Ce n'est donc pas vers l'État qu'il faut se tourner pour lui reprocher l'insuffisance des moyens mis en place.
Vous évoquiez, à juste titre, l'évaluation universitaire. Elle est prévue dans la loi de 2006 et elle se met en place dans le cadre de cette dernière. L'agence de l'évaluation va changer de titulaire, le précédent ayant été appelé à de hautes fonctions.
Vous dites ensuite qu'il convient de mettre en place un service public national d'orientation. Bien entendu, il le faut. Cela figure d'ailleurs dans ma lettre de mission, ainsi que dans celle de Xavier Darcos, qui sera le chef de file du pilotage de ce service public d'orientation, auquel je prendrai toute ma part, tant il est vrai que des universitaires, des étudiants doivent aller dans les lycées, dès la classe de la seconde, pour aider à une meilleure orientation des lycéens.
Enfin, je ne puis partager votre avis selon lequel ce texte serait technique. En réalité, il s'agit d'un texte stratégique.
Monsieur Portelli, j'ai, comme vous l'imaginez, beaucoup apprécié le début de votre discours, notamment le fait que vous approuviez les compétences transférées, la modernité du texte et surtout notre volonté, que vous avez bien comprise, de lutter contre la bureaucratie qui a gangrené le fonctionnement de l'université depuis des années.
En outre, lorsque vous avez parlé de tournant historique en évoquant les grandes lois de décentralisation de 1982-1983, la jeune ministre que je suis et qui, depuis deux mois, consacre tout son temps à l'élaboration de cette réforme, n'a pu qu'être touchée par un tel parallèle.
En revanche, j'ai noté vos réticences quant à la désignation du président de l'université.
Vous avez dit que nous risquions de passer d'un régime d'assemblée à un régime présidentiel. Tel n'est pas notre objectif et ce n'est pas la philosophie de ce projet. En réalité, nous voulons passer à un régime municipal. En d'autres termes, le président de l'université devra être porteur de projets ; il devra être élu avec une équipe déterminée à mettre en oeuvre ces projets et pas uniquement composée selon des logiques syndicales. Chacun connaît bien ici ? nous sommes au Sénat ? le fonctionnement des municipalités.
Nous tenons donc à mettre en place une dynamique de projets d'établissement et je crois que les nouveaux modes de fonctionnement que nous offrons à l'université permettront à un certain nombre d'universitaires de très grande qualité de se rencontrer, de se parler, de décider ensemble, de concevoir tel ou tel projet pour leur établissement et de le porter ensemble, même s'ils appartiennent à des disciplines qui, traditionnellement, ne se rencontrent pas et vivent leur vie chacune de leur côté.
Aujourd'hui, ce que nous proposons permettra à ces universitaires de faire évoluer leur université dans le sens qu'ils souhaitent, c'est-à-dire dans le sens de l'excellence, de la qualité des formations, avec de vrais leviers stratégiques, avec de vraies majorités de gouvernement. Cela les motivera pour se réunir, dresser des listes et se présenter.
De ce point de vue, je pense que la prime majoritaire donnée à la liste arrivée en tête dans le collège des enseignants- chercheurs est positive dans la mesure où ils sauront que, s'ils arrivent en tête lors de l'élection, ils pourront disposer d'une majorité stable, une majorité de gouvernement pour mettre en oeuvre leur projet et que, de cette façon, ils ne seront plus contraints en permanence, au sein du conseil d'administration, de négocier chaque décision.
Vous avez également évoqué les grands secteurs scientifiques, en insistant sur l'affectation et le recrutement des professeurs.
J'ai déjà dit que, s'agissant des professeurs agrégés du supérieur, j'étais totalement d'accord pour qu'ils restent à l'écart des processus de recrutement.
Pour faire en sorte que le maximum de disciplines soient représentées au sein du conseil d'administration, nous avons proposé que celui-ci comprenne de vingt à trente membres, dont huit à quatorze enseignants-chercheurs. Cela dit, le rôle du conseil d'administration, je le répète, n'est pas uniquement de représenter l'ensemble des disciplines ; il est là, avant tout, pour prendre des décisions stratégiques.
Enfin, vous avez tenu à me faire part d'un dernier souci, que je partage, à savoir éviter le localisme. À cet égard, le Gouvernement pourra accepter tel ou tel amendement ; je crois savoir que la commission des affaires culturelles en a déposé certains et que vous en avez proposé d'autres, tendant à éviter la tentation du localisme, qui a toujours été présente dans l'université. J'en veux pour preuve la position des représentants du Conseil national des universités que j'ai reçus hier et qui ne m'ont pas dressé un tableau idyllique du fonctionnement des commissions de spécialistes. Pour éviter ce travers, nous avons essayé d'apporter le maximum de garanties et, si nous pouvons en ajouter d'autres dans le cadre de cette discussion, nous le ferons.
M. Delfau a souhaité connaître ma position sur un certain nombre d'amendements ; je lui répondrai au fur et à mesure du débat ; je pense d'ailleurs qu'un certain nombre d'entre eux sont satisfaits soit par des amendements de la commission des affaires culturelles, soit par le projet de loi lui-même, en tout cas tel que je l'ai conçu. Concernant la nomination des personnalités qualifiées, par exemple, je pense, monsieur le sénateur, que nos positions se rejoignent.
Enfin, vous avez dit qu'un collectif budgétaire serait la voie la plus adéquate pour véritablement rénover les universités.
Personnellement, je pense que l'esprit de la LOLF est que tout l'argent public qui va être alloué aux universités soit consacré à des missions clairement identifiées, avec des objectifs clairement définis.
Je crois nécessaire qu'au moment où nous engagerons des moyens en faveur de l'université ? moyens qui seront très importants ? nous le fassions autour de projets. C'est pourquoi j'ai structuré la réflexion du ministère en cinq chantiers.
Le premier est un chantier sur l'immobilier, qui nous donnera l'occasion d'établir de vraies listes de priorités immobilières et de rénovation.
Un second chantier portera sur les conditions de vie des étudiants. Il devra nous permettre d'envisager dès l'automne, selon la volonté du Président de la République, l'établissement d'un grand plan visant à cette amélioration
Un troisième chantier, qui répond, là encore, à l'une priorité du Président de la République, concernera la revalorisation des débuts de carrière dans les métiers de la recherche. En effet, d'ici à cinq ans, 30 % des membres du CNRS et de l'INSERM partiront à la retraite, compte tenu de facteurs démographiques ; nous ne pourrons pas ne pas recruter des jeunes de grand talent pour les remplacer, ce qui suppose d'accroître l'attractivité de ces métiers.
Quatrième chantier : la réussite en licence, sur laquelle nous travaillons activement. Nous avons déjà toute une série de pistes de réflexion grâce, d'une part, au travail du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche et, d'autre part, à celui que conduisent les présidents de conférences d'universités ; néanmoins, il convient que les conclusions de ces travaux soient soumises à la concertation. Il est vrai que nous avons mis au point ce projet de loi tambour battant, mais nous devons maintenant prendre le temps de la concertation sur ces différents chantiers.
Enfin, le dernier chantier que nous avons lancé va prendre du temps, car le sujet n'est pas facile, je veux parler du chantier sur les carrières des personnels de l'université.
Je le répète, je souhaite que mon ministère soit conçu comme celui du changement concret. En d'autres termes, je n'ouvre pas des chantiers en début de mandat pour ne jamais les clore. J'ouvre chaque chantier en me disant que, si nous arrivons à une conclusion consensuelle et si j'ai les moyens financiers de la mettre en oeuvre, je le ferai.
Par conséquent, j'avancerai pas à pas. Dès lors, quel intérêt aurait le vote d'un collectif budgétaire dès le mois de septembre ?