Il n'y a pas de place pour la naïveté lorsqu'on a été candidat quatre fois et que l'on a perdu ! Toutefois, les règles fixées par le CIO m'interdisent de commenter les autres candidatures, et je ne le ferai donc pas.
Je vous remercie tout d'abord d'avoir insisté sur les atouts de notre candidature. Dans la mesure où nous sommes sous le regard du CIO, toute prise de parole publique en ce sens est bienvenue. C'est une caractéristique bien française que de souligner les faiblesses plutôt que les forces ; nous devons nous en départir, car les autres ne le font pas.
C'est dans un souci de transparence internationale que le CIO a recours à des partenaires permanents pour financer son modèle économique. L'agenda 2020 est clair sur ce point : le Comité ne prendra pas le risque de s'écarter de la démarche de transparence dans laquelle il s'est engagé. Le choix final se fera sur la qualité des candidatures, en fonction de la réponse plus ou moins appropriée au cahier des charges et en mesurant combien le projet social sous-jacent entre en résonance avec les valeurs de l'olympisme, auxquelles les membres du CIO sont particulièrement attachés.
Par ailleurs, le public des Jeux olympiques est surtout présent en Europe et en Asie, y compris pour ce qui concerne les retransmissions audiovisuelles. L'intérêt des grands médias partenaires est de toucher le public le plus large possible, en organisant une diffusion la plus compatible possible avec le moment où le plus grand nombre de spectateurs sera susceptible de regarder la télévision. Or les deux grands pôles à cet égard restent l'Europe et l'Asie.
Quant à l'innovation technologique, c'est un enjeu important, dans la mesure où elle favorisera l'émergence de nouvelles manières de pratiquer ou de suivre le sport. La ville des nouvelles technologies, c'est bien sûr San Francisco. Cependant, Paris est connue comme l'une des grandes métropoles créatives mondiales, bénéficiant d'atouts exceptionnels. Bertrand Delanoë a donné l'impulsion en 2008, avec la reconversion de certains quartiers, comme celui du Sentier, transformé en incubateur pour l'accueil de cette nouvelle économie. On a alors parlé de « Silicon Sentier ». Grâce à cet investissement public, Paris est désormais une métropole mondiale, dont l'écosystème exerce un attrait indéniable.
Les grands du secteur - Microsoft, Orange, etc. - ont ouvert des incubateurs privés. Xavier Niel a ouvert un incubateur et une école unique en son genre, l'École 42, dont les élèves sont sélectionnés non sur leurs diplômes, mais sur leurs qualifications numériques, pour former des développeurs, la spécialisation la plus demandée. Je vous invite à visiter ces sites méconnus, mais très éclairants. Paris est bien placée sur ce terrain dans la compétition internationale.
Quant aux liens avec le sport, notre capitale est la première ville où s'est ouvert un incubateur consacré à ce sujet, le Tremplin, installé dans les locaux du stade Jean Bouin. Nous avons organisé un « hackathon » pendant un week-end, pour rassembler toutes les compétences du numérique qui peuvent être utiles au sport. Google et Apple ont choisi Paris pour leur implantation européenne, et non Londres par exemple, ce qui n'est pas un hasard. Le patron de Facebook France a quant à lui pris la liberté de participer à la campagne en faveur de la candidature de Paris.
Le projet de société est essentiel. Il faut montrer qu'il est à l'oeuvre dès la candidature : vous ne pouvez pas vous contenter de le promettre pour 2024 ! Il faut préparer une génération de futurs champions en augmentant la place du sport à l'école. Je me suis battue pour que, à la rentrée 2016, de nouvelles classes à horaires aménagés pour le sport ouvrent dans l'ouest parisien - actuellement, les sections s'arrêtent trop souvent en troisième, laissant les parents se débrouiller pour faire continuer le sport à leurs enfants. En 2017, il y aura, dans chaque arrondissement parisien, un collège et un lycée qui comportent une telle section. J'en ai parlé avec la présidente de la région Ile-de-France : ce dispositif pourra être élargi.
Paris propose un plan d'accompagnement de la candidature qui produit déjà des effets, par exemple avec un programme sport et santé dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, des établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), et des aménagements sportifs dans l'espace public. Nombre de communes souhaitent aussi se doter d'un tel plan.
Bien sûr, nous nous intéressons aux autres candidatures... même si nous n'avons pas le droit d'en parler. Toutefois, les athlètes nous ont appris qu'il vaut mieux, dans la course, rester dans son couloir !
À Rio, la thématique de la sécurité a été soulevée et présentée - de façon un peu lourde... - comme pouvant mettre en difficulté la France. Notre présentation et les réponses du Président de la République, notamment, ont marqué les esprits : notre pays a montré, avec l'Euro 2016, qu'il savait organiser de grands événements malgré la menace terroriste. Il s'agissait d'une question surprenante : si les attentats devaient nous empêcher d'organiser de tels événements, quel message pour le monde ! Par ailleurs, quelle ville peut se targuer de ne pas avoir de problèmes de sécurité ? Les attentats frappent partout, on l'a vu à New-York récemment, et Paris est loin de ces villes ou l'on compte chaque année des centaines de morts par balle... Nous avons donc réussi à faire cesser les remarques sur ce thème.
Notre présentation a surpris par plusieurs de ses aspects : les athlètes mis en valeur, avec Tony Estanguet, Teddy Riner ou Emmanuelle Assmann, qui porte la candidature de Paris pour les Jeux paralympiques ; des femmes à la tribune, ce qui n'est pas si fréquent, et plus généralement la diversité ; nous nous sommes exprimés en anglais, en espagnol et, naturellement, en français.
Nous avons pris en compte ce qui nous avait manqué en 2012 - même si l'excellente candidature de Paris n'avait alors perdu que de quatre voix.