Le bureau du Sénat, par une décision du 12 novembre 2014, a confié à notre délégation la mission de simplifier les normes applicables aux collectivités territoriales. Nous avons travaillé d'arrache-pied et produit la proposition de loi déposée avec Jean-Marie Bockel et la proposition de loi constitutionnelle de janvier 2016 inscrivant dans la Constitution les trois principes « prescripteur-payeur », « une norme créée, une norme supprimée », ainsi que la transposition a minima des actes législatifs européens. Cette dernière, adoptée par le Sénat, attend d'être examinée à l'Assemblée. Nous avons enfin produit le rapport avec Philippe Mouiller sur les normes applicables aux collectivités dans le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte.
Sur les normes existantes - le stock - le Sénat a d'abord adopté une résolution invitant le Gouvernement à simplifier sur treize points concrets le cadre règlementaire de l'urbanisme et de la construction. Six de ces préconisations ont d'ores et déjà trouvé un début d'application, alors que les sept autres sont en cours d'instruction par le Secrétariat général à la modernisation de l'action publique (SGMAP) et la Direction générale aux collectivités territoriales (DGCL).
Nous nous sommes surtout lancés dans un travail ambitieux de simplification législative du droit de l'urbanisme. À l'initiative du président du Sénat et de Jean-Marie Bockel, un groupe de travail inter-commissions a été lancé en février 2016, avec Marc Daunis et François Calvet pour rapporteurs. Nourri de plus de 10 000 réponses à la consultation nationale que nous avons mise en ligne, et travaillant de façon transpartisane, le groupe de travail a d'abord abouti à une proposition de loi réunissant vingt-cinq mesures de simplification de nature législative, dans les domaines du contentieux de l'urbanisme, des documents d'urbanisme, du dialogue État-collectivités, de la protection du patrimoine et de l'accessibilité, qui sera examinée en séance publique le 25 octobre prochain, et qui aura besoin de votre soutien pour se rapprocher - je l'espère - de l'unanimité.
Le groupe de travail a ensuite produit un rapport d'information contenant trente-quatre recommandations complémentaires, portant notamment sur la fabrique de la norme, reprises pour l'essentiel par le Conseil d'État : structuration d'un réseau interministériel de la simplification, formation à la simplification à l'ENA et dans les Instituts régionaux d'administration (IRA), renforcement de l'évaluation ex post, recours plus fréquent à l'expérimentation.
Le Conseil d'État n'aime peut-être pas assez le Parlement... Il plaide en effet pour que l'on passe par ordonnances, ce qui est pour nous une fausse bonne idée : elles ne prennent pas beaucoup moins de temps qu'un texte parlementaire, mais surtout, sans l'éclairage qu'offrent les rapports législatifs et les débats en commission et en séance, elles livrent une norme brute et laissent le juge dans l'ignorance des intentions réelles du législateur. La qualité du droit produit est, en outre, parfois critiquable, comme en témoigne l'oubli par l'ordonnance recodifiant le livre 1er du code d'un des motifs de révision des PLU pourtant l'une des dispositions les plus débattues de la loi Alur...
Notre groupe de travail a enfin dressé la liste de quarante-cinq mesures de nature règlementaire, actuellement instruites par les services des ministères compétents. Un comité de suivi s'est d'ailleurs tenu vendredi dernier au secrétariat d'État chargé de la simplification, auquel participaient nos services.
Notre délégation a donc pris au sérieux sa mission, mais il reste beaucoup à faire : la simplification est un combat de tous les jours. Le Conseil d'État, qui la préconise, a ainsi annulé au cours de l'été une partie de l'arrêté du 8 décembre 2014 simplifiant les règles d'accessibilité des ERP anciens, qui les avait libérés des dispositions concernant les espaces de manoeuvre avec demi-tour, les espaces de manoeuvre de porte et l'espace d'usage devant les équipements, dès lors que l'accès au bâtiment était matériellement impossible à une personne en fauteuil roulant. Cette annulation touchera particulièrement les commerces des centres villes historiques présentant des rues en pente. Nous ne sommes pas toujours aidés par la haute administration !
Nous sommes à un « moment simplification ». J'en veux pour preuve l'accueil fait à nos travaux, le rapport du Conseil d'État ou encore la publication du dernier numéro de la Revue française d'administration publique entièrement consacré à ce sujet. Reste à savoir comment nous nous projetons dans l'avenir. L'urbanisme était signalé par 67 % des élus répondant à notre questionnaire de l'automne 2014, mais d'autres sujets doivent désormais être traités.