Monsieur le Président, Mesdames les Sénatrices, Messieurs les Sénateurs, j'ai répondu naturellement à votre invitation tant l'actualité du ministère est dense.
J'en viens au premier sujet que vous avez abordé et qui concerne le nouveau plan de relance autoroutier. En 2015, au terme d'une intense négociation en lien étroit avec les parlementaires, le Gouvernement a pris la décision d'engager un plan de relance autoroutier pour un montant de 3,27 milliards d'euros, qui prévoyait la réalisation de nouveaux investissements structurants en contrepartie d'un allongement de la durée de leur concession ; choix qui avait nécessité une négociation avec la Commission européenne. Chacun sait ici que l'adossement n'est plus possible depuis longtemps et que la question de l'allongement suppose l'accord de la Commission. Dans le cadre du plan de relance 2015, une vingtaine d'opérations sont déjà en cours de réalisation. Je vous rappelle que 55 % du montant des travaux doivent être réservés à des PME et que les conditions de contrôle des marchés font que, pour la première fois, une grande entreprise concessionnaire qui exécute par ailleurs des travaux n'a pas été l'adjudicataire de ses propres travaux.
Cette négociation, conclue par un protocole signé le 9 avril 2015, a également conduit à l'engagement des concessionnaires pour non seulement des tarifs mais aussi pour le versement au budget de l'Afitf d'un milliard d'euros étalé par tranches de cent millions d'euros au moins durant les trois premières années. Cette négociation a eu enfin pour résultat de « durcir » le cadre des contrats et de leur contrôle : de nouvelles compétences de contrôle ont été confiées à l'Arafer et des clauses beaucoup plus sévères de limitation de rentabilité ont été incluses, ce qui n'avait pas été fait au moment de la privatisation et a entraîné tout le débat que nous avons connu. Effectivement, les intérêts de l'État, compte tenu de l'évolution des marchés et des recettes, n'étaient pas contractuellement protégés. Les accusations de sur-rentabilité des concessionnaires sont désormais évincées, car toute rentabilité supérieure aux limites prévues au contrat occasionnera soit une restitution en limitation ou une baisse de tarif, soit une réduction de la durée des concessions. Tel est le nouveau régime contractuel que nous avons imposé dans ce plan.
J'ai également entendu des reproches d'opacité. Tous les éléments que j'ai mentionnés sont parfaitement publics puisqu'ils ont fait l'objet d'avenants aux contrats de concession lesquels ont fait l'objet de décrets publiés et parfaitement consultables. Cet été, le Président de la République a annoncé un nouveau plan d'investissement autoroutier. Sur quelles bases ? Le Ministère des transports est saisi depuis plusieurs années de demandes réitérées de collectivités locales appuyées en général par les parlementaires, toutes tendances confondues, de construction de nouveaux échangeurs pour desservir les territoires. Ces demandes sont parfaitement justifiées, car elles concernent des situations qui ont évolué physiquement depuis la construction des autoroutes. Ainsi, pour des agglomérations, les collectivités territoriales demandent désormais la construction de nouveaux échangeurs. Je pense à Nantes, Vienne et Agen et je pourrais en citer d'autres. Jusqu'à présent, la seule réponse que l'État pouvait apporter se limitait à la validation du dossier technique du concessionnaire. Il précisait aux élus concernés que les études et travaux étaient entièrement à la charge des collectivités locales puisqu'on se situait en dehors du contrat de concession et qu'on ne pouvait, sur ces nouvelles opérations, obliger le concessionnaire à le faire tout seul. Souvent, les collectivités locales finançaient les études mais une fois ces dernières réalisées, achoppaient sur la question du financement des travaux. Au moment où le Président de la République fait cette annonce, des travaux doivent être conduits à la demande des collectivités locales et être financés d'une manière assez simple. Les demandes sont d'ailleurs claires et justifiées : elles exposent de réels problèmes de circulation à l'instar de poids lourds traversant des zones urbanisées. De telles situations n'existaient pas au moment de la signature du contrat de concession. Il s'agit bel et bien de demandes des collectivités locales qui sont très fortes et s'appuient sur des dossiers souvent avancés dont l'opportunité pour la desserte et l'activité économique locale est avérée. En outre, ce milliard d'euros de travaux est utile à l'activité économique et l'emploi, dans un contexte difficile pour le secteur des travaux publics. Une telle somme représente également la création de cinq mille emplois, conformément à la grille utilisée lors du précédent plan. La question se pose cependant de la mobilisation de fonds suffisants. Une discussion a lieu entre les collectivités locales et les concessionnaires par l'intermédiaire des préfets de région que j'ai missionnés pour arriver à un partage des tâches. Comment les concessionnaires peuvent-ils payer leur part ? Soit via l'allongement des concessions alors qu'il faut environ deux ans pour négocier avec la Commission européenne, soit par l'augmentation des tarifs. Nous avons choisi - et nous assumons notre choix - l'augmentation des tarifs qui permettra aux sociétés concessionnaires de payer leur part pour les échangeurs. Que représente une telle hausse de 0,3 % pour les clients ? Une augmentation maximale de quelques dizaines de centimes sur un trajet. Pour un Paris-Lyon, cela représente par exemple 40 centimes de plus en 2020, pour un trajet qui coûte aujourd'hui 33,70 euros. Sur un Bordeaux-Rennes, cela représente 30 centimes sur un trajet de 25 euros actuellement. Il peut certes y avoir une position dogmatique à l'encontre de toute forme d'augmentation, mais des compensations demeurent. Lorsque ces trois éléments ont été réunis, à savoir répondre enfin à des demandes anciennes, portées et réitérées par les collectivités locales, toutes tendances confondues, fixer un objectif d'activités pour les travaux publics à hauteur d'un milliard d'euros et arrêter un plan contenant des projets mâtures qui ont d'ores et déjà franchi le stade des études de réalisation, nous avons pris la décision de faire ce plan. Je dois dire que depuis son annonce, nous avons reçu de nouvelles demandes.
Concernant la négociation sociale sur le ferroviaire, la branche ferroviaire, qui rassemble des acteurs publics et privés, en raison notamment de l'ouverture du fret à la concurrence depuis plus d'une décennie, et la SNCF ont engagé au printemps 2016 un dialogue avec les partenaires sociaux sur l'élaboration d'un cadre social commun à toutes les entreprises du secteur ferroviaire. Ce dialogue s'est conclu en juin par trois actes simultanés, car il était indispensable que chaque discussion à son niveau ne reportât pas la responsabilité sur la négociation parallèle : la publication du décret socle, la signature d'un accord de branche commun aux secteurs public et privé, et d'un accord d'entreprise à la SNCF. Ce cadre social avec ses trois niveaux a été mené à bien avant l'échéance du 1er juillet 2016 prévue par la loi. Il conduit à assurer, d'une part, un socle de dispositions d'ordre public qui fixe les règles de temps de travail indispensables pour assurer la sécurité des circulations et des travailleurs et la continuité du service, conformément à l'objectif donné par la loi au décret socle. Il permet, d'autre part, de décliner ces règles pour l'ensemble des entreprises ferroviaires, groupe public et entreprises privées, de façon à ce que la concurrence au sein du monde ferroviaire ne se fasse pas par du dumping social, mais au sein d'un nouvel équilibre économique ; ce qui a été accepté par toutes les entreprises au sein de l'UTP. Enfin, il précise les modalités d'évolution au sein du groupe public SNCF, sachant que la loi de réforme ferroviaire avait acté le remplacement du régime interne dit RH 077 qui était un acte réglementaire. Un nouvel accord d'entreprise a ainsi été signé par les seuls syndicats réformistes et va entrer en application le 11 décembre prochain, puisqu'aucune forme d'opposition majoritaire n'a été formulée. Contrairement à ce qui a pu être dit et écrit, la direction de l'entreprise a été présente à mes côtés à tous les moments de cette négociation. Cet accord induit des possibilités de souplesse par accord locaux, mais la durée du travail n'est pas le seul sujet de discussion entre partenaires sociaux au sein de la SNCF. Enfin, à partir de l'accord de branche, des négociations pour des accords d'entreprise ont aussi lieu dans les entreprises privées, en revivifiant le dialogue social dans ce secteur.
Les acquis de cette négociation sont, d'une part, le passage du domaine règlementaire ancien à un domaine conventionnel, qui place les entreprises publiques du ferroviaire dans le droit commun de la négociation sociale. Le rapprochement du différentiel de compétitivité dans le secteur du fret ferroviaire entre entreprises privées et opérateurs publics est un second acquis et a été rendu possible grâce à l'accord de branche qui a résulté de l'effort de dialogue des entreprises privées. Obtenir un tel accord de branche auprès de ces dernières représentait d'ailleurs une grande difficulté car il visait la réduction des écarts de compétitivité entre les secteurs public et privé où les conditions d'emplois ont été modifiées. Je veux ici remercier très sincèrement les entreprises privées de s'être inscrites dans la démarche et la cohérence de la réforme ferroviaire. Enfin, dans le cadre de l'accord d'entreprise de la SNCF figure une disposition de souplesse qui permet de conclure localement des accords majoritaires dérogatoires au cadre commun désormais contractuel, qui constitue un nouvel outil mis à disposition des partenaires sociaux dans le cadre de l'ouverture à la concurrence. Cette disposition sera utile aux acteurs sociaux et parfois aux élus régionaux lorsque l'ouverture à la concurrence sera à l'ordre du jour.
La lecture qui est faite de cet accord n'est pas justifiée car on est bien passé dans un cadre conventionnel et qu'un rapprochement s'est opéré entre la compétitivité entre le privé et le public, comme le démontre l'accord signé par les entreprises privées et la négociation demeure ouverte dans l'accord signé par la SNCF. Monsieur le Président, vous avez évoqué le rapport stratégique d'orientation du Gouvernement sur le système ferroviaire. Celui-ci, prévu par la loi, a été présenté le 14 septembre dernier au Haut Comité du système de transport ferroviaire - au sein duquel siègent des membres de la Haute assemblée - pour recueillir son avis, et sera prochainement transmis au Parlement. D'ailleurs, nous y joindrons l'ensemble des contributions et des débats auxquels il donnera lieu dans ces différentes instances.
J'en viens à la dette ferroviaire. S'agissant du rapport du Gouvernement relatif à la dette de SNCF et plus particulièrement celle de SNCF Réseau, sur lequel Monsieur le Président vous êtes revenu, nous avons abordé cette question en anticipant toutes les réponses possibles, y compris le cantonnement ou la reprise de la dette par l'État. Pour être clair, Monsieur le Président, car vos propos dans la presse ne m'ont pas échappé, je suis tout à fait prêt à entrer dans un débat de détails pour préciser l'origine de cette dette et retracer son évolution. La décision sur le financement de quatre lignes LGV a mobilisé plus de cinq milliards d'euros de ressources propres de la SNCF, ainsi que plus de six milliards d'euros du budget de l'Afitf. Aujourd'hui, sur les onze milliards d'euros qu'il faut à l'Afitf mobiliser, l'essentiel est constitué par cela. Je ne reprendrai pas un débat qui a été tranché il y a quelques années, mais il m'apparaît essentiel que chacun assume ses responsabilités.
Ces chiffres démontrent notre incapacité à financer à la fois ces investissements, dont la pertinence reste envisageable, et la maintenance du réseau existant. Devant les parlementaires experts que vous êtes, je veux reprendre une distinction que j'avais opérée au sein même des crédits affectés à la maintenance. En effet, il faut distinguer, dans ces opérations de maintenance, l'entretien de la régénération, laquelle est essentielle pour prévenir le vieillissement du réseau. A l'aune de la trajectoire financière amorcée ces dernières années, il est manifeste que, faute des crédits suffisants pour assurer ces missions, l'enveloppe globale pour la maintenance est passée entre 2007 et aujourd'hui de trois à près de cinq milliards d'euros. Mais avec cette somme de trois milliards, on a privilégié l'entretien au détriment de la régénération. C'est probablement ce déséquilibre qui a constitué un facteur de vieillissement accéléré du réseau. Nous avons essayé d'y répondre : cette année, sur un montant global de 4,9 milliards d'euros, 2,3 milliards devraient être consacrés à l'entretien courant tandis que 2,6 milliards devraient être alloués à la régénération. Cette trajectoire s'imposera à tous, quoiqu'il arrive, en raison du vieillissement du matériel.
L'évolution de la dette de SNCF Réseau constitue bien un sujet majeur de préoccupation pour le Gouvernement. Elle représente 39,3 milliards en 2015 en normes françaises. L'existence de cette dette empêche-t-elle l'activité de SNCF Réseau cette année, en termes de volume de travaux ? Il paraît difficile d'aller au-delà des cinq milliards, compte tenu des moyens humains nécessaires et de l'ouverture à la sous-traitance. Nous avons créé 500 emplois Réseau en 2015 et 350 en 2016. Il va falloir suivre une telle politique sur huit à dix ans, afin de remettre Réseau à niveau, conformément aux préconisations des experts. La perspective de reprendre une partie de la dette de Réseau appelle deux observations. La première, c'est que Réseau bénéficie de taux d'intérêt extrêmement bas et d'un système de refinancement qui s'élabore à mesure et permet une maîtrise de la dette. Mais une telle situation va-t-elle durer ? L'appréciation que nous avons portée nous paraît ainsi juste dans le contexte actuel, mais une remontée des taux d'intérêt conduirait à remettre en cause la capacité de financement de Réseau. C'est la raison pour laquelle le dernier paragraphe du rapport est consacré à la clause de revoyure qui fixe le réexamen du choix opéré dans trois ans. Monsieur le Président, nous avons eu ce débat. Mais la réponse financière indique qu'il n'est pas très intéressant pour le moment de reprendre une partie de la dette. En effet, reprendre une partie de la dette pour permettre à Réseau de fonctionner normalement est une vraie question. Prenons garde aux incohérences car on ne saurait appliquer la règle d'or pour doter Réseau de nouvelles marges d'investissement. Il n'y aurait là aucune cohérence de le justifier de ce point de vue-là ! Il faut naturellement demeurer en cohérence avec ce que le législateur a prévu.
Dans ce contexte, la « règle d'or » est l'une des principales mesures prévues par la réforme ferroviaire pour maîtriser l'endettement de SNCF Réseau. Le Conseil d'État, que nous avions saisi sur ce projet de décret, a estimé, lors d'une audience qui s'est tenue la semaine dernière, que le décret devait au préalable être soumis à l'avis de l'Arafer. Cette procédure est en cours. La publication du décret d'application interviendra d'ici la fin de l'année, dans le même calendrier que la conclusion du contrat. Quel est donc l'objectif de la règle d'or ? Le dispositif envisagé par le Gouvernement exclura toute participation de SNCF Réseau dans les projets de lignes nouvelles en tracé neuf au cours des prochaines années. On ne peut guère être plus clair car on ne saurait aggraver la situation de Réseau. Un point récent a été l'occasion de réactions politiques : l'exemption du Charles de Gaulle-Express de cette règle d'or avec une participation de Réseau à la société commune. A cet égard, j'ai fait part de mes hésitations devant l'Assemblée nationale : fallait-il, compte tenu de la singularité de la prise de capital dans une société de projets qui rassemble des actionnaires privés, obtenir une dérogation ? Les avis des juristes étaient sur ce point partagés. Il vaut tout de même mieux exposer la situation au législateur afin de prévenir un tel risque juridique. Afin de nourrir votre réflexion, vous devriez recevoir, si cela n'est pas déjà le cas, un rapport de l'Arafer sur la réforme ferroviaire. Ainsi, l'Arafer développe l'idée que le Gouvernement n'a pas à demander une dérogation puisque cette dernière s'avère inutile. Ce document, qui est assez dense et parfois critique, contient des arguments particulièrement intéressants, s'agissant notamment de l'évolution de la dette ferroviaire et la règle d'or ; l'Arafer rappelant que cette dernière n'est jamais que la seconde version d'une précédente règle d'or qui avait été instaurée en 1997 et dont le non-respect en 2008 pour assurer le financement du TGV Grand-Est, avait fait l'objet d'une sévère critique de la Cour des comptes. C'est à partir de cela que la règle d'or nouvelle s'avère plus restrictive que la précédente.
Dans un rapport récent sur le financement des infrastructures, la commission des finances du Sénat mentionne le poids des projets nouveaux. Je partage ses conclusions sur les deux points que sont les moyens dévolus à l'Afitf et l'absence de Réseau du financement de ces prochaines infrastructures. L'État aujourd'hui, et les collectivités locales demain, seront placés devant leurs responsabilités. Quelles que soient les majorités politiques, un tel partage devra être la règle. S'agissant du référé de la Cour des Comptes relatif à l'Afitf adressé au Premier ministre le 10 juin 2016, celui-ci est en deux parties. En effet, la première s'inscrit dans la continuité d'un précédent référé qui préconisait l'inscription de l'Afitf dans le budget de l'État. Je ne partage pas cette idée car cette structure me paraît intéressante, en raison de sa composition qui permet le rassemblement de divers acteurs et la lisibilité du dispositif. Le Premier ministre a indiqué qu'il y avait là un désaccord, mais je ne pense pas qu'il s'agisse d'un point fondamental. En revanche, les recettes de l'Afitf font l'objet du second point soulevé par la Cour des comptes. Les recettes de l'Afitf ont été accrues suite à l'abandon de l'écotaxe deuxième version, puisque nous avons voté des centimes sur le gazole et l'essence qui figurent aujourd'hui dans le budget de l'Afitf. Ce budget augmente de 20 % pour atteindre 2,2 milliards d'euros. Mais une telle augmentation ne permettra pas de financer les engagements passés et actuels de l'État pour les années à venir. En effet, après le pic des financements en 2018 et 2019, il est clair aujourd'hui qu'il manque, d'une manière constante, sur le budget de l'Afitf, autour de cinq à six cents millions d'euros. La question va ainsi se poser de diminuer les dépenses, via le désengagement de grands projets existants, comme la réalisation du Lyon-Turin ou du projet de Canal Seine Nord Europe, plus les CPER et l'exécution d'un certain nombre d'engagements. Le débat est devant nous, même s'il n'y a pas d'urgence pour 2017. Et si l'on a déjà augmenté de 20 % le budget de l'Afitf, il faudra nécessairement poursuivre cet effort. Il n'y a que deux solutions : soit dégager de nouveaux crédits budgétaires, ce qui n'est nullement évident, soit trouver de nouvelles recettes.
Enfin, vous m'avez interrogé sur Alstom. Dans un contexte de baisse importante de charge après 2018 et de manque de perspectives commerciales sur son site de Belfort, la direction d'Alstom a annoncé le 7 septembre aux partenaires sociaux un projet de redéploiement d'une partie des effectifs de Belfort, suite à sa fermeture, sur le site de Reichshoffen. Cette décision a donné lieu à l'intervention de l'État qui a conduit à un accord prévoyant le maintien à Belfort de la fabrication des motrices du TGV du futur à laquelle seront consacrés trente milliards d'euros financés conjointement par l'État, l'Ademe et SNCF. D'ailleurs, Alstom va lui-même investir dans ce site trente millions d'euros d'ici à 2018 pour développer et industrialiser une plateforme de locomotives de manoeuvre hybride ou diesel adaptées au marché. Ensuite la question du carnet de commandes se pose et comprend, d'une part, la commande de six rames TGV pour la ligne Paris-Turin-Milan par SNCF Mobilités. La discussion était largement engagée et il n'y a là aucun choix d'opportunité puisque les Italiens ont modifié les conditions de fonctionnement et de signalisation, impliquant l'adaptation spécifique de ces nouvelles rames à cette ligne. L'État est intervenu pour qu'un accord soit atteint sur cette question et a permis à ce dossier ancien de se concrétiser. L'achat par SNCF Réseau de vingt locomotives destinées au secours des trains en panne relève lui aussi d'un dossier présentant une certaine antériorité. Certaines de ces locomotives, qu'on peut apercevoir dans certaines gares parisiennes, ont près de quarante ans et se trouvent dans un état d'une grande vétusté. La décision a été prise de les changer et c'est l'objet de cette commande par Réseau. Ensuite vient le dossier de la commande des quinze TGV-Duplex commandés par l'État en tant qu'autorité organisatrice au titre des trains d'équilibre du territoire. La question des discussions entamées avec les régions sur les éventuelles reprises de compétences mise à part, l'État souhaitait procéder à l'acquisition de matériels de deux types : premièrement, ont été commandés trente trains de type Coradia, qui sont d'ordinaire achetés par les Régions et qui circulent sur les lignes d'équilibre du territoire ou dans le cadre des négociations avec les régions. Ces trains sont d'ailleurs fabriqués à Reichshoffen et non à Belfort. L'État a ensuite décidé que certaines lignes étaient structurantes, au titre des trains d'équilibre du territoire. Il s'agit des lignes Paris-Clermont-Ferrand, Paris-Orléans-Limoges-Toulouse et la transversale sud Bordeaux-Toulouse-Marseille-Nice pour lesquelles l'État a décidé d'acheter du matériel nouveau. Ces lignes doivent réaliser des performances différentes de celles des autres lignes et la vitesse de 200 kilomètres-heure des trains qui la fréquentent empêche le recours aux trains produits à Reichshoffen, comme j'ai pu en faire l'analyse dans la presse régionale. Afin d'éviter l'annulation du marché, en raison des éléments du cahier des charges de ce projet, j'ai décidé que soit lancé un appel d'offres pour des trains allant à plus de 200 kilomètres-heure sur ces trois lignes structurantes et ce, avant l'annonce de la fermeture du site de Belfort. La décision qui a été prise sur ce dossier qui prévoyait l'achat de quinze nouveaux trains est de commander directement, comme autorité organisatrice, quinze rames duplex, dont une partie doit être construite à Belfort. Ces rames sont prévues sur la transversale sud Bordeaux-Marseille et cette décision se substitue à l'appel d'offres. On ne va pas sur cette même ligne commander de surcroît de nouveaux trains ! D'ailleurs, ceux qui ne prennent comme chiffres que le résultat de la commande annoncée doivent aussi faire la soustraction par rapport à ce qui existait avant. Globalement, on peut penser que les trains précédemment budgétés valaient chacun vingt millions d'euros, alors que chaque nouveau train commandé représente un investissement de trente millions d'euros. Quel est le raisonnement ? C'est certes une décision d'opportunité politique que nous assumons. Il est vrai que ces trains, qui peuvent atteindre trois cent cinquante kilomètres-heure, circuleront sur des voies où ils ne pourront dépasser deux cent cinquante kilomètres-heure. Telle est également la réalité de près de la moitié des TGV d'aujourd'hui, comme je peux moi-même le constater en prenant la ligne depuis Paris vers Dax et Bayonne qui est réellement à grande vitesse jusqu'à Tours. Cela fait vingt ans que la situation perdure ! Sur cette nouvelle ligne Bordeaux-Nice, il y a cependant le Grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) avec, à l'horizon 2024, une partie grande vitesse entre Bordeaux et Toulouse, au-delà du tronçon qui va être inauguré le 1er juillet prochain. De l'autre côté existent déjà des lignes TGV entre Avignon et Marseille. Nous assumons ainsi notre décision et notre achat de trains qui ne rouleront pas immédiatement à leur vitesse normale. La construction des nouvelles infrastructures, qui leur permettront de l'atteindre, a été décidée, puisque le décret d'utilité publique vient d'être signé. La durée de vie des trains étant d'une trentaine d'années, l'épure d'aujourd'hui implique que les trains circulent ainsi pendant près de cinq ans, c'est à dire le temps que les infrastructures soient construites. Nous assumons ce choix qui permet de répondre à une question industrielle et de sécuriser le site de Belfort. Voilà ce que je voulais vous dire sur l'ensemble des sujets sur lesquels vous m'avez interrogé, en vous priant de m'excuser d'avoir été aussi long. Néanmoins, devant une commission parlementaire, il me paraissait essentiel d'honorer l'exigence d'exhaustivité.