Nous allons maintenant passer au premier point de l'ordre du jour. Vous vous souvenez sans doute qu'à l'initiative de notre Délégation, un marché a été lancé au printemps 2015 pour faire réaliser des études d'impact concernant des dispositions législatives applicables aux entreprises.
En juillet 2015, le Conseil de Questure a retenu l'offre présentée par la société Atexo, en groupement solidaire avec l'entreprise Datastorm, pour réaliser ces études d'impact.
C'est dans le cadre de ce marché que le bureau de notre Délégation, réuni le 15 décembre 2015, a décidé de confier au groupement Atexo/Datastorm la réalisation d'une étude, tendant à décrire, sous l'angle statistique, le contexte économique d'une proposition de loi importante pour les entreprises : la proposition de loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre, dite proposition de loi vigilance. Ce texte instaure une obligation de vigilance de ces sociétés à l'égard de leurs filiales, de leurs sous-traitants et de leurs fournisseurs. Selon les auteurs du texte, les députés Bruno Le Roux, François Brottes, Jean Paul Chanteguet, Dominique Potier et Philippe Noguès, il s'agit de responsabiliser les sociétés transnationales. L'objet est d'empêcher la survenance de drames en France et à l'étranger et d'obtenir des réparations pour les victimes en cas de dommages portant atteinte aux droits humains et à l'environnement. Nous pouvons notamment penser à l'effondrement en 2013 du Rana Plaza, immeuble qui abritait des ateliers de confection au Bangladesh.
Cette proposition de loi, déposée en février 2015, fut adoptée par l'Assemblée nationale et transmise le 31 mars 2015 au Sénat, qui l'a rejetée le 18 novembre 2015. Après avoir été adoptée en deuxième lecture par l'Assemblée nationale le 23 mars 2016, elle revient au Sénat en deuxième lecture dans quinze jours, le 13 octobre exactement. Le mercredi 5 octobre, la commission des lois, compétente sur ce texte, examinera le rapport de notre collègue Christophe-André Frassa.
C'est dans cette perspective qu'il m'a semblé utile de porter aujourd'hui à votre connaissance les résultats de l'étude descriptive qu'Atexo/Datastorm a finalisée début 2016. Ce n'est pas une étude d'impact à proprement parler, tant il est apparu difficile de mesurer l'impact de cette nouvelle obligation de vigilance, qui s'apparente à un nouveau régime de responsabilité pour les entreprises. Nous avons donc demandé à Atexo/Datastorm des statistiques descriptives permettant :
- d'identifier et caractériser les entreprises ainsi que le nombre d'emplois concernés ;
- d'analyser la nature et le nombre des filiales et sous-traitants localisés à l'étranger et de caractériser les risques pour ces activités.
Ceci apporte une première vision du contexte économique de la proposition de loi et permettra, lors de la deuxième lecture du texte au Sénat, de nourrir le débat qui est resté très juridique jusque-là.
La proposition de loi impose aux entreprises, au-delà d'un certain seuil d'effectifs, d'établir un plan de vigilance sur la prévention de la corruption, les risques d'atteinte aux droits humains et aux libertés fondamentales, les risques de dommages corporels ou environnementaux graves, ou les risques sanitaires. En outre, elle englobe non seulement les risques résultant de l'entreprise elle-même, ceux issus des sociétés qu'elle contrôle, directement ou indirectement, mais aussi les activités des « sous-traitants ou fournisseurs avec lesquels elle entretient une relation commerciale établie ». Il résulte de cette combinaison que le champ potentiel des faits couverts par la proposition est non seulement très large mais très incertain, ce qui est de nature à réduire la visibilité des entreprises et à constituer un nid à contentieux.
Cette incertitude juridique est d'autant plus préoccupante qu'elle frappera des entreprises qui forment le socle de notre économie. C'est ce que nous montre l'étude Atexo/Datastorm, et je remercie M. Benoît Ravel, PDG de Datastorm, d'être venu nous la présenter aujourd'hui.