Intervention de Pierre-Yves Collombat

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 12 octobre 2016 à 9h00
Évolution de l'activité des services départementaux d'incendie et de secours sdis en matière de secours à personne — Examen du rapport d'information

Photo de Pierre-Yves CollombatPierre-Yves Collombat, co-rapporteur :

Notre mission avait initialement pour objet d'examiner l'avenir des SDIS dans l'hypothèse d'une suppression des départements alors envisagée. Les départements n'ayant pas disparu, nous l'avons recentrée sur la place des SDIS dans le secours à personne, mission à laquelle collaborent de nombreux acteurs et dont le financement n'est pas parfaitement assuré. L'assurance de recevoir les soins que leur état requiert en cas d'accident est l'une des principales préoccupations de nos concitoyens. C'est particulièrement vrai dans les zones rurales, désertées par des praticiens libéraux déchargés depuis 2001 de toute obligation en matière de gardes, et dans lesquelles hôpitaux et maternités de proximité ferment les uns après les autres au profit de grands hôpitaux plus performants certes, mais à condition d'y arriver à temps...

Le défi est donc simple : assurer une présence médicale minimale permettant le traitement sur place des cas simples, et disposer d'un service de transports médicalisés permettant l'évacuation rapide des cas les plus sérieux vers les plateaux techniques où ils seront pris en charge.

Jusqu'à présent, malgré les problèmes et les dysfonctionnements sur lesquels Catherine Troendlé reviendra et qui justifieraient à eux seuls une réforme en profondeur du secours à personne, le système remplit sa mission. La question est de savoir pendant combien de temps encore il pourra résister à une double évolution : d'une part, les sollicitations de plus en plus nombreuses des SDIS, du fait de la concentration de l'offre de soins dans les secteurs les plus urbanisés, du transfert sur ces services de missions jusqu'alors assumées par d'autres et de leur moindre coût pour les bénéficiaires ; d'autre part, l'impossibilité pour les financeurs des SDIS - les départements et le bloc communal - de continuer à assumer l'essentiel du coût de cette inflation de la demande. Nous nous sommes en conséquence attachés à comprendre comment nous étions arrivés à cette situation, et à formuler des réponses pour y faire face.

En matière de secours à personne, sur le « papier réglementaire » en tout cas, tout est clair : les SDIS, financés par les collectivités locales mais sous tutelle du ministère de l'intérieur, sont sollicités lorsque la dimension médicale de l'intervention est faible ; les services d'aide médicale urgente (SAMU), relevant du ministère de la santé, appuyés par les services mobiles d'urgence et de réanimination (SMUR) et les ambulanciers privés, interviennent lorsque la dimension médicale domine. Les SDIS n'interviennent donc hors de leurs attributions qu'en cas de carence des moyens des SAMU, à leur demande ou avec leur accord.

Preuve que cette répartition n'était pas aussi pertinente qu'il y paraissait : les conflits de territoires n'ont pas manqué, empoisonnant les relations entre services en cas de crise d'égotisme des responsables locaux, que l'on s'est contenté de régler par l'adoption de chartes de bonnes conduites ou référentiels communs. En même temps, et paradoxalement, les missions relevant des SAMU exécutées par les SDIS prenaient de plus en plus d'importance. De supplétifs, les SDIS sont devenus indispensables dans le domaine du secours à personne, tout particulièrement dans les territoires ruraux.

Ainsi, s'est construit progressivement et pragmatiquement un système de secours à personne qui, pour répondre aux besoins, s'est affranchi du plan initial de ses architectes. Les raisons en sont multiples : certaines sont bonnes, d'autres mauvaises. Parmi les bonnes figurent l'image très positive des pompiers dans la population, leur proximité et leur présence sur l'ensemble du territoire, même là où le service public de santé s'est fait particulièrement discret, les SDIS réalisant le travail délaissé par d'autres car n'ayant pas les moyens de faire autrement... Parmi les mauvaises raisons, citons, d'une part, l'aisance budgétaire des SDIS, aux frais des collectivités locales, situation appréciée par un ministère de la santé vertueux et, en réalité, pas fâché de voir sa charge réduite d'autant ; d'autre part, la nécessité de justifier, par un supplément de charges de travail, la montée en puissance des moyens et des effectifs des SDIS.

Les évolutions du mode d'occupation et d'équipement sanitaire du territoire et le bon usage des deniers publics ne permettent plus de maintenir le statu quo, sous peine de décevoir les attentes - légitimes - de nos concitoyens. Une réorganisation de notre dispositif de secours à personne est indispensable. Elle passe par quatre principes : coordination et généralisation des plateformes communes, sectorisation des intervenants de premier rang en fonction des moyens disponibles et des territoires, mutualisation de l'usage des hélicoptères, mutualisation et mise en cohérence des moyens. Mais nous ne nous berçons pas d'illusions : nos conclusions ont peu de chances de trouver un écho favorable chez des responsables qui estiment que tout fonctionne très bien... Cela n'empêche toutefois pas de faire des propositions !

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