Pour conclure notre exposé commun, je voudrais d'abord souligner que, comme les sondages réalisés le prouvent, l'amélioration de la rétribution des réservistes - les nouveaux « gardes nationaux » de demain, peut-être - ne constitue pas un sujet de premier plan : au jugement de presque les trois quarts d'entre eux, leur engagement dans la réserve est suffisamment rémunéré, même s'ils ne sont que 60 % à le penser parmi les officiers et les sous-officiers. En revanche, la gratification sociale et symbolique qu'ils peuvent légitimement attendre de leur engagement ne doit pas être négligée.
De ce point de vue, nous recommandons d'assurer une évolution des réservistes dans les grades de la hiérarchie militaire conforme à leurs mérites dans le service et à leur fidélité aux armées. Nous préconisons aussi de mener en leur faveur la politique de proposition aux distinctions, militaires et civiles, que justifie leur engagement. Notre pays leur doit bien cela !
Toujours est-il que, parfois, l'amélioration de la condition matérielle peut être un vrai « plus ». À cet égard, nous conseillons d'ouvrir aux réservistes opérationnels, pour leurs périodes d'activité dans les armées, le droit à la prestation de soutien en cas d'absence prolongée du domicile (PSAD), qui vise à soutenir le conjoint du militaire absent du foyer ou les personnes fiscalement à sa charge. Le Haut Comité d'évaluation de la condition militaire a fait la même proposition dans son dernier rapport public.
Nous souhaitons également que soit mise à l'étude l'instauration d'une prime de fidélité pour les réservistes qui décident de renouveler leur engagement auprès des armées. De même, il nous semble que, pour l'attribution des bourses d'études, la prise en compte de la participation des étudiants à la réserve militaire serait légitime.
J'ajoute que, dans une perspective de bonne gestion des ressources humaines, les armées devront s'efforcer de mieux exploiter les compétences individuelles des réservistes, qui ne semblent pas toujours optimisées pour le moment.
Le ministère de la défense doit en outre améliorer sa communication autour de la réserve. Notre rapport écrit suggère à cet égard différentes pistes : renforcer la thématique « réserve » dans le déroulement de chaque Journée nationale du réserviste, où elle semble insuffisante ; faire davantage appel à l'appui offert par les associations de réservistes et par les réservistes citoyens des armées ; diversifier les vecteurs de communication sur la réserve, en mobilisant davantage les ressources d'Internet, en particulier les réseaux sociaux, et en développant de nouveaux formats d'information ; diffuser une information qui comporte une dimension pédagogique forte sur l'organisation de la réserve militaire et, surtout, qui mette l'accent sur les valeurs attachées à cet engagement ; enfin, adapter cette communication en fonction des destinataires ciblés.
Si les mesures que nous proposons sont évidemment d'inégale importance, toutes visent à renforcer la réserve militaire pour accroître les capacités opérationnelles des armées, et à la territorialiser pour permettre à notre défense de mieux faire face aux crises.
Nous sommes convaincus que, dans le mouvement de cette réforme, qui pourra donner naissance à une « garde nationale » telle que Jean-Marie Bockel l'a préfigurée selon notre voeu commun, les réservistes représenteront un atout essentiel pour la consolidation de notre Nation. En effet, ces hommes et ces femmes engagés au service de la défense de notre pays incarnent d'exemplaires valeurs civiques, car être militaire « à temps partiel », c'est faire siennes constamment les valeurs du militaire d'active : esprit de sacrifice, discipline, loyauté, solidarité de groupe, etc.
Le service national a longtemps joué un rôle décisif en la matière, mais cette époque est révolue. Il nous faut d'autant plus en faire le deuil que le rétablissement de la conscription, serait-il même budgétairement et matériellement possible, ce qui n'est pas le cas, ne répondrait pas aux besoins opérationnels actuels. En revanche, les armées peuvent pleinement tirer profit de la volonté d'engagement que manifeste aujourd'hui toute une partie de la jeunesse française, dans l'intérêt de la société tout entière.
Cependant, les armées et leurs réserves restent un outil de défense. Elles prendront toute leur part dans l'effort de résilience et de renforcement interne de notre pays, mais elles ne pourront prendre que celle qui leur revient. Pour servir plus directement cette cause vitale, d'autres dispositifs existent, sont prévus ou peuvent encore être imaginés. Dans cette perspective, il nous appartient à tous de concevoir de nouvelles formes d'engagement civique. La « Garde nationale » telle que nous la concevons devrait constituer, auprès des armées, l'une des plus solides incarnations de cet engagement, mais elle ne pourra, bien sûr, pas être la seule.