Je me réjouis de l'examen de cette proposition de loi, adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale en mars dernier. L'action extérieure des collectivités territoriales est une pratique désormais bien établie. Depuis 25 ans, le législateur accompagne empiriquement la volonté des élus locaux de valoriser leurs atouts à l'étranger, d'être les acteurs de leur développement et de construire des partenariats.
Il s'agit à présent de surmonter les obstacles existants, tout en respectant le principe constitutionnel selon lequel la conduite des relations extérieures est un pouvoir régalien de l'État. L'article 1er prévoit trois cas dans lesquels il pourra être dérogé à l'interdiction qui pèse sur les collectivités de conclure une convention avec un État étranger. Toutefois, l'objet principal de ce texte est de donner leur pleine efficacité aux facultés particulières accordées aux collectivités territoriales régies par l'article 73 de la Constitution. La loi leur permet en effet de représenter la France auprès d'organismes régionaux, d'y adhérer parfois en leur nom propre, de participer à la négociation de traités internationaux, d'affecter des agents pour les représenter au sein des missions diplomatiques. Mais la pratique a montré l'excessive complexité des procédures d'autorisation ou de décision, le caractère trop restrictif de la notion de voisinage, qui ne comprend pas les États des continents voisins, et l'insuffisante reconnaissance du statut des agents territoriaux envoyés dans nos ambassades et consulats.
Cette proposition de loi lève donc ces freins. Par leur ancrage géographique particulier, les territoires d'outre-mer ont constitué et demeurent l'avant-garde de l'action extérieure des collectivités territoriales. À des dizaines de milliers de kilomètres de l'hexagone, ils partagent avec leurs voisins une part d'histoire, des cultures, des richesses et des fragilités communes. Les échanges, inévitables et souhaitables, restent trop modestes, qu'il s'agisse de santé, d'éducation, de culture, de transport, de produits agricoles ou manufacturés. Il convient d'organiser et de réguler leur développement au mieux. Il existe aussi un réel esprit de solidarité, par exemple lors des catastrophes naturelles : les Guadeloupéens ont beaucoup aidé les Dominicains après le passage de la tempête Xynthia, les Haïtiens après le tremblement de terre de 2010, et se mobilisent en ce moment même pour aider les victimes de l'ouragan Matthew. Nos collectivités territoriales sont les mieux placées pour impulser le développement régional adapté aux réalités et aux aspirations des populations.
Il faut dire que les enjeux sont importants. Les territoires d'outre-mer font face à de multiples défis : développer les échanges économiques malgré une forte distorsion de concurrence, préserver un écosystème riche mais fragile, réguler une immigration massive, surtout à Mayotte et en Guyane... Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste et républicain soutient cette proposition de loi, dont il a souhaité l'inscription à l'ordre du jour.
J'ai déposé trois amendements : le premier rend à la Guadeloupe la possibilité, supprimée par la commission des lois de l'Assemblée nationale, de négocier avec les territoires voisins de la Guyane, comme cela est possible pour la Martinique. Le deuxième est de coordination. Le troisième autorise des représentants des conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER) à participer aux conférences de coopération régionale réunissant une fois par an représentants de l'État et des collectivités.