Monsieur le président, mesdames et messieurs les Sénateurs, je vous remercie de nous accueillir. Notre conseil d'administration a effectivement émis un avis favorable à ce projet de loi de financement et nous sommes la seule caisse nationale à nous être exprimé en ce sens. Dans un contexte de retour à l'équilibre de la branche famille d'ici à 2017, le projet de loi comporte deux mesures qui la concernent directement.
La première mesure porte sur la création d'une agence de recouvrement des pensions alimentaires, dans la lignée des actions déjà conduites en direction des personnes séparées, comme la revalorisation progressive de l'allocation de soutien familial et la mise en place d'une garantie contre les impayés de pensions alimentaires qui a fait l'objet d'une expérimentation dans une vingtaine de caisses d'allocations familiales avant d'être généralisée au 1er avril dernier. La caisse d'allocations familiales est ainsi devenue l'intermédiaire du recouvrement auprès du débiteur défaillant afin d'assurer un meilleur accompagnement social des séparations. La généralisation de la garantie contre les impayés de pensions alimentaires, dont le montant minimal a été revalorisé à plus d'une centaine d'euros par mois, va être appréciée par les femmes qui éprouvent de réelles difficultés pour recouvrer leurs pensions et pourront désormais compter sur l'intermédiation de l'agence.
Le PLFSS prévoit également une simplification des modalités d'attribution du complément de libre choix du mode de garde (CMG) au bénéfice des particuliers employeurs.
Plus globalement, le retour à l'équilibre des comptes de la branche famille ne peut que nous satisfaire, mais nous restons vigilants face aux tentations de transfert de charges nouvelles que cette situation pourrait inspirer. Je rappelle que nous avons dû reprendre, par exemple, dix milliards d'euros correspondant aux majorations de pensions vieillesse pour les pères et mères de trois enfants, en lieu et place du Fonds solidarité vieillesse (FSV).
Même si nous en assurons toujours le paiement, les prestations logement ont été intégralement reprises à sa charge par l'État et les crédits correspondants figurent désormais dans le projet de loi de finances, sur lequel l'avis de la Cnaf n'est pas requis. Nous avons examiné dans la précipitation le décret sur la dégressivité des allocations logements dont le dispositif, voté l'an passé, entrait en vigueur le 1er juillet dernier. Nous avons été saisis avec une rapidité contestable d'un texte aux conséquences réelles sur la situation de l'ensemble de nos allocataires. S'agissant d'une seconde modification des conditions d'attribution, touchant à la prise en compte du patrimoine des bénéficiaires, nous avions demandé qu'elle nous soit soumise en amont, dès lors qu'elles induisent des conséquences sur nos allocataires.
Daniel Lenoir, directeur général de la Caisse nationale d'allocations familiales. - J'ajouterai un complément juridique sur l'agence de recouvrement des impayés des pensions alimentaires. Si ses compétences sont précisées par la loi, son organisation reste du ressort de la branche famille. En d'autres termes, la création d'une nouvelle personne morale n'est pas prévue et cette nouvelle agence relèvera d'une mesure d'organisation interne à la branche. Nous allons ainsi confier à vingt-deux caisses pivots la gestion et le recouvrement de ces prestations complexes, ces caisses ayant été créées lors de l'instauration de l'allocation de soutien familial recouvrable. Ce réseau rassemble près de trois cent salariés qui ont développé des compétences en matière de recouvrement. J'insiste sur ce point pour dissiper les doutes qui peuvent être parfois exprimés quant à la capacité des caisses à assurer cette mission qui est certes difficile mais à la réussite de laquelle nous avons mobilisé tous les moyens nécessaires. Cette mission de recouvrement sera ainsi déléguée à ces vingt-deux caisses auxquelles s'ajoute une caisse de la mutualité sociale agricole (MSA). L'ensemble de ce réseau sera coiffé par une direction nationale de quelques personnes, puisque l'essentiel du travail sera réalisé par les caisses sur le terrain.
En revanche, le projet de loi de financement renforce le pouvoir des caisses en matière de recouvrement, en permettant aux créanciers de recourir aux services de l'agence pour recouvrer leurs pensions. Par ailleurs le projet de loi ouvre aux caisses la possibilité de conférer une force exécutoire aux accords amiables sur le montant de la pension alimentaire, supprimant ainsi la nécessité de recourir au juge en cas de non-paiement, ce qui constitue une mesure de simplification extrêmement importante. Le projet de loi contient également une troisième disposition qui propose que l'agence se substitue aux créanciers pour assurer le recouvrement forcé auprès des débiteurs en cas de violence. Aujourd'hui, les débiteurs violents sont souvent déclarés hors d'état de faire face à leurs obligation afin d'éviter de les mettre en contact avec les créanciers, l'intermédiation des caisses devrait permettre d'y remédier. Une quatrième disposition concerne la transmission des informations relatives à la situation socio-professionnelle du débiteur pour faciliter la fixation du montant des pensions alimentaires par le juge. Cette disposition ne figure pas dans les dispositions règlementaires qui organisent l'expérimentation de la Gipa car le Conseil d'Etat a estimé qu'elle nécessitait une base légale.
Ces dispositions consacrent le travail effectué depuis ces dernières années par le réseau des CAF pour renforcer leur capacité de recouvrer les pensions alimentaires.
Même si ce point ne figure pas dans le projet de loi, je profite de cette audition pour vous indiquer que nous avons développé des dispositifs d'accompagnement de la parentalité en cas de séparation, afin d'éviter les conflits et de privilégier la médiation pour assurer le partage des frais générés, notamment, par l'éducation des enfants. Des sessions d'aide à la coparentalité, qui préviennent également les conflits à l'issue de la séparation, ont ainsi été organisées et rencontré un réel succès.
Je sais que les parlementaires, et particulièrement les sénateurs, demeurent très vigilants sur les conditions de mise en oeuvre de la loi et j'atteste que ces dernières ont été réunies, de notre côté, pour que cette réforme soit effective.