Je serai bref, car je dois présider la mission d'information commune sur l'extraterritorialité de certaines lois des États-Unis - le sujet pour lequel je suis intervenu sur ce texte.
Je remercie mes collègues de l'Assemblée nationale qui ont bien voulu m'entendre, ainsi que Karine Berger. Il s'agit d'un travail réalisé en grande partie sur une base bipartisane, même si j'en suis à l'origine.
Je souhaite attirer l'attention du Sénat sur plusieurs points.
Tout d'abord, l'économie française est mise en coupe réglée par la justice américaine, laquelle travaille en lien avec les services de renseignement des États-Unis - nous en avons eu confirmation au cours de notre mission. Nous ne vivons pas dans un « monde de Bisounours ». Les mécanismes que nous avons proposés, notamment pour permettre de plaider coupable lors des transactions pénales, inspirés de la culture américaine, visent à limiter les dégâts, même s'ils ne régleront pas tout, ne nous faisons pas d'illusion.
Par ailleurs, quand une entreprise française se trouve forcée - les auditions auxquelles nous avons procédé nous en ont offert plusieurs exemples - d'engager un « moniteur », ce qui peut lui coûter plusieurs millions d'euros - il s'agit en général d'un avocat américain ou d'un avocat français travaillant pour les Américains -, toutes ses informations sont transmises aux États-Unis, y compris aux services de renseignement. Mes chers collègues, j'attire votre attention sur le nécessaire renforcement des lois de blocage. Des amendements ont été déposés pour que ces informations transitent d'abord par les autorités françaises. Lorsque vous aurez à réexaminer ce texte, je vous prie de bien prendre en compte toute la gravité du sujet.
Dernier élément en date : il y a trois jours, la Chambre des représentants, en pleine campagne présidentielle aux États-Unis, a adopté à l'unanimité, après un vote dans le même sens du Sénat au mois de mai dernier, la loi dite « JASTA », pour Justice Against Sponsors of Terrorism Act, qui permettra à tout citoyen américain, séparément ou en class action, de saisir tout bien appartenant à un État ayant été directement ou indirectement lié à un attentat terroriste sur le territoire américain. C'est la fin de l'immunité souveraine !
Il s'agit d'une révolution juridique en matière de droit international. Ce texte a été accepté sans clause de waiver par le Président en raison de la campagne électorale. Ne sont donc même pas exclus les États alliés des États-Unis, qui, en ce moment même, se battent aux côtés de ce pays en Syrie et en Irak ! J'ai déposé un amendement dans le même sens, qui a été retoqué à la demande du Gouvernement, il y a quelques mois. Ce point mérite d'être réexaminé à la lumière de ces nouveaux développements. Il s'agit d'un volet absolument fondamental pour notre souveraineté économique.