire.
On parle souvent d’austérité, mais je rappelle qu’une politique d’austérité consiste à diminuer très largement les dépenses et les rémunérations. Nous en sommes loin aujourd'hui ! Monsieur le secrétaire d'État, vous parlez de maîtrise des dépenses publiques, mais, en fait, celles-ci augmentent, comme l’a très justement souligné la Cour des comptes, car il faut raisonner à périmètre constant, pour pouvoir comparer ce qui est comparable. Ainsi, la Cour des comptes a calculé que les dépenses avaient augmenté, en 2015, de 3, 7 milliards d’euros, c'est-à-dire de 0, 9 %, alors que l’inflation est nulle.
Pour ma part, j’ai toujours été partisan de la réduction de la dépense publique, et non de sa maîtrise. Le retour à l’équilibre budgétaire en 2017 était un engagement du Président de la République. Si l’on veut rétablir l’équilibre des comptes, il faut réduire la dépense publique, ce qui nécessite des réformes de fond, des réformes de structure, qui n’ont absolument pas été engagées depuis le début du quinquennat.
Le Gouvernement avait annoncé, à grand renfort de communication, 50 milliards d’euros d’économies sur trois ans, de 2015 à 2017. Des économies ont été réalisées sur les collectivités locales, à hauteur de 3, 7 milliards d’euros en 2015. En revanche, alors que l’État s’était engagé à faire 7, 3 milliards d’euros d’économies, la Cour des comptes n’en a relevé que 1, 7 milliard d’euros, et même 0, 7 milliard d’euros seulement si l’on ne tient pas compte des ponctions sur les fonds de roulement des opérateurs de l’État, qui ne correspondent pas à des économies pérennes.
La Cour des comptes a également noté que, au fil des années, les économies à réaliser étaient reportées aux années futures. En définitive, le calendrier appelant sans doute des mesures électoralistes, nous avons appris récemment que le Gouvernement abandonnait l’objectif de 50 milliards d’euros d’économies sur trois ans.