Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est avec honneur que j’ai accepté la responsabilité de présider pendant près de six mois la mission d’information sur l’organisation, la place et le financement de l’islam en France.
Je profite de ce débat pour remercier l’ensemble des membres de la mission, dont le travail a permis d’aboutir à un rapport sérieux, étayé, ayant rencontré un réel intérêt auprès de différentes parties prenantes et des médias.
S’agissant de la méthode, j’ai souhaité que toutes les questions relatives aux modalités d’organisation de nos travaux soient soumises au bureau de la mission, de façon à décider ensemble du calendrier, des personnalités à auditionner ou encore des déplacements à effectuer. Collégialité, vigilance, rigueur et transparence, tels ont été mes maîtres mots durant cette présidence.
Nos travaux ont été particulièrement denses. En six mois, nous avons procédé à près de 80 heures d’auditions, entendu 115 experts aux profils très divers.
Bien qu’ayant auditionné des responsables du ministère de l’intérieur, nous avons regretté de ne pas avoir pu vous entendre en personne, monsieur le ministre. Nul besoin cependant de rappeler combien l’actualité a été chargée au cours du second trimestre de 2016 et jusqu’à l’été. Les urgences et contraintes d’agendas n’ont pas rendu cela possible. C’est donc avec le plus grand intérêt que nous vous écouterons aujourd’hui.
Pour une parfaite information de tous, je tiens à souligner que vous nous avez invités, les rapporteurs et moi-même, à participer le 29 août dernier à la consultation autour de l’islam de France, journée fort enrichissante que l’on peut qualifier d’historique.
Durant ces six mois, la mission a effectué plusieurs visites en France. Nous nous sommes également déplacés à l’étranger, à Londres, à Rabat ou encore à Alger, pour voir comment étaient gérées, dans ces pays, les questions liées à l’islam et à l’organisation du culte musulman.
Au-delà des chiffres relatifs à nos auditions et à nos déplacements, il faut surtout souligner le cadre strict et intangible dans lequel nous avons souhaité inscrire nos travaux : celui de la loi de 1905, texte fondateur de la laïcité dans notre pays.
Cette loi, il est vrai, a été conçue à un moment où la pratique de l’islam en France ne concernait qu’une infime partie de la population, de sorte que la question régulièrement posée est de savoir si les principes établis voilà un peu plus d’un siècle restent adaptés maintenant que l’islam est devenu la deuxième religion de France. À cette question, nous avons clairement répondu oui.
Aucune des personnalités entendues n’a recommandé de modifier la loi de 1905. Le président du Conseil français du culte musulman, le CFCM, M. Kbibech, a déclaré, lors de son audition en février dernier, que la loi de 1905 faisait « partie de l’ADN des musulmans de France ».
Soulignons que l’immense majorité de nos compatriotes musulmans pratiquent, à des degrés divers, leur religion sans nullement troubler l’ordre public et en manifestant leur attachement aux valeurs de la République. Il me semblait important de le rappeler, aujourd’hui, dans cet hémicycle. La laïcité n’est pas dirigée contre les musulmans : elle est là pour les protéger !
Durant cette mission, bien des sujets sensibles, faisant régulièrement l’objet d’inexactitudes, voire de manipulations, ont été abordés. Notre ambition était de mieux faire connaître la religion musulmane et de dresser un état des lieux sérieux, sans raisonner à partir d’idées reçues. Dans un climat national et international pourtant tendu, nous avons souhaité, sans nous limiter, traiter des vrais sujets, comme la formation des imams, la question du financement ou celle de l’enseignement privé musulman.
Oui, cette mission était utile, nos concitoyens ayant une connaissance encore trop sommaire de l’islam. Elle a également eu le mérite de suggérer des pistes de transition vers un islam de France, adapté au contexte français, à la fois compatible avec les valeurs de la République et pris en charge par les communautés musulmanes elles-mêmes.
Point de propositions fantaisistes, contraires à notre ordre constitutionnel et aux principes de la République, dans notre rapport. Mais plutôt l’ambition de réaliser un travail utile, dans un esprit d’ouverture et de réalisme, sans remettre en cause le principe de laïcité.
L’islam a toute sa place dans la République. Il était important pour nous de le souligner, sans pour autant faire de propositions visant à organiser l’islam de France.
Informer, faire des suggestions et, quand l’État est capable d’intervenir, formuler la position de la mission : voilà à quoi nous nous sommes attachés pendant ces six mois, avec l’idée de participer à la construction d’un islam de France dans le respect des valeurs de la République.
Notre rapport a été adopté le 5 juillet dernier, à l’unanimité. Au regard des propositions qui ont été formulées ces trois derniers mois par les représentants du culte musulman, par vous-même, monsieur le ministre, ainsi que par Mme la ministre de l’éducation nationale, le moins que l’on puisse dire est que les choses avancent vite et dans le bon sens. Je ne manquerai d’ailleurs pas d’y revenir dans ma seconde intervention.