Intervention de Françoise Gatel

Commission mixte paritaire — Réunion du 25 octobre 2016 à 14h00
Commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté

Photo de Françoise GatelFrançoise Gatel, sénateur, rapporteur :

Aux titres Ier et III, dont j'étais rapporteur, le Sénat s'est attaché à recentrer le projet de loi sur ses objectifs initiaux, considérant que l'Assemblée nationale avait fait preuve d'un activisme conséquent lors de son examen du texte.

Le Sénat a suivi six priorités : recentrer le projet de loi sur ses objectifs ; s'assurer que les dispositions adoptées puissent effectivement être mises en oeuvre ; supprimer les dispositions relevant du domaine réglementaire et les demandes de rapports ; éviter l'ajout de nouvelles contraintes pour les collectivités territoriales et les entreprises ; supprimer les dispositions revenant sur des mesures adoptées par le Sénat lors de l'examen de lois précédentes ; affirmer le rôle de législateur du Sénat et refuser qu'il ne soit relégué au rôle de chambre d'enregistrement, ce qui nous a conduit, par exemple, à durcir les règles encadrant l'ouverture des écoles privées.

Le Sénat a amélioré plusieurs mesures de l'Assemblée nationale telles que l'élection du candidat le plus jeune en cas d'égalité lors des scrutins européens et l'extension à tous les versants de la fonction publique du nouveau contrat d'intégration.

En revanche, à l'article 5, le Sénat a supprimé le tutorat pour les mineurs réservistes de la réserve civique, considérant qu'ils étaient déjà très opérationnels - mais a musclé le tutorat au sein de la réserve civique. À l'article 8, il a supprimé le congé pour l'exercice de responsabilités associatives, la très récente loi relative au travail ayant consacré dix-sept types de congés différents. Il a toutefois contribué à la nouvelle rédaction de l'article 14 bis A incitant les jeunes apprentis à la mobilité, ce qui lui tenait à coeur. Il a fortement simplifié l'article 43 instituant le Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, considérant que la loi, qui fixe le cadre, ne doit pas être bavarde.

Le Sénat a veillé à l'étanchéité entre le service civique et l'emploi. À l'article 10, il a supprimé l'extension du service civique aux organisations internationales dont le siège est implanté en France, qui ferait concurrence aux stages, ainsi que la disposition donnant aux organisations syndicales la qualité de partenaires officiels des préfets pour le développement du service civique, à l'article 12. Pourquoi introduire les syndicats dans la gestion du dispositif, s'il ne s'agit pas de travail ? En revanche, au même article, le Sénat a réintroduit l'obligation de formation des tuteurs.

Le Sénat a supprimé, à l'article 8 ter, la possibilité de financer avec de l'argent public les dirigeants de moins de trente ans d'associations ayant des fonds publics comme unique source de financement. Proposer à des jeunes un salariat pour une durée de trois ans renouvelable trois fois, au sein d'une association, ce n'est pas le meilleur chemin vers l'emploi. Nous n'avons validé que partiellement l'ordonnance de 2015 portant simplification du régime des associations et des fondations dans la mesure où le champ de l'ordonnance outrepassait l'habilitation.

Le Sénat a adopté une position différente de celle de l'Assemblée nationale sur la possibilité pour un mineur de devenir directeur de publication. Cela déresponsabilise les familles et engendre des conséquences civiles ou pénales non négligeables. Enfin, le Sénat est défavorable à la pré-majorité associative. Ce sujet concerne en fait, l'abaissement de l'âge de la majorité, qui mérite d'être traité à part entière, dans un texte ad hoc.

En matière d'éducation, le Sénat n'a pas approuvé la demande du Gouvernement de le laisser instituer par ordonnance un régime d'autorisation pour l'ouverture d'une école privée, car un tel régime nous est apparu contraire à la Constitution, qui consacre la primauté de la liberté d'enseignement. Le Sénat a plutôt renforcé les exigences du régime de déclaration en vigueur, qu'il s'agisse de financement ou de respect des normes, et il a rendu obligatoire un contrôle annuel de ces établissements. Un dossier d'ouverture peut être si bien préparé qu'il sera conforme : c'est ce qui se passe ensuite qu'il faut examiner, il faut contrôler dans la durée.

Le Sénat a également précisé le lieu de contrôle de l'instruction en famille, à propos duquel la loi était ambiguë. Il a décidé que, sauf décision motivée de l'administration, le contrôle se déroulait sur le lieu où est dispensée l'instruction, d'autant que celui-ci peut se trouver dans une zone où l'État ne va presque plus.

Quant aux articles 16, 16 ter à 16 octies et 16 decies, relatifs aux collectivités territoriales, le Sénat n'a pas souhaité revenir sur les équilibres de la récente loi NOTRe : ce texte est trop récent pour que nous y revenions déjà, nous devons faire attention à ne pas ajouter de l'instabilité législative.

En ce qui concerne les médias, le Sénat a supprimé des dispositions relatives à la diversité dans les programmes audiovisuels. Comment s'assurer de la prise en compte de la diversité de la société française dans des programmes étrangers ? Ce serait se condamner à ne plus diffuser ces derniers. Quant aux quotas de langues régionales, tout a déjà été validé dans la loi relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine. Le Sénat a amélioré la rédaction de l'article 44 B afin de préciser que le CSA devait veiller au respect de la dignité de toutes les personnes, et non seulement les femmes, dans les publicités.

Le Sénat a également souhaiter lutter contre les « corbeaux numériques » et les injures sur Internet à l'article 37, en excluant les journalistes et assimilés de ces délits - ce qui nous a valu des critiques pour une attitude « liberticide »...

Le titre III comportait de très nombreuses dispositions, notamment sur le bizutage, déjà qualifié de délit, non seulement pour ceux qui le commettent mais également pour ceux qui en sont spectateurs.

Concernant la fonction publique, le Sénat n'a pas adopté l'article 36 bis B, compliqué et illusoire, qui organise de fait un fichage des candidats aux concours administratifs. Enfin, s'agissant du jury de concours de l'ENA, les sénateurs ont constaté que les contraintes de l'agenda des parlementaires rendaient leur présence impossible quelque 40 jours par an pour assurer le suivi des épreuves. Ils ont en revanche proposé l'augmentation du nombre de non fonctionnaires à ce jury.

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