Sur la question des économies et de la redistribution, je souhaitais attirer l'attention de la représentation sénatoriale sur une étude sur l'évolution des effets redistributifs de la politique familiale que nous avons publiée en 2015. Dans les années 1970-1980, la mesure de ces effets donnait courbe en U, avec une forte redistribution pour les premiers et les derniers déciles de revenus. Notre étude montre que la redistribution s'est un peu accentuée dans les premiers déciles et fortement atténuée, au point d'être quasi-nulle, dans les derniers déciles. Cette note, que je tiens à votre disposition, tient compte de la modulation des allocations familiales et la revalorisation du RSA. Nous allons l'actualiser afin d'y intégrer les dernières réformes.
La branche famille verse 85 milliards d'euros, bien moins que les branches maladie et vieillesse. Les prestations financées par la branche ne représentent que 50 milliards d'euros, le reste correspondant aux versements effectués pour le compte de tiers, principalement l'Etat et les départements. Comme l'a souligné le président Deroussen, une telle démarche nous oblige à une vigilance particulière en matière de financement. Nos comptes ont été certifiés par la Cour des comptes, mais celle-ci émet des réserves portant sur notre gestion du RSA et des allocations logement que nous versons précisément pour le compte des départements et de l'Etat. Elles visent notamment les indus et les rappels ainsi que la question de la fraude qui lui est connexe. Néanmoins, j'attire votre attention sur les progrès considérables, d'ailleurs reconnus par la Cour des comptes, accomplis par la branche dans la lutte contre la fraude. L'année dernière, la fraude détectée a augmenté de 20 % alors que la fraude à proprement parler n'augmente qu'à due proportion des prestations. A cet égard, les techniques de « data mining » permettent de mieux cibler les contrôles à partir de bases de données.
Le nombre des prestations relevant de notre compétence n'a cessé d'augmenter. Il avoisine la vingtaine et représente près de dix-huit mille règles de droit, ce qui témoigne d'une très grande complexité de gestion spécifique à la branche famille. Cette complexité fait peser une forte charge de travail à la fois sur notre système d'information et sur le réseau des caisses, tandis qu'il nous faut intégrer les différentes réformes. Comment cherchons-nous à y faire face ?
Je prendrai l'exemple de la prime d'activité pour laquelle nous avons adopté une démarche « 100 % dématérialisé, 100 % personnalisé » que nous souhaiterions généraliser à l'ensemble des prestations, avec un simulateur pédagogique et une télé-procédure extrêmement conviviale. Cette démarche est intégralement numérique et permet la liquidation automatique de la prestation. Hormis les contrôles, aucune intervention du technicien n'est requise. Comme avec la carte vitale, il est possible de calculer directement les prestations sans avoir à ressaisir les données. Ce point est extrêmement important car nous nous sommes dotés de la capacité de gérer à l'avenir des prestations complexes ou personnalisées, à l'instar de la prime d'activité. Ce modèle a globalement bien fonctionné et a permis d'absorber environ 1 500 000 nouveaux allocataires en quelques mois. Le taux de recours des bénéficiaires potentiels de la prime d'activité devrait, selon la ministre, atteindre les deux-tiers, contre un tiers seulement pour le RSA activité. Avec quelque dix-huit millions de télé-simulations, la dématérialisation est un réel succès. Nous avons reçu 95 % de télé-déclarations et effectué 50 % de liquidations automatiques, ce qui laisse encore de la marge pour progresser.
L'ensemble de ces dispositifs permettra de simplifier la vie des allocataires et de sécuriser les données, lorsque la déclaration sociale nominative (DSN) sera généralisée.
La dématérialisation va de pair avec la personnalisation. Nous avons réorganisé notre dispositif d'accueil, en instaurant notamment les rendez-vous des droits. Un objectif de 100 000 rendez-vous nous avait été fixé. Nous devrions franchir le seuil des 250 000. Nous avons également installé un réseau de 2 000 points d'accueil numérique dans les CAF et auprès de nos différents partenaires. Notre objectif, d'ici à la fin 2017, est d'installer un point d'accueil numérique par bassin de vie. Un tel projet s'inscrit dans une démarche plus large d'inclusion numérique que nous poursuivons avec Emmaüs-Connect, afin de veiller à ce que cette dématérialisation ne constitue pas un frein à l'accès au droit. Source d'efficacité administrative et sociale, ce dispositif représente la seule solution pour absorber des charges supplémentaires.
Nous souhaiterions étendre cette à l'ensemble de nos prestations, à commencer les prestations logement et dans le cadre de la réforme du RSA qui doit intervenir en janvier prochain. Outre la simplification des procédures et le renforcement de l'accès au droit pour les allocataires, cette démarche est source de gains de productivité potentiels et s'inscrit dans la continuité de ce qui a été fait, pour l'assurance-maladie, avec la carte vitale. Elle garantit également la sécurisation des données et le versement des prestations au juste droit, tout en limitant considérablement l'empreinte carbone, dans le contexte de l'après COP 21, du fait de la limitation des déplacements physiques qu'elle induit. L'organisation systématique des rendez-vous permet en effet le traitement des dossiers par internet ou téléphone.