Nous groupons dans un seul rapport l'examen de trois projets de loi de coopération judiciaire en matière pénale avec le Costa Rica et les Comores, afin de réduire les délais de ratification des conventions d'ordre technique.
Pays de 4,8 millions d'habitants, le Costa Rica est un pôle de stabilité en Amérique centrale et la deuxième économie de la zone avec un PIB par habitant de 10 550 dollars - l'un des plus élevés d'Amérique latine. Le Costa Rica a entamé son processus d'adhésion à l'OCDE. La relation bilatérale est dense même si la communauté française au Costa Rica ne compte que 2 565 inscrits, dont 42 % de binationaux.
L'Union des Comores, en revanche, est un pays pauvre avec un PIB par habitant de 860 dollars. Ce pays a connu une histoire agitée, mais depuis 2002, un système de présidence tournante - chaque île gouverne à son tour - assure des alternances régulières et une certaine stabilité. Toutefois, la situation économique et sociale est mauvaise. La société est travaillée par des courants radicaux et des influences étrangères, prônant un islam plus radical sous couvert d'aides et de formations. Principal bailleur bilatéral, la France apporte une aide de 135 millions d'euros sur la période 2014 dans le cadre d'une programmation conjointe avec l'Union européenne. La question de Mayotte, qui a voté contre l'indépendance en 1975 avant de devenir un département français, est un sujet passionnel. La communauté française aux Comores compte 5 500 inscrits sur les listes consulaires, dont la grande majorité possède également la nationalité comorienne. La diaspora comorienne en France est estimée à 370 000 personnes pour 790 000 habitants aux Comores mêmes ! Les transferts de cette diaspora compteraient pour 25 % du PIB.
Les trois conventions examinées mettent en place des coopérations d'entraide judiciaire en matière pénale avec ces deux pays et, pour le Costa Rica, une procédure d'extradition. Actuellement, la coopération s'effectue soit au titre du principe dit de « courtoisie internationale », soit sur le fondement des conventions de l'ONU. Quelques statistiques : en matière d'extradition avec le Costa Rica, la coopération se fait uniquement au profit de la France. Depuis 2003, la France a émis six demandes d'extradition à destination du Costa Rica, dont la dernière en 2008. Un tiers des demandes a trait au trafic de stupéfiants, principalement de cocaïne. 26 demandes d'entraide judiciaire ont été adressées par la France au Costa Rica entre 2000 et 2016, tandis que sur la même période, sept demandes ont été adressées par le Costa Rica à la France. Depuis le 1er janvier 2008, la France a transmis 23 demandes d'entraide judiciaire aux autorités comoriennes portant principalement sur des infractions de nature sexuelle, des infractions à la législation sur les étrangers, des faits de rébellion, d'homicide involontaire ou de blanchiment. 7 des 23 demandes d'entraide transmises depuis 2008 n'ont pas été exécutées et sont toujours en cours. Depuis le 1er janvier 2008, les autorités comoriennes ont, de leur côté, transmis cinq demandes d'entraide judiciaire à la France.
Ces trois conventions, qui comportent les dispositions habituelles en pareil cas, sont conformes aux standards français, ainsi qu'aux obligations internationales et européennes de la France.
De facture classique, la convention d'extradition avec le Costa Rica prévoit que les deux parties s'engagent à se livrer réciproquement les personnes qui, se trouvant sur le territoire de l'une d'elles, sont recherchées par les autorités judiciaires de l'autre partie, soit aux fins de permettre l'exercice des poursuites pénales, soit aux fins d'assurer l'exécution d'une peine privative de liberté. Elle consacre le principe classique de la double incrimination dans chacun des pays, et retient deux seuils : peine d'au moins deux années d'emprisonnement ou reliquat de la peine à purger au moins égal à six mois. Les motifs de refus d'extrader sont très classiques : demandes motivées par des considérations politiques, principe du non bis in idem, prescription. À la demande du Costa Rica, l'extradition est refusée lorsque les faits qui la motivent sont sanctionnés par la peine capitale ou la peine de perpétuité, sauf à ce que la partie requérante garantisse que ces peines seront réexaminées, afin de ne pas les appliquer ou de ne pas les exécuter, pour tenir compte des exigences constitutionnelles du Costa Rica prohibant les peines perpétuelles. Il n'y a pas de convention d'extradition avec les Comores.
Les deux autres conventions, conclues respectivement avec le Costa Rica et l'Union des Comores, organisent l'entraide judiciaire en matière pénale selon des modalités très similaires. Les quelques différences tiennent à la mention, dans la convention avec les Comores, de techniques spéciales d'enquête - livraisons surveillées, opérations d'infiltration, interceptions téléphoniques - qui répondent clairement à des besoins opérationnels, compte tenu de la proximité ou même, dirais-je, de la porosité avec Mayotte, et qui devraient améliorer l'efficacité de la lutte contre les filières d'immigration clandestine et la criminalité en général. La coopération judiciaire avec ce pays a été peu efficiente jusqu'à présent - c'est un euphémisme.
À cette différence près, les deux conventions retiennent, classiquement, le principe de l'entraide la plus large possible, et organisent les modalités de sa mise en place. La convention avec les Comores garantit à la France la possibilité de refuser l'entraide judiciaire dans un dossier qui pourrait aboutir à une condamnation à mort aux Comores, où cette peine existe toujours. Les deux conventions prévoient de très larges possibilités d'obtention d'informations en matière bancaire et organisent également l'audition de témoins ou d'experts par vidéoconférence, le cas échéant, et pour les Comores, par mise à disposition de moyens par la France.
En conclusion, je recommande l'adoption de ces trois projets de loi qui devraient fluidifier la coopération judiciaire entre la France et chacun de ces deux pays, en encadrant l'émission des demandes, leur mode de transmission et leur exécution. Ces textes appellent dans l'ensemble peu de remarques, dans la mesure où les obligations internationales qu'ils contiennent résultent d'engagements européens et internationaux déjà intégrés dans notre ordre juridique et où aucune modification des dispositions législatives ou règlementaires en vigueur n'est à prévoir.
L'examen en séance publique est prévu le jeudi 10 novembre 2016, selon la procédure simplifiée, ce à quoi je souscris.