Monsieur le président, Mesdames, Messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous retrouver pour l'examen du projet de loi de finances pour 2017, dans un contexte plutôt favorable au ministère, puisque le budget de la défense s'élèvera à 32,7 milliards d'euros, comprenant notamment 250 millions d'euros de ressources issues de cessions, dont 200 millions d'euros de cessions immobilières, soit une enveloppe globale de 600 millions d'euros de plus qu'en LFI 2016.
Les évolutions des effectifs sont elles aussi positives. Nous aurons quatre cents emplois en plus pour la seule année 2017, hors effectifs du Service industriel de l'aéronautique (SIAé), puisqu'ils sont à l'extérieur du plafond ministériel des emplois autorisés (PMEA) et représentent soixante-quatre emplois.
Les personnels font l'objet d'une attention toute particulière, avec un plan de mesures catégorielles au sens strict de 194 millions d'euros. On peut considérer que l'ensemble des mesures en faveur des personnels représentent 400 millions d'euros.
Mon intervention s'articulera autour de trois points : je vous donnerai dans un premier temps des éléments très généraux sur le programme 212. Je reviendrai sur le titre 2, dont j'ai en effet la responsabilité depuis 2015. Je passerai très rapidement sur deux politiques propres au programme 212, l'immobilier et l'action sociale.
Le programme 212 regroupe les fonctions d'administration et de soutien mutualisé au profit de l'ensemble du ministère.
S'agissant du hors titre 2, ces autorisations d'engagement s'élèvent à 2,439 milliards d'euros, soit une hausse de 4,8 % par rapport à 2016. Les crédits de paiement augmentent de 5,8 %, passant de 2,27 milliards d'euros à 2,145 milliards d'euros.
Cette hausse est principalement due aux besoins en infrastructures et aux dépenses d'accompagnement, notamment pour les systèmes d'information, d'administration et de gestion. Les dépenses de fonctionnement connaissent toutefois une baisse d'environ 10 millions d'euros.
En outre, le ministère de la défense aura la possibilité de dépenser 200 millions d'euros sur le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». Cela constituera sans doute un sujet de tension dans la gestion, d'une part parce qu'il faut réaliser les cessions permettant de dégager cette ressource, d'autre part parce que les modalités d'utilisation du compte d'affectation spéciale sont en cours de modification et deviennent totalement interministérielles.
Concernant le partenariat public-privé Balard, tous les ouvrages ont été mis à la disposition du ministère. Les déménagements se sont achevés fin octobre 2015. Un sondage réalisé auprès des personnels en activité à Balard pour connaître leur ressenti à propos des conditions de travail a montré que 80 % des personnes qui ont répondu, soit 53 % du personnel en poste à Balard, se sont déclarées satisfaites de leurs conditions de travail et de vie sur le site.
2016 représente la première année d'emploi du site. Nous avons quelques difficultés avec nos partenaires, mais les travaux sur la parcelle Est continuent. De nouveaux bâtiments réhabilités seront livrés à l'automne. La rénovation du bâtiment 26, ancien bâtiment de l'état-major de l'armée de l'air commencera à partir de 2018.
Les crédits affectés au PPP Balard en 2017 s'élèvent à 151,93 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit une augmentation de près de 9 millions d'euros, et représentent 214 millions d'euros en CP, ce qui constitue une diminution de 7 millions d'euros par rapport à 2016. Cela recouvre le paiement des redevances et des travaux de la phase 2.
Mes services ne connaîtront pas d'évolutions importantes en 2017. Ils vont continuer à mettre en place l'autorité fonctionnelle renforcée qui leur est concédée concernant la direction financière et la DRH. Le service des infrastructures poursuivra le renforcement de compétence dans les établissements du service, notamment en matière nucléaire, du fait des très gros enjeux qui accompagnent l'arrivée du Barracuda. Une centaine de personnels auront été formés en quelques années, notamment en liaison très étroite avec le CEA.
La direction du service national devrait connaître une évolution importante. Elle ne figure pas dans le programme 212, ces crédits relevant de la mission « Anciens combattants ». Elle doit devenir la direction du service national et de la jeunesse. Les questions relatives à la jeunesse sont une des préoccupations importantes du pouvoir politique. Il faut donc que nous soyons en mesure d'y répondre.
Nous disposons d'un outil avec la journée défense et citoyenneté qui permet de recenser l'ensemble des jeunes Français, mais il existe au sein du ministère, d'autres actions en faveur de la jeunesse, comme le service militaire volontaire ou tout ce qui est fait au titre de l'égalité des chances et des actions pilotées par la commission Armée-Jeunesse (CAJ).
Le ministre a décidé, lors du soixantième anniversaire de la CAJ, de tout regrouper au sein d'une direction du service national et de la jeunesse pour avoir un interlocuteur unique sur ces questions.
Le titre 2 du ministère, pensions comprises, représente un budget de 19,8 milliards d'euros, et de 11,6 milliards d'euros hors pension, soit une augmentation de 329 millions d'euros par rapport à la LFI 2016.
Ces crédits intègrent notamment 170 millions d'euros pour le financement des OPEX. Ils seront complétés par 286 millions d'euros de ressources externes, constituées pour l'essentiel par les attributions de produits du service de santé des armées. Par ailleurs, 30 millions d'euros sont budgétés sous plafond de ressources pour tenir compte des difficultés éventuelles de Louvois. Dès lors, l'ensemble des ressources confondues du budget du titre 2 du programme 212 s'élèvent à 11,9 milliards d'euros hors CAS Pensions.
Ces crédits permettront de tenir compte de l'évolution des effectifs. Le plafond ministériel des emplois autorisés s'établira à 273 294 ETP - 77 % de militaires, 23 % de civils.
Le personnel militaire comptera 711 ETP de plus en 2017 : 304 ETP pour les militaires du rang mais également 399 ETP d'officiers, principalement subalternes, pour répondre aux besoins d'encadrement de la FOT, du renseignement et de la cyberdéfense. Cette augmentation ne conduit pas à stopper le mouvement de « dépyramidage » prévu dans la LPM. Les tableaux d'avancement de lieutenant-colonel et colonel ont été réduits de 30 % en quatre ans.
Le personnel civil connaîtra une baisse de 247 ETP du fait de la déflation des ouvriers de l'État, sauf dans le domaine assez critique de la maintenance des aéronefs et des matériels terrestres, pour lequel nous avons obtenu 418 recrutements sous statut d'ouvriers de l'État.
Les personnels de catégorie C diminuent d'un peu plus de 137 emplois. En revanche, les emplois de catégorie A augmentent de 428 postes pour répondre à la politique de signalisation des postes et aux exigences en matière de renseignement et cyberdéfense.
Les mesures catégorielles représentent 194 millions d'euros, contre 33,8 millions d'euros l'an passé - 1,6 million d'euros en 2016, contre 18,1 millions d'euros en 2017 pour le personnel civil, qui bénéficiera de la mise en oeuvre des mesures prévues dans la fonction publique de manière générale, notamment du dispositif « parcours professionnels, des carrières et des rémunérations » (PPCR), et du régime indemnitaire « RIFSEEP », qui tient compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel.
L'enveloppe catégorielle militaire s'établit à 175,3 millions d'euros. 71 millions d'euros résultent de mesures d'équité interministérielle - transposition à la défense de mesures générales, comme celles appliquées aux fonctionnaires. 51 millions d'euros sont destinés à compenser l'engagement opérationnel pour tenir compte de l'absence des militaires de leur garnison, avec la création d'une nouvelle indemnité de compensation.
53 millions d'euros correspondent à la transposition aux militaires du rang des réformes des grilles des fonctionnaires de catégorie C, ainsi qu'à la réforme de la grille des capitaines de gendarmerie, qui a des conséquences pour les capitaines des armées.
La revalorisation du point d'indice de la fonction publique s'effectue en deux temps : 0,6% au 1er juillet 2016, puis 0,6 % au 1er février 2017. L'impact de cette mesure s'élève à 109 millions d'euros, soit 96 millions d'euros pour les militaires et 23 millions d'euros pour les civils. En 2016, nous avons financé cette mesure par des crédits propres au ministère, à hauteur de 27 millions d'euros. Pour 2017, des crédits supplémentaires à hauteur de 82 millions d'euros nous ont été accordés.
Concernant les ouvriers de l'État, nous ne sommes toujours pas sortis du gel du bordereau des salaires. Il le faut cependant. Il n'y a pas de raison que les salaires de la fonction publique évoluent et non ceux des ouvriers de l'État. Nous discutons avec la fonction publique sur ce sujet. Une proposition de quasi-statut ne nous semble pas acceptable. On peut toutefois s'interroger sur des évolutions concernant le dispositif d'indexation du salaire des ouvriers de l'État sur le bordereau des salaires de la métallurgie parisienne.
Des discussions sont en cours avec les syndicats, la fonction publique et le ministère du budget. L'objectif du ministre est de régler ce sujet pour la fin de l'année.
Nous avons cependant obtenu une mesure très positive en ayant la capacité de recruter 418 ouvriers de l'État pour les services de maintenances aéronautique et terrestre dès le début de l'année.
Un mot sur Louvois et Source Solde. En moyenne, en 2016, 90 % des militaires soldés par Louvois l'ont été sans anomalie. Pour les autres, l'essentiel des soldes a été régularisé dans Louvois avant versement, et seul 1 % a été versé hors Louvois.
La récupération des trop-perçus se poursuit. Ils représentent en cumulé 401 millions d'euros. 30 millions d'euros sont encore à notifier. À l'été 2016, le montant cumulé des trop-perçus remboursés était de 271 millions d'euros.
Concernant Source Solde, des discussions importantes sont menées avec l'industriel. Des phases des tests, notamment de solde à blanc, puis de solde en double vont débuter. Ces tests doivent être réalisés sur des périodes longues. Je ne peux donc dire si la bascule s'opérera fin 2017 ou tout début 2018. Le calendrier se calera progressivement au cours de l'année.
J'en viens aux politiques du programme 212.
En ce qui concerne la politique immobilière, les autorisations d'engagement pour 2017 sont à hauteur de 1,7 milliard d'euros, soit plus de 100 millions d'euros d'augmentation par rapport à 2016. Les crédits de paiement s'élèvent à 1,34 milliard d'euros, soit une augmentation de 170 millions d'euros. À cela, il faut ajouter les 200 millions d'euros de droit à consommer sur le compte d'affectation spéciale. Cette augmentation correspond au maximum de ce que nous pouvons consommer. Il sera extrêmement difficile d'aller au-delà de 1,6 milliard d'euros d'engagement.
Pourquoi y a-t-il une augmentation ? Tout simplement parce qu'il faut répondre aux besoins de la FOT, ainsi qu'aux besoins liés à l'arrivée des grands programmes d'armement, comme Barracuda, les hélicoptères de nouvelle génération ou la poursuite des programmes Rafale, FREMM, VBCI, Scorpion. On prévoit 67 millions d'euros pour l'accueil du MRTT, 92 millions d'euros pour Barracuda et 22 millions d'euros pour Scorpion.
À côté de ces opérations liées aux nouveaux programmes, un effort important est fait en matière de maintenance. Les crédits augmenteront de près de 7 % en 2017, et nous consacrerons 170 millions d'euros à la maintenance de nos bâtiments. C'est certes inférieur à ce qu'il faudrait, mais cela augmente néanmoins, et il le faut absolument si l'on veut répondre aux besoins des armées.
La partie relative à la sécurité et à la protection des emprises de défense est également importante soit 98 millions d'euros en 2017 sur ce dispositif. Ils viendront compléter une somme à peu près identique engagée en 2016.
Un mot sur les cessions. Compte tenu de la situation du compte d'affectation spéciale, pour consommer 200 millions d'euros, il faudrait quasiment 300 millions d'euros de recettes. La gestion du compte d'affectation spéciale a connu depuis plusieurs années quelques perturbations. Il nous est arrivé d'engager des opérations sur crédits budgétaires et de les payer sur des ressources du compte d'affectation spéciale ou réciproquement, selon les capacités. C'est ce qu'on appelle le mécanisme de facturation interne.
Allons-nous pouvoir réaliser ces cessions ? Pour ce faire, il faut les réaliser à Paris. Des discussions sont toujours en cours sur la cession de l'Hôtel de l'artillerie - Saint Thomas d'Aquin. L'arbitrage rendu en faveur de Sciences Po devrait conduire à percevoir environ 87 millions d'euros.
Compte tenu des prix de vente de la caserne de la Pépinière et de l'ensemble Bellechasse-Penthemont, il est fort probable qu'une cession ouverte de Saint Thomas d'Aquin aurait pu produire plus de ressources. Un arbitrage a été rendu. Il faut à présent le mettre en oeuvre.
Le Premier ministre a effectué une visite de l'îlot Saint-Germain avec la maire de Paris en juillet. Des annonces ont été faites. Une fraction - environ 14 000 mètres carrés - va être utilisée pour construire des logements sociaux et des équipements publics. Cette décision relève de la politique de logement social de la ville. Il existe différentes catégories en matière de logement social. Si la catégorie retenue est celle dans laquelle les loyers sont les plus bas - et il semblerait que l'on s'oriente vers cette option - cela aura nécessairement des conséquences sur les ressources que le ministère attend.
Cela peut également avoir des conséquences sur la cession de l'autre partie de l'îlot Saint-Germain, qui devrait faire l'objet d'un appel à projets. Des discussions sont pilotées par le préfet de région, avec la ville, le ministère et la direction de la politique immobilière de l'État. Je ne suis pas certain que cette opération sera réglée en 2017.
Concernant la cession du Val de Grâce, les discussions ont également été engagées par la préfecture de région avec la ville et l'ARS. Le classement de l'hôpital du Val-de-Grâce en grand équipement urbain dans le PLU de Paris limite les capacités d'utilisation de cet édifice.
Le ministère devrait conserver la partie historique. Une discussion a lieu sur le jardin. L'autre partie devrait être cédée. Un appel à projets va être lancé. Des investisseurs français et étrangers sont intéressés. Le résultat dépendra des discussions avec la ville et de ses projets. L'Agence régionale de santé (ARS) ne prévoit pas d'établissement hospitalier dans cet arrondissement. Il y a donc là aussi une interrogation sur la réalisation de cette cession en 2017.
En dehors de Paris, nous avons récupéré en 2016 83 millions d'euros de produits de cession. On peut en attendre en 2017 entre 50 millions d'euros et 80 millions d'euros, mais le marché immobilier n'est pas le même en Ile-de-France et dans les autres régions de province.
Des cessions sont en cours dans des villes de la grande couronne parisienne (Saint-Cloud, Rueil Malmaison), mais aussi ailleurs : on peut donc réussir à dépasser 50 millions d'euros.
Jusqu'à maintenant, chaque ministère disposait de sa propre ligne au sein du compte d'affectation spéciale. Désormais la gestion sera interministérielle. Il sera nécessaire de présenter à la direction de la politique immobilière de l'État les opérations à financer sur le compte d'affectation spéciale. On parle d'un seuil à 5 millions d'euros. Le ministère conduit en moyenne deux cents opérations d'infrastructure de plus de cinq millions d'euros par an. J'ai donc quelques difficultés à concevoir comment nous pourrions nous justifier sur plus de deux cents opérations, et surtout les faire aboutir dans les temps.
Je répondrai ultérieurement aux questions portant sur la politique d'action sociale si vous en avez.