Intervention de Christian Eckert

Commission des affaires sociales — Réunion du 12 octobre 2016 à 17h05
Plfss pour 2017 — Audition de M. Christian Eckert secrétaire d'état auprès du ministre de l'économie et des finances chargé du budget

Christian Eckert, secrétaire d'État :

Ce dernier PLFSS fait mesurer à chacun l'ampleur du chemin parcouru depuis notre arrivée au Gouvernement : au départ, un déficit de 21 milliards d'euros pour le régime général, à l'arrivée un quasi équilibre, 400 millions d'euros de déficit en 2017.

Ce PLFSS comporte également des mesures fortes pour l'avenir. L'équilibre financier de la sécurité sociale doit être au service d'une politique responsable pour continuer à faire progresser les droits. Mme Touraine centrera son propos sur ces mesures, concernant tout particulièrement l'assurance maladie, j'évoquerai l'équilibre budgétaire et les recettes.

Au printemps dernier, je vous ai présenté les résultats du régime général pour 2015 d'après les chiffres des différentes caisses, bien meilleurs que prévu - certains d'entre vous s'en étonnaient - avec une amélioration de 2 milliards d'euros, comme en 2014. Et pourtant, nous avions eu les mêmes alertes de la Cour des comptes, « incertitudes », « aléas possibles », « fragilités »... En 2015, comme les deux années précédentes, la Cour a certifié le résultat financier de chaque branche du régime général, alors que chaque année jusqu'en 2012, elle refusait la certification pour au moins une des branches. Désormais, malgré certains désaccords, elle estime donc que les comptes de chaque branche donnent une image fidèle de son résultat réel. Il faut donc arrêter de crier à l'insincérité ! La Cour des comptes est un juge de paix...

Nous avions prévu un déficit de 9,8 milliards d'euros pour le régime général et le FSV en 2017 ; il a été revu récemment à 7,2 milliards d'euros, tout de même 2 milliards d'euros de moins ! Le déficit du régime général a été divisé par deux en un an, pour s'établir à 3,4 milliards d'euros en 2016. En 2017, le déficit du régime général sera réduit à 400 millions d'euros, pour 400 milliards d'euros de masse financière, soit un quasi équilibre : les dépenses sont couvertes à 99,9% par les recettes. Depuis quinze ans, aucun Gouvernement ne s'est approché de si près de l'objectif.

Certes, il faut encore assurer l'équilibre du FSV, dont le déficit est très affecté par la situation du marché de l'emploi - ce qui préoccupe à juste titre votre commission. Le déficit se réduira toutefois en 2016, pour un retour à l'excédent en 2020. En 2016, le déficit du FSV devrait s'élever à 3,6 milliards d'euros. En 2010 et 2011, il s'élevait à 4,1 milliards. Ce qui est inadmissible aujourd'hui était convenable à l'époque ?

Ayons le courage de regarder les chiffres en face. La réduction du déficit - même si elle est insuffisante, trop lente, etc. - a permis, dès 2015, de réduire l'endettement de la sécurité sociale. La Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) a remboursé plus de 13 milliards d'euros de dette en 2015. La réduction de la dette est supérieure au déficit de 10,8 milliards, conservé à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss).

Monsieur Delattre, si vous additionnez la dette de l'Acoss et celle de la Cades, vous constatez une réduction de la dette totale. Le transfert d'une partie de la dette de l'Acoss vers la Cades n'y change rien. Ce désendettement se poursuivra à hauteur de plus de 7 milliards en 2016 et 10 en 2017. Même si l'on tient compte de la dette de l'Acoss, qui se stabilisera en 2018, le désendettement est réel. Il reste 136 milliards d'euros de dette, moins que l'an passé, et nettement moins qu'en 2010, 2011 ou 2012. La dette totale s'est réduite durant la législature. La dette de la Cades devrait être éteinte en 2024, plus tôt que prévu : c'est le fruit des actions du Gouvernement et des efforts de tous les acteurs concernés.

Quelles sont les mesures nécessaires pour atteindre l'équilibre ? Comme les années précédentes, l'amélioration des comptes ne tombe pas du ciel, elle découle de nos décisions, de vos décisions, grâce à des économies supplémentaires et au plan d'économies global, mené depuis 2014. L'Ondam a été respecté ces six dernières années et devrait l'être en 2016 malgré une cible historiquement ambitieuse, 1,8 %. Ce sont 4,1 milliards d'euros d'économies qui sont attendues par rapport à l'évolution tendancielle des dépenses de l'assurance maladie. Nous avons mené des réformes - efficience des dépenses hospitalières, virage ambulatoire, maîtrise des dépenses de produits de santé, amélioration de la pertinence des soins -qui monteront en charge en 2017. Nous ferons face aux coûts de l'innovation thérapeutique -chacun connaît le coût des nouveaux traitements contre l'hépatite C ou des médicaments anticancéreux- en lissant l'arrivée sur le marché des nouveaux traitements.

Nous avons des dépenses nouvelles, oui ; elles sont liées aux nouvelles conventions médicales, à l'augmentation de la consultation de 23 à 25 euros, sur laquelle j'aimerais connaître la position de chacun, aux mesures salariales avec l'augmentation du point d'indice des agents de la fonction publique. Les mêmes qui critiquaient un gel du point d'indice, insupportable pour les agents hospitaliers, protestent que nous laissons ainsi filer le déficit...

Le taux de progression de l'Ondam a été fixé, pour 2017, à 2,1 % -un des taux les plus bas jamais retenu. Nous devrons donc prendre des mesures complémentaires, pour 1,5 milliard d'euros comme annoncé en avril dernier dans le pacte de stabilité. Nous alignerons la fiscalité du tabac à rouler sur celle des cigarettes. Une taxe sur les distributeurs de tabac fournira 130 millions d'euros supplémentaires (les ventes des fabricants aux distributeurs des produits avant l'entrée en France constitue une optimisation à combattre). Nous réduirons les niches sociales. Nous attendons 500 millions d'euros de recettes grâce à la lutte contre la fraude sur les prestations et les cotisations sociales. Nous avons déjà beaucoup progressé en ce domaine.

De nouvelles économies de gestion seront réalisées par les organismes de sécurité sociale -déjà sollicités les années passées- pour un montant fixé à 270 millions d'euros. Certaines dépenses se réduiront à la suite de la montée en charge des réformes -comme sur le capital décès- à hauteur de 350 millions d'euros. Le retour à l'équilibre est également dû au fait que l'État compense systématiquement les allègements de cotisations, comme il s'y est engagé dans le pacte de responsabilité et de solidarité : plus de 13 milliards d'euros en trois ans. Certains regrettent que le déficit budgétaire de l'État ne se réduise pas plus vite, mais l'État reprend certaines dépenses -comme les allocations logement- ou réalloue des recettes. En 2017, l'extinction des recettes des caisses de congés payés -un fusil à un coup- sera intégrée dans la compensation. L'État compensera certaines exonérations de cotisations sociales, jusqu'à présent non compensées.

Nous engageons des mesures importantes concernant les prélèvements sociaux -qui ne sont pas augmentés-. Les prélèvements sociaux doivent être davantage adaptés, ainsi pour les travailleurs indépendants : nous prévoyons de réorganiser les relations entre les Urssaf et le Régime social des indépendants (RSI), en intégrant les propositions qui figurent dans les rapports récents des députés Sylviane Bulteau et Fabrice Verdier et de vos collègues Jean-Noël Cardoux et Jean-Pierre Godefroy. Plusieurs mesures ont été prises et doivent être poursuivies. L'interlocuteur social unique n'a pas fait ses preuves... Nous avons en revanche testé des solutions pragmatiques pour que les équipes des deux organismes travaillent ensemble sur le terrain. Cela commence à porter ses fruits. Et nous identifions plus clairement, dans la loi, la chaîne de responsabilités.

Nous prévoyons une nouvelle exonération de cotisations sociales pour les travailleurs indépendants modestes, qui pourra aller jusqu'à trois points de cotisations d'assurance maladie, soit 250 euros. Nous avons déjà supprimé la cotisation minimum d'assurance maladie. L'assurance vieillesse et les indemnités journalières sont également concernées. Le poids des prélèvements diminue donc pour les deux-tiers des travailleurs indépendants, tandis que leur protection sociale s'améliore.

L'économie se transforme. Il faut l'accompagner et adapter notre système. La clarification des règles applicables aux activités économiques accessoires a commencé en 2015, en loi de finances. Le sujet de l'économie collaborative a beaucoup intéressé les sénateurs l'année dernière. Ils avaient raison, car ces activités montent en puissance et personne n'y pourra rien. Vous aviez abouti à un consensus sur la nécessité de modifier le droit, de clarifier le partage de frais. Nous l'avons fait dans une instruction fiscale en septembre dernier. BlablaCar est un système de partage de frais, non imposable et ne donnant pas lieu à cotisations sociales. On a laissé s'installer des zones grises, voire de non-droit. Si on veut rétablir une concurrence loyale entre l'économie traditionnelle et l'économie dite virtuelle, il faut avancer. Ainsi, la situation est peu claire pour la location de biens entre particuliers. Fixons un seuil cohérent pour l'activité professionnelle réelle. La presse n'est pas très bien renseignée sur le sujet, soit dit en passant.

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