Je veux aussi mentionner le rejet des mesures visant à répartir le quart des demandeurs de logement social aux revenus les plus faibles dans les quartiers qui ne sont pas politiques de la ville, un moyen de lutter structurellement contre le développement de poches de pauvreté.
Selon nous, on abandonne là le cœur de la loi SRU, qui avait fait l’objet, me semble-t-il, d’un certain consensus et qui, en tout cas, avait été adoptée, alors que presque 2 millions de personnes dans notre pays attendent un logement et que le délai moyen d’attente est proche de six ans ! De plus, une actualité brûlante nous incite de manière urgente à faire reculer les ghettos. Tout cela ne nous paraît vraiment pas raisonnable.
Bien sûr, des aménagements peuvent être demandés par les communes ; des discussions sont possibles, des dérogations, des délais. Oui, tout cela est possible, Mme la ministre l’a confirmé, mais, sans base légale chiffrée, les discussions ne peuvent être construites que sur du sable.
Sixièmement, et enfin, au titre des autres manques fondamentaux de ce projet de loi, je citerai les mesures visant à faciliter l’accès aux droits.
Aucun des amendements que nous avons proposés n’a été accepté, et nous le regrettons. La citoyenneté implique des devoirs, mais aussi des droits. Or une partie de la population de notre pays constate que ses droits, pourtant inscrits dans la loi, ne sont pas assurés. C’est un véritable problème dans la République.
Permettez-moi d’évoquer quelques chiffres. En 2011, quelque 35 % des personnes éligibles au RSA socle n’y avaient pas accès. En 2013, quelque 20 % des personnes éligibles légalement à la CMU-C, la couverture maladie universelle complémentaire, soit presque un million de personnes, n’avaient pas réussi à ouvrir leurs droits !
Nos propositions visant à renforcer l’accompagnement des personnes qui en ont besoin dans leurs démarches administratives, devant la complexité récurrente des dossiers, et à mettre en place des mesures de simplification importantes pour les particuliers, demandées avec force par les professionnels dans les administrations, ont été rejetées. Rien pour aider ceux qui constituent des dossiers pour lutter contre la fracture numérique ; rien sur les refus de guichet ; aucun statut professionnel donné aux médiateurs sociaux. Nous regrettons que toutes ces mesures n’aient pu être adoptées.
Mes chers collègues, cette version sénatoriale du texte n’est vraiment pas bonne. Je crains qu’elle ne préfigure – cela a d’ailleurs été revendiqué ! – certains programmes électoraux des candidats de droite. C’est donc avec tristesse, mais aussi inquiétude que nous voterons contre ce texte, en gardant l’espoir que l'Assemblée nationale restituera son esprit initial.