La question à laquelle je cherchais à répondre est la suivante : au terme d'un vaste chantier de rénovation du site, l'INSEP a-t-il et se donne-t-il les moyens de ses ambitions en matière de performance sportive ? À cet égard, je ne suis pas d'accord avec Francis Delattre, car si l'on souhaite des sportifs de très haut niveau « médaillables », ils ne peuvent pas rester dans les clubs. Ce constat est assez largement partagé. Si nous souhaitons atteindre la haute performance, il faut miser sur cet institut.
Tout d'abord, je constate que le financement de 1'INSEP est éclaté. Le soutien de l'État se compose de deux dotations : une subvention de fonctionnement et une prise en charge directe des dépenses d'investissement.
S'agissant du fonctionnement, la part de crédits publics est de plus en plus réduite, ici comme ailleurs. Elle a été compensée par une augmentation des frais de pension demandés aux sportifs, ce qui a posé des problèmes à beaucoup d'entre eux. En effet, même si leurs revenus mensuels varient en fonction de leur discipline, ils sont souvent peu élevés en regard des efforts fournis. Certains sportifs n'ont pas les moyens de payer ces frais de pension sans l'aide, variable, de leur fédération. Je pense donc que ces frais de pension ont atteint une forme de plafond, qu'il ne serait pas raisonnable de dépasser.
Je fais donc deux recommandations : il convient que la part de crédits publics soit désormais pérennisée au montant actuel et il faudrait que ce financement soit complété par de nouvelles ressources propres à imaginer, qu'elles soient publiques ou privées. Au-delà du mécénat, où l'INSEP est en concurrence avec les fédérations partenaires, il pourrait être envisagé le paiement d'une « soulte », en cas de transfert d'un athlète formé par l'INSEP vers une ligue professionnelle. C'est ce qui se fait dans certaines disciplines, notamment en football, et peut-être pourrait-on étendre ce système. Du coup, les clubs pourraient récupérer l'argent investi pour la formation du sportif concerné.
S'agissant des investissements, l'État prend en charge directement le paiement des charges. La rénovation a permis à l'INSEP de disposer d'équipements de grande qualité, dans toutes les disciplines. J'ai pu le voir sur place : il s'agit d'un atout majeur pour le sport de haut niveau français et pour la candidature de Paris 2024.
Cette rénovation ne va pas sans poser un certain nombre de questions financières. En particulier, le partenariat public-privé de la zone Nord du site se caractérise par d'importants surcoûts, en raison des avenants qui sont régulièrement conclus. La formule de la maîtrise d'ouvrage publique, retenue pour la partie Sud du site, permet une plus grande prévisibilité des dépenses.
Au total, le coût de la rénovation sur l'ensemble de la période est estimé à 219 millions d'euros, dont 165 millions d'euros qui ont déjà été réglés. Or, le montant prévisionnel était de 115 millions d'euros, soit presque moitié moins.
L'enjeu, désormais, est de maintenir cet outil, de le préserver dans cet état d'excellence qui conditionne la performance de notre sport de haut niveau. Pour cela, il convient de permettre à l'INSEP, en maintenant la subvention, de mettre en oeuvre son plan pluriannuel d'investissement pour réaliser des travaux réguliers de remise en état des installations.
Au-delà des aspects financiers, le principal défi de l'INSEP est de se donner les moyens de son ambition en termes de visibilité et d'organisation. C'est la seule possibilité d'obtenir des recettes supplémentaires.
Le directeur général de l'INSEP, Jean-Pierre de Vincenzi, souhaite s'orienter davantage vers la haute performance, plutôt que vers le haut niveau. Il s'agit d'un choix politique assez clair qu'il assume. Pour être plus précis, jusqu'à maintenant, l'INSEP accueillait sans distinction les athlètes de haut niveau inscrits sur les listes du ministère des sports. Or, on s'apercevait que les médailles dans les grands championnats n'étaient pas au rendez-vous. Dorénavant, et dans la perspective de Paris 2024, l'INSEP devra choisir entre une sélection plus importante pour ne recruter que les « médaillables » et l'accueil des tous les sportifs de haut niveau. Cela n'est pas tout à fait la même chose.
En ce qui me concerne, je suis d'accord avec cette approche sélective, sauf à ce qu'elle conduise à une approche britannique de surconcentration des moyens sur les seules disciplines pourvoyeuses de médailles. Ainsi, le Royaume-Uni n'envoie dans les grandes compétitions internationales que les seuls athlètes qui peuvent être médaillés, ce qui est différent de l'approche française, que nous devons conserver, avec un peu plus de sélection.
Pour cela, l'INSEP doit s'appuyer sur le réseau « Grand INSEP » en cours de constitution. La réorganisation des CREPS au niveau régional, prévue par la loi, doit être l'occasion d'une meilleure association et d'une mutualisation avec l'INSEP, pour permettre cette labellisation, et, surtout, la mise en place de meilleures filières décentralisées au niveau régional.
L'INSEP devra également s'appuyer sur l'attractivité de sa marque, qu'elle pourrait renforcer et enrichir en devenant un centre de préparation olympique, selon le label qui a été récemment créé par le Comité international olympique.
L'INSEP est à la croisée des chemins, au moment où l'État doit réduire ses dépenses. Pour maintenir son ambition et préserver son site exceptionnel, l'INSEP a besoin de ressources stables et d'une dynamique collective avec les fédérations et les CREPS. Si la candidature de Paris est retenue pour les JO de 2024, les crédits et la dynamique suivront assez naturellement. En revanche, si tel n'est pas le cas, la subvention de l'État risque de continuer à décroître. C'est pourquoi il faut dès aujourd'hui expérimenter de nouvelles ressources et tisser des liens régionaux, pour que l'INSEP continue malgré tout d'avoir les moyens de son ambition en matière de haute performance sportive.