Intervention de Mathieu Darnaud

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 26 octobre 2016 à 8h35
Statut de paris et aménagement métropolitain — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Mathieu DarnaudMathieu Darnaud, rapporteur :

Le statut particulier de Paris est l'héritage d'une histoire mouvementée, faite de rapports conflictuels avec le pouvoir central et de penchants insurrectionnels qui se confondent avec notre histoire nationale. L'évolution de la démocratie a toutefois conduit le législateur à rapprocher progressivement le statut dérogatoire de Paris du droit commun, tout en tenant compte de sa fonction de capitale de la France. En 1790, l'Assemblée nationale institue un maire de Paris, élu pour deux ans, et y crée un conseil municipal.

Toutefois, le maire de Paris n'exerce pas la plénitude des pouvoirs de police des maires de droit commun : c'est l'arrêté consulaire du 12 Messidor an VIII qui définit les compétences du préfet de police ; ce dernier exerce celles normalement dévolues au maire. De même, ce n'est qu'en 1868 que Paris reçoit les attributions des autres conseils municipaux, mais il ne sera pas concerné par la grande loi municipale de 1884.

La loi du 31 décembre 1975 marque une rupture en instituant l'élection au suffrage universel du maire de Paris, effective dès 1977. C'est le maire de Paris qui prépare et exécute les délibérations du conseil de Paris. Mais il ne dispose pas toujours de la plénitude des pouvoirs de police, qui restent au préfet de police. Le maire de Paris devient président du conseil général de Paris, et le conseil de Paris est l'assemblée délibérante de deux collectivités territoriales distinctes : la commune et le département.

Le projet de loi comporte deux axes : quarante articles qui réforment le statut de Paris et l'aménagement métropolitain et un quarante-et-unième article, qui assouplit les critères d'accès au statut de métropoles, de façon à transformer quatre établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre.

La réforme du statut de Paris poursuit trois objectifs. Tout d'abord, la fusion des deux collectivités territoriales en une collectivité unique à statut particulier au sens de l'article 72 de la Constitution, appelée « Ville de Paris ». C'est l'objet des articles 1er à 12. Cette fusion est justifiée par le Gouvernement par la mise en place de guichets uniques, la simplification de la gestion des finances locales et une meilleure lisibilité de la gouvernance. Cette collectivité unique exercerait les compétences départementales et communales à compter du 1er janvier 2019, date de sa création. Ensuite, second objectif : renforcer la démocratie locale en transférant aux maires d'arrondissement de nouvelles compétences de proximité. C'est l'objet des articles 13 à 16, quand les articles 17 à 20 proposent le regroupement des quatre premiers arrondissements de Paris en un secteur unique, avec une mairie unique, pour assurer une meilleure représentativité des conseillers de Paris tout en mutualisant les services publics de proximité. Enfin, ce texte tend à approfondir les transferts de pouvoirs de police entre le préfet de police et le maire de Paris, au profit de ce dernier : ce sont les articles 21 à 26 et 29 à 32. Le maire de Paris assumerait des pouvoirs de police spéciale de proximité, telles que la police des baignades, la réglementation des manifestations sur la voie publique à caractère festif, sportif ou culturel ou la police de la salubrité des habitations et hébergements. Ses compétences en matière de circulation et de stationnement seraient également renforcées, dans la logique de la loi de du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité. Le préfet de police bénéficierait, quant à lui, à l'article 27, du transfert de la police des aérodromes de Roissy et du Bourget, aujourd'hui assumée par le préfet de Seine-Saint-Denis.

Ce projet de loi propose aussi de nouveaux outils pour l'aménagement de l'espace métropolitain. Le titre II déborde ainsi le statut stricto sensu de Paris, la plupart de ses dispositions ayant vocation à s'appliquer sur l'ensemble du territoire national. Il comprend des mesures techniques essentiellement relatives au droit de l'urbanisme, dont la plupart vise à répondre à des problèmes concrets rencontrés par les acteurs de terrain. Certaines dispositions proposent des ajustements calendaires ou de coordination comme la meilleure articulation entre le calendrier des zones d'aménagement différé (ZAD) et celui des procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique, à l'article 33 ; la simplification des créations de filiales et des prises de participations par les établissements publics fonciers (EPF) et d'aménagement (EPA), à l'article 34 ; la possibilité pour la métropole du Grand Paris d'intégrer le conseil d'administration de Grand Paris Aménagement, à l'article 37 ; l'adaptation du droit en vigueur pour permettre à la Société du Grand Paris de respecter le calendrier du Grand Paris Express à l'article 39 et d'exploiter de nouvelles sources de financement à l'article 40.

Ce même titre II comporte trois dispositions plus substantielles. Les mutualisations de moyens entre plusieurs EPF ou EPA de l'État seraient tout d'abord facilitées dans un objectif de rationalisation de l'action publique : c'est l'objet de l'article 35. Un nouvel outil serait également créé, à l'article 36 : la société publique locale d'aménagement d'intérêt national (SPLA-IN). Cette structure permettrait aux collectivités territoriales, à leurs groupements, à l'État et à ses établissements publics d'aménagement de collaborer de manière plus étroite pour la réalisation d'opérations d'aménagement particulièrement complexes. Enfin, l'article 38 propose d'habiliter le Gouvernement à créer, par ordonnance, un nouvel établissement public local chargé de l'aménagement, de la gestion et de la promotion du quartier de La Défense.

L'article 41, enfin, modifie les critères d'accès au statut métropolitain, pour permettre la création de quatre nouvelle métropoles. D'une part, il l'ouvre aux EPCI à fiscalité propre de plus de 400 000 habitants qui ne comptent pas de chef-lieu de région sur leur territoire ; seraient ainsi concernées la communauté urbaine de Saint-Etienne-Métropole et la communauté d'agglomération de Toulon Provence Méditerranée. D'autre part, il crée un nouveau critère de métropolisation, applicable aux EPCI à fiscalité propre centres d'une zone d'emploi de plus de 400 000 habitants et comprenant le chef-lieu de région ; seraient ainsi transformées en métropole la communauté d'agglomération Orléans Val de Loire et la communauté urbaine du Grand Dijon. Au total, on passerait ainsi de quinze à dix-neuf métropoles, tous statuts confondus.

Je regrette l'engagement de la procédure accélérée qui nous est imposée. Certains points auraient mérité un travail plus approfondi, et une étude d'impact plus fournie qu'elle ne l'est. Il est dommage que ce texte, en son article 41, aborde un sujet important au détour d'un texte portant sur Paris, alors même qu'il nécessiterait une réflexion sur ce que l'on entend derrière la notion de métropole.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion