Ces quatre amendements sont contraires à la position de la commission.
Ces amendements visent en effet à rétablir l’application du socle commun de l’action de groupe aux actions de groupe en matière de dommage environnemental, de santé et de manquement aux règles de protection des données personnelles.
L’amendement n° 97 tend à y ajouter, inutilement selon nous, l’action de groupe en matière de discrimination, en se fondant, de façon erronée, sur l’article 225-1 du code pénal, lequel n’instaure pourtant, toujours selon nous, aucune action de groupe. Comme je l’ai dit en commission, cette partie de l’amendement est déjà satisfaite par le texte, les articles 44 et 45 prévoyant des actions de groupe en matière de discrimination en général et en matière de discrimination au travail en particulier.
Je me propose de développer les arguments qui fondent la position de la commission sur ces différentes actions afin de ne pas avoir à y revenir lors de l’examen d’autres amendements.
S’agissant de l’action de groupe environnementale, le dispositif nous paraît juridiquement inabouti à ce stade.
En effet, les qualités à agir des deux catégories d’associations ne sont pas interchangeables : des associations de victimes de dommages corporels agiront-elles en vue de la cessation d’un manquement à la législation environnementale, par exemple ? Vous me permettrez, à titre personnel, d’en douter, et le texte n’est pas clair sur ce point.
Surtout, le lien juridique entre le préjudice allégué par des personnes – personnes qui, aux termes du texte de l’Assemblée nationale, peuvent être des personnes morales, mais, dans ce cas, quelle peut être la nature du préjudice ? – et le dommage est particulièrement incertain, car il n’est pas clairement défini.
Dans une rédaction incertaine, on renvoie aux « domaines mentionnés » à un article du code de l’environnement qui énumère un certain nombre d’infractions au droit de l’environnement. Or une infraction ne constitue pas en elle-même un dommage causé à une personne. Si le dommage susceptible de justifier l’exercice de l’action est aussi peu clairement défini, comment apprécier le préjudice et son lien de causalité avec un dommage impossible à identifier ?
De plus, dans ce cadre, on veut certes assurer la réparation de préjudices matériels, mais aussi de préjudices corporels. Or aucun dispositif n’est prévu pour l’évaluation de ces préjudices, par définition éminemment individuels, alors que la logique même du socle commun de l’action de groupe est conçue pour réparer des préjudices matériels que je qualifierai de simples, c’est-à-dire faciles à appréhender.
En outre, compte tenu de l’importance de ce sujet, on peut regretter l’absence totale d’étude d’impact. Ce dispositif ne figurait en effet pas dans le texte initial – nous n’en avons donc pas pris connaissance en première lecture – et a été introduit par amendement du Gouvernement.
S’agissant de l’action de groupe en matière de santé, il nous semble préférable, pour des raisons de lisibilité, exactement comme pour l’action de groupe en matière de consommation, et compte tenu des spécificités des préjudices corporels, qu’un dispositif complet soit établi dans un seul texte, en l’espèce le code de la santé publique, plutôt que partagé entre deux textes, à savoir ce code et le présent projet de loi.
S’agissant, enfin, de l’action de groupe en matière de protection des données personnelles, qui ne peut viser qu’à la cessation d’un manquement à la législation relative à ladite protection, sans indemnisation, la commission ne voit pas bien l’intérêt de créer une action de groupe spécifique, qui exigerait de présenter des cas individuels de victimes et présenterait une certaine lourdeur pour l’association requérante. La création d’une action dans l’intérêt collectif de la protection des données personnelles sur l’initiative d’associations dont c’est l’objet, comme dans le domaine de la consommation, serait plus simple. Cette action de groupe ne nous semble donc guère apporter de plus-value.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 97 ainsi que sur les amendements identiques n° 18, 56 et 81.