Je vous le redis. Il ne m'appartient pas de régler cette question. Mais, en tant que directeur de la caisse nationale, il m'incombe de recouvrer les sommes qui sont dues par les conseils départementaux auprès des CAF. J'en ai parlé avec le président de l'Assemblée des départements de France (ADF), en juillet dernier, mais je ne peux en dire plus à ce sujet. S'agissant de la lutte contre la fraude, il ne m'appartient pas non plus de décider de la participation des conseils départementaux aux Codaf. Je sais que la question se pose et que c'est le cas dans plusieurs départements. En outre, plusieurs départements nous ont demandé l'accès aux données Cafpro pour pourvoir organiser leurs propres contrôles. Je n'ai pu l'autoriser, puisque la déclaration à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) prévoit le recours à Cafpro par les travailleurs sociaux pour connaître la situation des personnes, mais ne permet pas l'utilisation de ces informations dans le cadre de contrôles. Comme j'en ai informé l'ADF et l'ensemble des conseils départementaux, nous avons mis en place en juillet dernier un portail « consultation du dossier allocataire par les partenaires » (CDAP) qui permet aux départements d'accéder à des informations analogues aux nôtres, pour qu'ils puissent conduire leurs propres contrôles notamment sur le RSA. Cette mesure répondait ainsi à des demandes très anciennes des départements.
Comme l'a souligné le président Deroussen, la lutte contre la fraude et la promotion de l'accès aux droits sont des actions conduites en miroir. Il s'agit des mêmes techniques qui permettent à la fois de payer ceux qui ont des droits et ne les font pas valoir et de repérer ceux qui abusent de droits auxquels ils ne sont pas éligibles. Nous utilisons des techniques de « data mining » qui sont très efficaces et n'obéissent à aucun présupposé en identifiant, sur la masse des informations disponibles et à partir d'un certain nombre de critères, des comportements illégaux. Il nous reste certes encore des progrès à faire, mais nous avons organisé des échanges systématiques d'informations avec les administrations, comme la direction générale des finances publiques ou Pôle Emploi, nous permettant d'organiser des contrôles sur pièces. Un allocataire sur deux a été concerné par ces contrôles. Nos contrôleurs, dont nous avons renforcé les effectifs, conduisent également des contrôles sur place. Cet effort continuera. La prévention demeure la meilleure manière de lutter contre les fraudes. Le jour où nous aurons accès à l'ensemble des revenus, via la déclaration sociale nominative (DSN) ou les échanges directs de pré-renseignements, comme le font les services fiscaux, nous disposerons alors d'un moyen de prévenir non seulement la fraude, mais aussi les indus. En effet, la majorité des indus ne sont pas frauduleux, puisque 60 % relèvent d'erreurs de déclaration. Plus nous disposerons d'un accès direct à l'information, plus nous pourrons agir de manière efficace.
Concernant le numérique, nous souhaitons maintenir le contact, plutôt que le papier ! Sous réserve d'accès au numérique, il est plus facile de remplir une déclaration sur un écran que sur un papier. Nous avons conduit un travail avec Emmaüs-Connect pour caractériser les personnes connaissant des difficultés d'accès au numérique. Nous mettons en oeuvre des dispositifs d'inclusion numérique sans pour autant supprimer les circuits papier. Cependant, sur la prime d'activité, nous avons plus de 5 % de déclarations papier, alors que nous projetions d'en recevoir la totalité sous forme numérique. C'est sans doute un point de désaccord avec la MSA comme avec le Défenseur des droits : maintenir un circuit papier est certes nécessaire, mais vouloir cantonner les personnes à de telles procédures revient à les placer durablement dans des situations d'exclusion, puisque la quasi-totalité des formalités de notre quotidien sera numérique d'ici cinq à dix ans. Notre stratégie vise au contraire à développer l'inclusion numérique en luttant contre l'isolement des personnes. Comme l'a souligné le président Deroussen, notre stratégie a été redéfinie de manière à faire bénéficier les personnes éprouvant de réelles difficultés d'un accueil personnalisé. Tel est ainsi l'objectif des rendez-vous des droits consistant, pendant une heure, à aider les allocataires en proie aux difficultés et à favoriser leur inclusion numérique. Aujourd'hui, certains centres sociaux possèdent des points d'accueil numériques, avec un volontaire du service civique qui peut aider les allocataires en difficulté à obtenir un rendez-vous des droits dans leur CAF respective qui leur prodiguera une aide personnalisée. L'engorgement de nos lignes téléphoniques est largement dû à la mise en place de la prime d'activité et au changement du sous-traitant téléphonique d'une partie des caisses, lequel n'a pas rendu la qualité de services escomptée. C'est d'ailleurs sur ce point que porte l'enquête du Défenseur des droits. En outre, à la différence de la branche maladie, il nous est impossible juridiquement de donner un grand nombre de renseignements par téléphone, en raison des informations nécessaires à la détermination des droits. Il est de ce fait normal que les téléconseillers renvoient les allocataires vers le site « caf.fr » ou leur proposent un rendez-vous.
Le taux de recours à la prime d'activité est nettement plus élevé que prévu. L'impact financier n'est pas encore connu mais sera tempéré par le fait que le montant moyen de la prime s'avère inférieur aux prévisions. Comme vous le savez, la prime d'activité est financée sur le budget de l'État.
S'agissant de la Prepare, nous ne serons en mesure d'apprécier le taux de recours des pères qu'à partir d'avril. Le nombre de pères qui bénéficient de ce dispositif a été multiplié par deux en 2015 pour atteindre désormais un petit millier. C'est probablement le début d'un mouvement, mais cela demande à être confirmé.