Intervention de Bernard Cazeneuve

Réunion du 19 octobre 2016 à 14h00
Organisation place et financement de l'islam en france — Débat sur les conclusions d'une mission d'information

Bernard Cazeneuve, ministre :

Les analyses et les propositions qui en découlent m’ont ainsi conduit à affiner mon travail et à constater, une fois de plus, la qualité du travail sénatorial sur les sujets les plus compliqués.

Que préconisions-nous ? Premièrement, la mise en place d’une fondation pour l’islam de France qui, contrairement à celle qui l’a précédée, ne traitera pas de questions cultuelles. Il nous paraît en effet constitutionnellement délicat, eu égard aux principes de la loi de 1905, d’attribuer à cette fondation des fonds publics si elle traite de questions cultuelles. En outre, la fondation initiale, qui procédait d’une juste aspiration, avait été un échec que nous ne voulions pas reproduire. Enfin, il nous semblait intéressant que cette fondation traitant de questions culturelles et sociales fût en mesure de créer un pont entre les musulmans de France et la République sans se cantonner aux seules questions cultuelles.

Cela a donné lieu à un débat, mais j’assume cette position, qui me conduit à apprécier la nomination, à la tête de cette fondation, d’un grand républicain. Il travaillera avec des musulmans issus de plusieurs courants et de plusieurs secteurs de la société afin que cette fondation incarne bien notre volonté de créer un lien indestructible entre les musulmans de France et la République.

Le fait qu’il s’y trouve des républicains non musulmans et des musulmans résolument républicains est le signe que, en France, l’appartenance à la République prévaut et que c’est elle qui permet toutes les autres appartenances. Cette nomination avait donc un sens politique et l’interprétation selon laquelle cette décision perpétue, avec les musulmans de France, une relation tirée d’une période de notre histoire n’ayant plus cours ne correspond pas du tout à notre intention, qui était même inverse.

Cette fondation pourra donc s’intéresser à des sujets aussi divers que les œuvres sociales, la découverte des œuvres de l’islam, ses aspects culturels et pourra aussi contribuer au financement de la formation profane des imams. En effet, tout ministre du culte formé reçoit une formation profane, laquelle peut être financée par des acteurs comme cette fondation – c’est le financement de la formation théologique qui est impossible.

Cette fondation doit être créée avant la fin de cette année. Sa constitution se passe bien ; Jean-Pierre Chevènement rassemble actuellement autour de lui l’ensemble des acteurs concernés dans un souci de dialogue et d’écoute ; toutes les étapes juridiques du processus sont respectées pour que notre but soit atteint.

La deuxième préconisation est la création d’une association cultuelle pour régler la question, qui nous préoccupe et que vous avez tous évoquée à juste titre, mesdames, messieurs les sénateurs : la transparence du financement des mosquées et de la formation des imams. Cette association cultuelle aura vocation à n’être dirigée que par des représentants du culte. L’État n’a pas à y participer, car cette affaire ne concerne que les représentants du culte musulman, définissant entre eux les modalités du financement des mosquées et de la formation des imams.

À ce sujet, plusieurs questions ont été posées.

Tout d’abord, la redevance ou la taxe sur le halal. Il n’est pas possible, comme l’un d’entre vous le suggérait, de financer par une telle taxe les mosquées ou la formation des imams, pour une raison constitutionnelle incontournable. En revanche, Mme Benbassa y insistait à juste titre, il est tout à fait possible de définir avec les acteurs de cette filière une modalité de leur contribution à l’association cultuelle de sorte à assurer les ressources de cette association et le financement par ses soins de la construction de mosquées ou de la formation des imams.

Quid, ensuite, des financements étrangers ? Tant la fondation que l’association ne recevront que des fonds français, mais, je le rappelle, l’interdiction complète du financement étranger pour le culte musulman n’est pas possible au regard des principes de notre droit puisque d’autres religions reçoivent des fonds étrangers.

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