Intervention de Rachel Paillard

Délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 27 octobre 2016 : 1ère réunion
Table ronde dans le cadre de la préparation du rapport sur l'évolution des missions assurées par les services déconcentrés de l'état au profit des collectivités territoriales

Rachel Paillard, membre du comité directeur de l'Association des maires de France :

Les différentes réformes des services déconcentrés de l'État ont conduit à une réduction et à un redéploiement des effectifs. Les élus ont le sentiment d'un déclin de leur relation avec des services devenus exsangues, qui font davantage de contrôles procéduriers que de l'accompagnement et du conseil. Je prendrai deux exemples : les directions départementales des territoires (DDT), qui sont considérées comme tatillonnes depuis le transfert de l'instruction des permis de construire ; les directions départementales de la cohésion sociale (DDCS), qui livrent souvent une interprétation excessive des normes, particulièrement dans le domaine de la petite enfance, ce qui explique pour partie la difficile mise en place des rythmes scolaires. L'État n'a plus les moyens d'exercer son rôle de conseil quand des réformes régulières et incessantes conduisent à un transfert de responsabilités aux élus locaux.

Le plan Préfectures nouvelle génération (PPNG) est une réforme mal perçue dans les zones rurales. L'AMF pense que, dans ces zones, la rationalisation de la carte pourrait être lancée, avec la création de grands arrondissements s'appuyant sur des bassins de vie. La proximité ne semble pas être le but premier de cette réforme.

En ce qui concerne la réforme des cartes nationales d'identité (CNI), elle est très mal ressentie par les communes rurales, qui considèrent qu'elle conduit à un délitement du lien entre les concitoyens et leur commune. Ce désengagement de l'État, qui fragilise l'institution communale, devrait être minutieusement étudié par le ministère de l'Intérieur. L'AMF souligne également le caractère très rapide de la mise en place, à titre expérimental, dans les Yvelines, du nouveau mode de délivrance des CNI, adossée au bureau délivrant les passeports. Nous avons également interpellé le ministère de l'Intérieur quant au coût pour les communes de cette réforme.

Ce qui compte pour nous, c'est davantage le résultat sur le terrain que la méthode employée. Passer de la révision générale des politiques publiques (RGPP) à la modernisation de l'action publique (MAP) ne change pas grand-chose et confirme la tendance d'un désengagement de l'État. Les élus se soucient peu de la méthode de travail employée au sein du ministère de l'Intérieur. Ils veulent savoir comment ces réformes peuvent participer au renforcement de la proximité avec les citoyens et à une meilleure gestion des services publics. Nous ne voulons pas d'une France immuable ; nous souhaitons participer aux évolutions, en étant davantage associés en amont.

Nous vivons sur nos territoires non seulement la réorganisation territoriale de l'État, mais aussi l'application de la loi NOTRe. Or les services de l'État ont des difficultés à accompagner, sur les questions tant fiscales que relatives aux bases locatives, les communes et communautés de communes qui vont devoir « grossir » ensemble.

À cela s'ajoute la réforme des régions. Une préfecture de région devient une simple préfecture de département, perd ses repères... Quand un élu interpelle les services de l'État, ceux-ci font désormais preuve d'une grande prudence.

Rien n'a été mis en place pour accompagner le développement des territoires ruraux. Nous sommes obligés, pour certains projets, de faire appel à des services privés, via des appels d'offres et des mises en concurrence lourdes à organiser. Dans un contexte budgétaire contraint, cela engendre de nouvelles dépenses. Les jeunes élus n'ont pas forcément la culture de cette mise en concurrence systématique.

Des réformes sont mises en place pour compenser la nouvelle organisation de la DDT, mais leur application sur le terrain montre des inégalités entre les territoires.

Il faut donner plus de latitude aux services de l'État, dont les compétences sont mal exploitées, les mettre davantage en valeur, sous l'autorité du préfet, et leur permettre d'adapter les actions et procédures aux réalités locales. Il faut passer d'une culture de l'administration procédurière à une culture de projet et d'évaluation. Les élus ont besoin d'être accompagnés, particulièrement dans les territoires qui ont peu de moyens d'ingénierie.

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