Intervention de Élisabeth Lamure

Réunion du 25 octobre 2016 à 14h30
Stabilisation du droit de l'urbanisme — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Élisabeth LamureÉlisabeth Lamure, rapporteur de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je veux tout d’abord saluer la qualité et l’ambition du travail réalisé par les deux auteurs de la proposition de loi que le Sénat examine aujourd’hui.

Je confirme que ce texte est le fruit d’une réflexion de fond menée pendant plusieurs mois au sein de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, dans un groupe de travail présidé par notre collègue Rémy Pointereau. Cette démarche originale a été suivie personnellement par le président du Sénat. On s’est également efforcé d’y associer l’ensemble des commissions permanentes concernées et de construire un consensus entre les différentes composantes politiques de notre assemblée autour de quelques propositions de simplification, pragmatiques et de bon sens, dans le domaine de l’urbanisme et du droit des sols, où le besoin de simplification est le plus fort pour les collectivités et les élus de terrain.

Cette proposition de loi est également l’expression d’une initiative institutionnelle plus large, dont l’ambition est d’affirmer la position du Sénat sur la thématique de la simplification du droit, si essentielle pour notre pays, en particulier pour les collectivités territoriales, mais aussi les entreprises et nos concitoyens.

Si ce texte est limité par sa taille – il comporte une quinzaine d’articles – et sa matière, essentiellement urbanistique, il est ambitieux au regard de sa démarche inclusive et rigoureuse. Son élaboration s’est en effet appuyée sur la mise en place d’une grande consultation nationale visant à faire remonter du terrain des propositions de simplification, qui a suscité près de 11 000 réponses.

Fait plutôt rare s’agissant d’une initiative parlementaire, l’ensemble de ses dispositions ont été soumises à une étude d’impact, afin de faire le tri entre les vraies simplifications et les fausses bonnes idées, si bien que les mesures qui vous sont soumises aujourd’hui visent juste, en traitant notamment du contentieux de l’urbanisme, du dialogue entre l’État et les collectivités ou encore de l’articulation des documents d’urbanisme.

Les quelques auditions que j’ai menées montrent en tout cas que la démarche de nos collègues François Calvet et Marc Daunis a été très appréciée et que les simplifications qu’ils proposent sont attendues par les acteurs. Ce n’est certes pas une révolution, mais c’est une avancée significative dans la bonne direction.

J’évoquerai rapidement les principales dispositions du texte.

Le premier volet porte sur le contentieux de l’urbanisme et s’inscrit dans le prolongement direct de « l’ordonnance Labetoulle » de juillet 2013. Je me félicite que d’autres textes en cours d’examen ou de rédaction en aient déjà repris, à la lettre près, certaines dispositions, comme la cristallisation des moyens sur l’initiative du juge, le mécanisme de caducité de l’instance ou la redéfinition du recours abusif. C’est la preuve de la pertinence et du caractère consensuel de ces propositions structurantes. Il est évident que, si ces dispositions devaient être adoptées définitivement par le biais d’un autre texte, elles devraient être supprimées de la présente proposition de loi. Toutefois, la commission a souhaité les y maintenir pour l’instant.

Les articles 3 et 4 du texte ont trait à la question, très sensible pour les collectivités, de l’articulation des documents d’urbanisme. J’insisterai particulièrement sur l’article 3, qui a pour objet de simplifier ces procédures en évitant les mises en compatibilité que l’on pourrait qualifier de « perlées ». La solution proposée a reçu un excellent accueil de l’ensemble des associations représentant les collectivités. D’ailleurs, la commission en a étendu le bénéfice des PLU aux schémas de cohérence territoriale.

Les articles 5 et 6 concernent l’aménagement.

L’article 6, en particulier, est relatif aux ZAC. Il vise à donner aux collectivités la faculté de fusionner la délibération de création de la ZAC et la délibération de réalisation, ce qui peut s’avérer utile pour des projets d’aménagement de faible dimension, dont les éléments sont connus de manière précoce. Il ouvre également la possibilité de reporter l’étude d’impact au moment de l’établissement du dossier de réalisation de la ZAC. Nous aurons l’occasion d’y revenir lors de l’examen des amendements.

Au travers de l’article 7, il s’agit de remédier à la dégradation des relations entre les services de l’État et les collectivités. La commission a salué les dispositions de cet article pour plusieurs raisons.

D’abord, elles répondent pleinement aux attentes des élus locaux et à leur souhait de voir les services déconcentrés de l’État se repositionner sur une fonction d’accompagnement des projets. La consultation nationale a en effet montré que le besoin de dialogue avec l’État est l’une des demandes principales des collectivités.

Ensuite, elles tendent à accompagner et à conforter les efforts de réorganisation déjà entrepris par les services déconcentrés, notamment avec la mise en place du certificat de projet, puis du permis environnemental.

Elles visent également à soutenir le développement dans notre pays d’un urbanisme de projet.

Par ailleurs, elles ont pour objet de créer une instance de dialogue, sans introduire de nouveaux délais procéduraux ni donner prise aux contentieux, puisque la nouvelle conférence de conciliation n’aura pas de compétence décisionnelle.

Elles constituent enfin un facteur d’accélération des projets, dans la mesure où elles permettront de détecter précocement les difficultés susceptibles d’être rencontrées et d’apporter les modifications nécessaires avant qu’intervienne une décision administrative négative.

L’article 9 prévoit l’expérimentation d’un mécanisme d’association des ABF à la définition des règles locales d’urbanisme, afin de rendre plus intelligible la motivation de leurs décisions. Je le précise, il s’agit ici non pas de toucher aux missions et aux pouvoirs des ABF ou de nier leur rôle essentiel dans la préservation du patrimoine, mais de favoriser le dialogue, afin de faire en sorte que les règles, souvent implicites, qui orientent les décisions des ABF soient davantage objectivées, mieux connues des acteurs, et donc mieux intégrées, dès le départ, dans leurs projets, de façon à éviter des avis négatifs en bout de course.

Je précise également que cette expérimentation ne remet en cause aucune disposition de la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, récemment votée.

La commission a souhaité aborder les diverses dispositions de ce texte en s’inscrivant dans le cadre initial voulu par ses auteurs. Il s’agit de conserver une approche sectorielle limitée à l’urbanisme et au droit des sols, pour éviter de se disperser, d’en rester à une démarche rigoureuse de simplification du droit, en vue d’optimiser les procédures en les accélérant et en les sécurisant, sans déréglementer ni déstabiliser – cela implique le respect d’une discipline pour apprécier, au-delà des bonnes intentions, les impacts réels en termes de simplification –, de continuer à s’inscrire dans une démarche de coconstruction entre la majorité et l’opposition, entre le Sénat et le Gouvernement, afin d’aboutir à des propositions techniquement robustes et suffisamment consensuelles pour que l’on puisse espérer qu’elles subsistent au terme de la navette.

Il s’agit ici non pas de rouvrir des débats qui viennent d’être tranchés sur le fond, mais d’examiner quelques propositions de bon sens et pragmatiques de nature à nous rassembler.

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