Aujourd'hui, nous n'avons pas de certitudes sur la façon dont il faut s'adapter, mais nous sommes certains qu'il faut évoluer car la menace a elle-même changé : aujourd'hui, nos systèmes sont trop anciens. Tout à l'heure, lors de l'audition sur la compétitivité du transport aérien, le directeur général exécutif du groupe Aéroports de Paris (ADP) soulignait qu'il était impossible de garantir qu'un nouvel attentat ne surviendrait pas et qu'il fallait donc faire preuve d'humilité sur ces sujets. Je partage ce point de vue.
Concernant les recommandations relatives à l'analyse comportementale, je suis parti du constat que les portiques et les fouilles systématiques à l'entrée des aéroports ne sont pas efficaces. Il faut alors chercher une alternative, et je pense que l'analyse comportementale - d'ailleurs mise en oeuvre dans de nombreux pays - offre des possibilités intéressantes. Concernant les contrôles différenciés, j'ai bien indiqué qu'il s'agissait « d'expérimenter » de tels dispositifs, et non de les systématiser. Il faut bien sûr avancer avec prudence, dans le respect des droits et libertés de chacun. Mais il faut reconnaître qu'aujourd'hui, les mesures de sécurité dans nos aéroports s'apparentent parfois à une « ligne Maginot », avec des contrôles qui peuvent être contournés et qui sont menés un peu au hasard. Il y a un tout un travail de réflexion à mener sur la conception même des espaces de l'aéroport.
C'est aussi pour cela que je propose la création d'une Agence de la sûreté du transport aérien. Une telle agence permettrait de réfléchir à l'aéroport du futur et aux mesures de sécurité à mettre en oeuvre.
Les contrôles différenciés ne sont pas des contrôles au faciès : ils se fondent sur le croisement de données objectives, comme le mode d'achat du billet, le fait de disposer d'un billet aller-retour ou non, les informations des fichiers de police...
Je suis d'accord avec le rapporteur général sur la nécessité de développer PARAFE. Le directeur général exécutif d'Aéroports de Paris rappelait précédemment que le groupe a décidé de développer ce système et de passer les marchés correspondants malgré le fait que l'État ne participera plus à son financement. Ce dispositif permet également de recentrer les policiers sur des fonctions plus essentielles.
Concernant la question de Philippe Dallier sur l'utilité d'avoir deux préfets délégués à la sûreté et à la sécurité aéroportuaire en Île-de-France, je tiens d'abord à souligner qu'il est important de sortir la question de la sûreté de la plateforme aéroportuaire d'Orly de la préfecture du Val-de-Marne. Est-ce qu'un même préfet pourrait être responsable de la sûreté des aéroports de Roissy Charles de Gaulle, d'Orly et du Bourget ? Cela me paraît beaucoup. Le préfet délégué à la sûreté de Roissy Charles de Gaulle a eu un temps d'autres missions de police mais il a rapidement conclu qu'il était difficile de les assumer, car on ne peut pas être partout à la fois. D'ailleurs, si une crise se produisait simultanément dans les deux aéroports, où irait le préfet ?
Le Gouvernement propose que le préfet de police assure la sécurité des voies d'accès à l'aéroport Roissy Charles de Gaulle et qu'on enlève cette compétence à la police aux frontières (PAF). Je m'inscris dans cette démarche qui permettra d'alléger le travail de la police aux frontières. Le renseignement serait également placé sous l'autorité du préfet de police.
Le risque d'une trop grande concentration des pouvoirs au sein de la préfecture de police est réel. Mais, à l'heure actuelle, le préfet délégué à la sûreté aéroportuaire n'a pas réellement d'autorité sur les forces de police. Dans la réforme proposée, il serait rattaché à la préfecture de police et aurait donc autorité sur ses services - ce serait un début de rationalisation. Je propose donc de régler la situation d'Orly de la même façon que celle proposée pour Roissy, ce qui n'est pas prévu actuellement. Or, il y a suffisamment de passagers à Orly pour que l'on soit dans une logique similaire et que l'on assure le même niveau de sûreté. Faire coexister deux systèmes différents pour les deux aéroports serait assez incompréhensible.
Le coût des services de l'État consacrés à la sûreté de l'aviation civile s'élève à 93 centimes d'euros par passager mais ils ne sont pas financés par la taxe d'aéroport, qui prend en charge les dépenses de sûreté des aéroports. Concernant les locaux, à ma connaissance, les services de police sont hébergés par Aéroports de Paris dans le cadre de conventions réglementées et doivent payer un loyer.
Thierry Carcenac a évoqué les questions frontalières et les douanes ; cela ne correspond pas au domaine de la sûreté et n'entre pas dans le champ de mon contrôle budgétaire. Je n'ai donc pas étudié les relations avec l'agence Frontex.
Je rejoins Marc Laménie sur la volonté de simplifier l'organisation des interventions. L'enjeu en termes d'image est essentiel pour notre pays. Nous devons donc accepter d'évoluer car si de nouveaux attentats devaient avoir lieu et se porter sur des aéroports, ce serait un drame. Les ambitions de progression du nombre de passagers ont déjà été fortement revues à la baisse à la suite des attentats.
La réunion est levée à 12 h 54.