L'état catastrophique du réseau existant a été souligné par plusieurs intervenants, quelles que soient les sensibilités politiques.
Le fait de créer une structure comme la Société du Grand Paris pour porter le projet du Grand Paris Express constitue une spécificité bien française, sans équivalent en Europe, qui traduit l'incapacité de l'État à trancher et à arbitrer entre ses multiples sociétés de transport sur le plan national, qu'il s'agisse de la SNCF ou de la RATP. Les élus parisiens, par le passé, ont connu l'affrontement entre Meteor et Eole, avec des retards de livraison qui se comptent en décennies.
Je remercie les deux présidents pour leur présence. Ils ne sont pas en cause. C'est le résultat de l'arbitrage politique. Certes, en tant que représentants de l'État, vous ne pouvez que défendre le projet de Christian Blanc, mais celui-ci masque toutefois l'incapacité de l'État à avancer en matière de transports en Île-de-France.
Ma première question m'est suggérée par ce qu'a dit Roger Karoutchi : il existe une société spécialisée, dont le caractère est régional, la RATP. Pourquoi la Société du Grand Paris ? La RATP n'a-t-elle plus les compétences pour assurer ce service aux Franciliens ? N'a-t-elle plus d'ingénieurs capables d'avoir une vision pour la région métropole ? Je ne comprends pas l'utilité de la Société du Grand Paris dans ce contexte.
En deuxième lieu, l'État ne veut pas payer. Vous l'avez tous dit : ce sont les Franciliens et les entreprises franciliennes qui paient. À l'origine, on devait percevoir 4 milliards d'euros sur les sommes prêtées à l'industrie automobile. On touchera au mieux 1,5 milliard d'euros. Allez-vous faire appel au capital de l'État au lieu d'emprunter immédiatement les 4 milliards d'euros ? Quel est l'engagement maximum de l'État ? Cela représente environ deux ans de recettes des entreprises et des usagers franciliens. En fait, la Société du Grand Paris est là pour éviter à l'État de payer. Les entreprises vont acquitter une partie de leur fiscalité à la Société du Grand Paris, une autre partie, par le biais du versement transport, allant aux autres mécanismes de transports. En saucissonnant les prélèvements sur les contribuables franciliens et sur les entreprises, on peut multiplier les sociétés.
D'ailleurs, on pourrait peut-être envisager une cinquième société d'État pour la liaison Charles-de-Gaulle Express ! On parle de société privée : rappelez-moi qui en sont les actionnaires ? À la SNCF comme chez ADP, c'est l'État qui tient les rênes !
La troisième conséquence est dramatique : aucune de ces sociétés d'État ne tient jamais les délais. Cela ne s'est jamais produit, que ce soit pour la SNCF ou pour la RATP. Or, l'environnement institutionnel a changé depuis la création de la Société du Grand Paris. Depuis quelques jours, nous avons la Métropole du Grand Paris, une superstructure, qui plus est régionale. À quand le pouvoir régional ? Il est anormal que le contribuable régional finance la totalité du système - à moins que l'on me démontre que l'État va apporter beaucoup plus d'argent que prévu en capital...
Il existe aussi un problème de légitimité vis-à-vis des Franciliens. Vous êtes une société d'État qui porte le nom de Société du Grand Paris. Il y a à présent une collectivité nouvelle qui s'appelle Métropole du Grand Paris. Allez-vous changer de nom ? Arrêtons la confusion avec ce millefeuille ! Les gens ne savent pas s'ils ont en face d'eux des fonctionnaires de l'État ou des politiques élus démocratiquement pour représenter des collectivités territoriales ! C'est l'une des questions qui se pose, en attendant la fusion, qui me semble plus que nécessaire, des entreprises d'État, dans ce périmètre régional. Peut-être peut-on gagner du temps, et symboliquement, transformer le nom de la Société du Grand Paris en Société d'exploitation des transports collectifs d'Île-de-France, par exemple !