Intervention de Antoine Durrleman

Commission des affaires sociales — Réunion du 28 septembre 2016 à 10h15
Rapport annuel de la cour des comptes sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale — Audition de M. Antoine duRrleman président de la sixième chambre de la cour des comptes

Antoine Durrleman, président de la Sixième chambre de la Cour des comptes :

Les prévisions actuelles esquissent une stabilisation du déficit autour de 3,9 milliards, plutôt qu'un recul, et le Haut Conseil des finances publiques estime que les hypothèses de croissance retenues par le PLF et le PLFSS paraissent optimistes, avec des conséquences directes sur l'équilibre de la sécurité sociale - à quoi s'ajoute la réalité de « l'assouplissement » de l'Ondam pour l'an prochain, dont l'accroissement autorisé serait plus proche, je l'ai dit, de 2,35 % que de 2 %.

Les effets des réformes, ensuite, sont plus faciles à documenter quand elles sont d'ordre réglementaire ou tarifaire, que quand elles visent à modifier le comportement des professionnels. Je pense, par exemple, aux apports de la chirurgie ambulatoire, qui se développe et dont les effets sont certains, mais mal connus, ce qui est vrai pour les actions de maîtrise médicalisée dans leur ensemble. C'est pourquoi nous recommandons cette année encore qu'un compte rendu précis des économies soit annexé au PLFSS, en préalable au débat sur l'Ondam. Certaines mesures présentées comme des économies n'en sont pas - par exemple les 220 millions d'euros des médicaments innovants et coûteux qui seront pris en charge par le fonds d'innovation thérapeutique : les dépenses demeurent, mais elles sont sinon débudgétisées, du moins sorties du champ de l'Ondam en 2017.

Dans l'articulation entre les soins de ville et hospitaliers, il y a effectivement un virage ambulatoire, mais nous en connaissons insuffisamment l'ampleur - nous y consacrerons prochainement une étude et nous préconisons d'ores et déjà une mise en réserve prudentielle des augmentations tarifaires.

Le « décroisement » suggéré par la Cour entre le régime de base et les complémentaires supposerait certainement une réorganisation des responsabilités, pour que les régimes complémentaires négocient les conventions directement avec les professionnels. Actuellement, l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (Unocam) est nécessairement divisée entre les intérêts des mutuelles, de la prévoyance et des assurances, le système évoluerait avec le « décroisement ».

Sur les ALD, la Cour met l'accent, au-delà de la réforme structurelle qui passerait par un reste à charge plafonné, sur les différences territoriales dans le coût des affections. Nous avons obtenu de très haute lutte les chiffres territorialisés auprès de la Cnam : ils établissent des différences territoriales importantes et tout à fait méconnues car non documentées ; en examinant il y a quelque temps les coûts de l'insuffisance chronique rénale en phase terminale, nous avions trouvé des possibilités d'économies de l'ordre de 900 millions d'euros, c'est dire les marges d'action. Et nous constatons une « sur-dépense » de quelque 1,7 milliard dans les vingt départements où le coût des ALD dépasse la moyenne nationale : il faut, à tout le moins, mieux analyser ces écarts.

Le déficit hospitalier, de son côté, s'est accru de 200 millions entre 2014 et 2015, mais il se concentre sur 26 établissements publics de santé : pour les autres, la gestion paraît maîtrisée.

La Cour conteste, dans le jeu d'écriture de quelque 700 millions sur la CSG, le fait que cette somme soit inscrite au compte de résultat de l'assurance maladie, alors qu'elle devrait être au bilan ; nous verrons, le moment venu, quelles seront les conséquences sur la certification des comptes - nous avons d'ores et déjà présenté nos arguments cartes sur table.

La Cades est elle aussi exposée au risque d'un accroissement des taux d'intérêt, puisqu'environ un tiers de sa dette est libellée à taux variable ; si les hypothèses d'augmentation des taux se réalisent, il en résulterait une augmentation de charges de 400 à 500 millions annuels. Des moyens peuvent être mobilisés pour y faire face, la Cour mentionne en particulier le Fonds de réserve pour les retraites, qui dispose de fonds libres d'emploi.

Enfin, s'agissant de la CRDS, le rapport de la Cour indique qu'un demi-point de contribution représente environ 7 milliards d'euros.

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