Intervention de François Grosdidier

Réunion du 25 octobre 2016 à 14h30
Maintien des communes associées en cas de création d'une commune nouvelle — Adoption définitive en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de François GrosdidierFrançois Grosdidier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la vice-présidente de la commission des lois, mes chers collègues, nous examinons, en deuxième lecture, la proposition de loi de notre excellent collègue Bruno Sido tendant à permettre le maintien des communes associées sous forme de communes déléguées, en cas de création d’une commune nouvelle par fusion de plusieurs communes préexistantes.

Lorsque des communes fusionnent pour former une commune nouvelle, elles peuvent garder un caractère spécifique, celui de commune déléguée. Si la commune nouvelle ainsi créée compte moins de 20 000 habitants, elles ne peuvent plus compter de sections électorales distinctes, mais elles peuvent conserver un maire délégué, une mairie annexe et une section propre du centre communal d’action sociale, le CCAS.

Ce mode d’organisation peut être particulièrement pertinent sur des territoires diffus, notamment ruraux et a fortiori de montagne. C’est un système que connaissent depuis longtemps les communes qui ont choisi la formule de la fusion-association de la loi du 16 juillet 1971 sur les fusions et regroupements de communes, dite « loi Marcellin ».

La loi sur les communes nouvelles créait une situation paradoxale pour ces communes. Une commune issue de la mise en œuvre de la loi Marcellin adhérant à une commune nouvelle voyait disparaître ses communes associées : c’est la commune fusionnée « Marcellin » tout entière qui pouvait former une commune déléguée dans la commune nouvelle, mais non chacune de ses communes associées.

La proposition de Bruno Sido ouvre aux communes « Marcellin » qui entrent dans une commune nouvelle la possibilité de le faire non seulement comme une seule commune ne formant plus qu’une commune déléguée au sein de la commune nouvelle, mais aussi comme autant de communes qu’en représentent la commune centre et les communes associées résultant de la fusion-association sur le mode de la loi Marcellin.

Cette idée a suscité notre adhésion, celle du Gouvernement et celle de l’Assemblée nationale. Nous l’avons complétée en première lecture pour traiter des difficultés apparues dans le fonctionnement des communes nouvelles ou pour régler les conséquences des dispositions transitoires tendant à faciliter la fusion des communes et le passage des entités préexistantes à la nouvelle commune.

En conséquence, le texte adopté par le Sénat en première lecture prévoyait les modalités d’extension d’une commune nouvelle à une ou plusieurs communes, permettant de préserver les communes déléguées en cas d’élargissement analogue à une ou plusieurs communes « Marcellin » ; l’élargissement, en cas d’extension de la commune nouvelle, aux maires des communes associées ou déléguées du maintien de droit de cette qualité jusqu’au premier renouvellement du conseil municipal ; une dérogation provisoire, jusqu’au premier renouvellement du conseil municipal, à la règle de la parité pour l’élection des adjoints au maire dès lors que chacune des communes ayant fusionné avait une population inférieure à 1 000 habitants ; des règles spécifiques de détermination de l’ordre du tableau de la municipalité pour la période s’étendant de la création d’une commune nouvelle au premier renouvellement du conseil ; la faculté, pour le conseil de la commune nouvelle, de fixer en deçà du barème le montant de l’indemnité de fonction des maires des communes déléguées de moins de 1 000 habitants qui en font la demande ; les modalités de remplacement d’un siège de conseiller communautaire devenu vacant jusqu’au premier renouvellement du conseil de la commune nouvelle créée en lieu et place de plusieurs communes membres d’un même EPCI ; les règles de détermination du nombre de délégués sénatoriaux durant les deux phases de la période transitoire de composition du conseil d’une commune nouvelle, comblant ainsi un vide juridique qui aurait rendu difficile, voire impossible, l’élection des délégués sénatoriaux dans certaines communes.

Sur l’initiative du rapporteur de l’Assemblée nationale, Mme Christine Pires Beaune, les députés ont poursuivi, dans le même esprit, le travail entrepris par le Sénat. Neuf articles ont ainsi été ajoutés au texte adopté par les sénateurs, dont les dispositions visent avant tout à faciliter la mise en place de la commune nouvelle.

Ces dispositions tendent à préciser les modalités de répartition des sièges de conseiller municipal entre les anciennes communes dans le cas où, en l’absence de délibérations concordantes des communes fusionnant, le conseil municipal est composé, jusqu’à son premier renouvellement, des maires, des adjoints, ainsi que de conseillers municipaux des anciennes communes proportionnellement à leurs populations respectives ; à permettre aux communes souhaitant fusionner au sein d’une commune nouvelle et membres d’EPCI distincts de délibérer sur celui des EPCI auquel elles souhaitent rattacher la commune nouvelle ; à mentionner expressément que sont membres du conseil de la commune nouvelle les conseillers municipaux qui étaient en exercice dans les communes ayant fusionné ; à garantir jusqu’au prochain renouvellement du conseil de la commune nouvelle, en cas de fusion d’EPCI ou d’extension du périmètre d’un EPCI à fiscalité propre à une commune nouvelle, la représentation au sein du conseil communautaire de chacune des communes ayant fusionné ; à introduire des règles transitoires de composition du comité syndical, en cas de création d’une commune nouvelle en lieu et place de plusieurs communes membres d’un même syndicat de communes, pour lui permettre de conserver un nombre de sièges égal à la somme de ceux précédemment détenus par chacune des anciennes communes ; à adapter aux caractéristiques des communes nouvelles l’application des dispositions régissant les mairies d’arrondissement de Paris, de Lyon et de Marseille qui leur sont applicables ; à maintenir pour les communes nouvelles, jusqu’au prochain renouvellement général des conseils municipaux, le bénéfice du régime des aides accordées aux communes rurales au titre du Fonds d’amortissement des charges d’électrification ; à préciser les modalités d’harmonisation de la redevance d’enlèvement des ordures ménagères pour la création d’une commune nouvelle, sur le modèle du régime de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères ; enfin, à prévoir un mécanisme d’harmonisation, en cas de création d’une commune nouvelle, de la participation pour le financement de l’assainissement collectif. Par ailleurs, les députés ont généralisé le principe retenu par les sénateurs concernant les indemnités des maires.

Ces compléments ou précisions apportées par l’Assemblée nationale nous ont paru pertinents, même si la rédaction de deux, voire trois, de ces dispositions est perfectible ; pour être clair, elles devront même être récrites.

Toutefois, procéder à cette réécriture en deuxième lecture présenterait un inconvénient majeur, celui de ne pas permettre l’adoption de ce texte avant la fin de la législature et de rendre difficile, sinon impossible, la désignation des délégués sénatoriaux dans les communes associées concernées avant le prochain renouvellement de la Haute Assemblée. Les inconvénients de la non-adoption du texte sont ainsi largement supérieurs à ceux de l’adoption d’un texte imparfait, qui peut en outre être corrigé par le biais d’autres véhicules législatifs.

Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement que présentera le Gouvernement. Elle suggère au ministre de le retirer, pour le redéposer à l’occasion de l’examen d’un autre texte législatif. Il pourrait s’agir, par exemple, de la proposition de loi de Mme Gourault tendant à faciliter la recomposition de la carte intercommunale.

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