Intervention de Christophe Viprey

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 22 juin 2016 à 9h50
Table ronde sur la diplomatie économique

Christophe Viprey, directeur des garanties publiques de COFACE :

Je vais très rapidement rappeler le rôle de la Coface. On parle ici de garanties publiques, segment public de Coface. Coface a par ailleurs développé une activité privée comme assureur crédit court terme. Le rapprochement avec des Bpifrance ne concerne que le segment public.

Le segment que je dirige est plus connu pour les grands contrats. Ce segment public de Coface est la mission qui lui a été assignée depuis 1946. COFACE est une vieille dame qui accompagne les contrats civils et militaires, parfois pour de très grands montants.

Parlons maintenant, plus précisément des PME et des ETI. Les produits se sont adaptés dès les années 1950. L'un de nos produits majeurs, qui fait appel aux subventions, l'assurance prospection, est distribué à près de quatorze mille PME. Cela fait donc longtemps que COFACE s'est orientée vers les PME. La gamme s'est étoffée avec d'autres produits, dont je veux expliquer davantage la philosophie que le fonctionnement.

Pourquoi a-t-on besoin d'assurances pour l'exportation ? L'exportation, c'est un développement, une croissance. Comme toutes les croissances, elle doit être financée. La croissance nationale doit l'être aussi. Si l'exportation nécessite des produits particuliers, c'est parce qu'elle présente des risques particuliers. Ces risques ne sont pas tous extraordinaires. Les risques politiques d'un bouleversement à l'étranger sont par exemple extraordinaires, mais on le couvre évidemment. C'est le plus connu.

D'autres risques sont plus classiques : trouver des clients à l'étranger, prospecter, revient plus cher que de trouver des clients chez soi. La philosophie de l'assurance prospection consiste à accompagner les entreprises dans la recherche de clients étrangers, car on sait que cela coûte plus cher que de trouver des clients sur le territoire national.

Le risque de change est également particulier. COFACE Garanties publiques a donc développé une couverture de change plus pratique et moins coûteuse que celle que peuvent offrir les banques, de façon à apporter une solution à des PME qui n'ont pas toujours les moyens de s'adresser aux banques pour couvrir des achats de devises à terme, produits complexes réservés aux grandes entreprises.

Troisième aspect : à l'étranger, lorsqu'on perçoit des acomptes, les clients désirent presque toujours des cautions en échange. C'est une question d'équilibre : ils veulent pouvoir récupérer leurs acomptes, à première demande, s'ils estiment que la prestation n'est pas bien remplie. Si une grande entreprise peut très facilement trouver une banque pour émettre ces cautions, ce n'est pas le cas pour les PME, qui ont un besoin particulier en termes d'assurance, besoin auquel on répond par une assurance dite de « caution préfinancement », qui concerne environ un millier de PME en France.

Le rapprochement avec Bpifrance est destiné à pallier les faiblesses du système, à qui il manquait un peu de lisibilité. Nous sommes beaucoup à intervenir. Se rapprocher, regrouper les interfaces rend évidemment le système plus visible, et c'est ce que l'on recherche.

La création de Bpifrance, à la fin de 2012, a créé cette opportunité. Dès le départ, la question d'y inclure les garanties publiques de COFACE s'est posée, même lors de la mission de préfiguration. Cela a pris un peu de temps mais va se faire au 31 décembre 2016, date limite inscrite dans la loi.

Le premier objectif consiste donc à unifier les guichets et à assurer une meilleure lisibilité. C'est un enjeu plus fort pour les PME que pour les grandes entreprises, qui sont dotées de services de financement à l'exportation, dotés de dizaines de personnes, qui sont nos interlocuteurs grands comptes. Dans le PME, nos partenaire sont souvent les dirigeants, parfois les directeurs financiers, mais pas plus. Ces dirigeants d'entreprises n'ont donc aucun temps à perdre dans le décryptage du système français d'appui public aux exportations.

Le second intérêt que l'on recherche - et qui constituait l'une de nos faiblesses - est la possibilité de disposer d'un réseau, d'une présence, d'une irrigation sur le territoire national. Bpifrance bénéficie de cette irrigation, de cette présence sur le territoire, qui est reconnue chaque fois que la banque publique vient présenter son activité. Il y a unanimité pour reconnaître que c'est une véritable force pour le développement des entreprises. Ce sera également le cas pour le développement international des entreprises. Je ne le considère pas comme un développement particulier - sauf à exprimer le besoin de couvrir des risques spécifiques.

La troisième force que l'on recherche dans ce rapprochement, c'est la réactivité. Nous avons été construits sur des schémas de grands contrats, notamment militaires, à négociations longues, à financements complexes, dont le déroulement en quelques semaines ne pose pas de problème particulier, notre culture était probablement, même si cela a changé, encore un peu empreinte de ces process longs.

Bpifrance a été construite bien plus récemment, sur un schéma totalement différent, de réactivité extrême et de réponses très rapides. Si nos process sont complexes, c'est aussi parce qu'ils sont sous tutelle de l'administration qui, elle-même, à travers une commission interministérielle des garanties, préfère les contrôler de très près plutôt que laisser beaucoup de marges de manoeuvre à l'opérateur public pour intervenir. Je compte aussi beaucoup sur la force de Bpifrance en termes de réactivité et de réduction des délais d'intervention pour obtenir cette marge de manoeuvre vis-à-vis des PME.

Il ne s'agit pas de traiter en trois jours ou en quatre jours les grands contrats militaires, mais de traiter en trois jours ou en quatre jours les demandes des PME pour avoir une assurance prospection qui, elle aussi, même pour des montants extrêmement faibles, est parfois soumise à la commission interministérielle des garanties et pèche par son absence de réactivité.

Enfin, s'agissant de la commercialisation, le réseau commercial de Bpifrance est connu pour sa force, sa vigueur, son dynamisme. Quand les PME n'ont pas les équipes pour aller chercher les soutiens, ce sont les soutiens qui doivent aller aux PME. On va utiliser le réseau commercial de Bpifrance pour le proposer, là où la culture dominante de COFACE Garanties publiques était plutôt de considérer que le produit public constituant une aide pour les entreprises, c'était à elles de venir le chercher.

Voilà la philosophie de ce rapprochement, auquel je crois beaucoup. Ce n'est pas fait, mais cela fait suffisamment de temps que l'on en discute pour que le dialogue constructif avec Nicolas Dufourcq et ses équipes soit très avancé. On est d'accord sur le plan stratégique, d'accord sur les objectifs de réactivité, de présence commerciale et d'unification des interlocuteurs et des guichets. Ce sont ces objectifs que l'on va décliner.

Cela signifie-t-il que l'on va créer des produits ? A priori, non. Il s'agit plus de segments plus automatiques et plus rapides en décision dans chacun des produits existants. On va le faire pour l'assurance-crédit afin de couvrir le risque de non-paiement des acheteurs étrangers. Pour une PME, on le fera en quelques jours, là où on le fait en quelques semaines pour les grands contrats.

Il en va de même pour les garanties de caution à destination des PME. On envisage la création d'un produit plus automatique, assorti d'une sorte de « labellisation de l'entreprise » qui peut en bénéficier, après avoir vérifié qu'elle produit en France. En effet, étant donné le risque pris par l'État, ces produits ont vocation à soutenir des emplois en France, et non dans des pays étrangers. On peut le vérifier et considérer l'entreprise comme éligible à nos garanties, sans le lui demander à nouveau à chaque fois qu'elle nous sollicite pour la soutenir dans un nouveau projet.

Il s'agit plus d'améliorations de produits à destination des PME que d'une révolution dans les produits, dont on estime que la gamme couvre les besoins financiers à l'exportation.

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