Intervention de Philippe Yvin

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 10 février 2016 à 10h32
Enjeux économiques et financiers de la construction du grand paris express — Audition conjointe de Mm. Jean-Yves Le bouillonnec président du conseil de surveillance et philippe yvin président du directoire de la société du grand paris

Philippe Yvin, président du directoire de la Société du Grand Paris :

Marc Laménie évoquait les procédures. Elles sont en effet très complexes, mais on ne peut que respecter la législation. Il est vrai qu'on a créé ces dernières années, au confluent du droit de l'urbanisme et du droit de l'environnement, un certain nombre de procédures dont beaucoup sont des transpositions de directives européennes qui amènent à franchir beaucoup d'obstacles avant d'arriver au projet. On évoquait les délais, mais il y a tout ce qui existe en amont.

Ce dont je puis témoigner, c'est que nous n'avons pas perdu de temps depuis la création de la Société du Grand Paris, alors que les travaux vont commencer bientôt sur la ligne 15 Sud. Cinq ans, ce n'était pas de trop.

Il nous reste encore beaucoup d'étapes à franchir. Outre les déclarations d'utilité publique, il nous reste toute une série de procédures environnementales, prévues par les lois sur l'eau et sur la protection des espèces animales et végétales, sur les installations classées pour l'environnement, etc. La Société du Grand Paris, comme tous les maîtres d'ouvrage, se doit donc d'être exemplaire en la matière.

Philippe Dominati a repris les propos de Roger Karoutchi sur l'opérateur unique en Île-de-France. C'est un point de vue. Connaissant le système depuis une trentaine d'années, je pense que le choix de Christian Blanc était le bon. L'idée d'un opérateur dédié à un projet précis, avec des financements spécifiques, me semble-t-il, était bonne.

Pour ce qui concerne l'exploitation, je rappelle que la Société du Grand Paris n'est en rien concernée par l'exploitation des transports, qui relève uniquement du STIF. Nous sommes uniquement une société de projet.

Marie-France Beaufils a émis des inquiétudes concernant les sujets de la concurrence et de l'interconnexion : les travaux d'interconnexion vont être réalisés dans le cadre du projet. Notre intention - ceci a été soulevé par beaucoup d'orateurs - est de travailler très étroitement, dès l'amont des travaux, avec la SNCF et la RATP, de façon à ce que ces travaux soient opérationnels le jour de la mise en service des nouvelles lignes.

C'est un sujet déconnecté du choix des opérateurs, qui appartiendra au STIF. Ces opérateurs, qu'il s'agisse de la RATP ou d'autres, en fonction des résultats des appels d'offres, disposeront de ces interconnexions opérationnelles entre les nouvelles lignes et le réseau historique.

Vous avez évoqué le logement, qui nous tient à coeur. Dans toute la mesure du possible, sur le foncier que la Société du Grand Paris est amenée à acquérir, nous mettrons en oeuvre des opérations de logement, en accord avec les maires concernés sur la nature des programmes qu'ils souhaitent développer dans leur commune.

Je rappelle que les estimations du comité scientifique international, qui travaille depuis l'origine du projet sur les impacts économiques du Grand Paris Express, établissent celui-ci à environ 10 % du PIB de la région Île-de-France, soit 60 milliards d'euros sur 600 milliards d'euros de PIB.

Je rappelle que l'Île-de-France ne consomme qu'environ 22 % des 30 % de PIB qu'elle produit. Il existe une redistribution des richesses créées aujourd'hui par l'Île-de-France. Ce projet est donc non seulement financé entièrement par les Franciliens, mais une partie des richesses supplémentaires qu'il générera en Île-de-France bénéficieront aussi aux autres régions françaises.

Fabienne Keller a posé plusieurs questions.

La profondeur des gares résulte des études techniques. Un débat existe depuis l'origine pour savoir s'il faut ou non les faire en aérien ou en souterrain. Quand on voit les difficultés, sur la ligne 18, à faire accepter des viaducs en Île-de-France, on comprend qu'il aurait été très difficile d'aller au-delà de 15 % de réseau aérien, ainsi que cela a été retenu. En outre, en zone urbanisée dense, notamment en petite couronne, il est très difficile d'insérer des viaducs.

De plus, la profondeur des gares est uniquement liée à la nature du sous-sol parisien et au relief. De nombreuses collines traversent la géographie de l'Île-de-France. Il faut donc s'y adapter. On a toujours essayé d'être le plus haut possible. Beaucoup de gares sont à vingt mètres. Cela dépend vraiment de la nature des sous-sols. Les études d'avant-projet recherchent toujours une implantation le plus haut possible pour limiter les coûts.

La gouvernance est un sujet que vous aviez soulevé dans votre rapport. Nous partageons beaucoup de vos préoccupations, mais ce sujet relèvera là aussi des choix politiques qui pourront être faits par le STIF.

S'agissant des quartiers autour des gares, nous sommes dans le droit commun des opérations d'aménagement. Il appartient aux collectivités territoriales concernées, soit les communes, soit les établissements publics territoriaux de la métropole ou les communautés d'agglomération qui viennent de se créer en grande couronne, de prendre des décisions. Nous avons mis en place des comités de pôle pour chacune des soixante-huit gares. La Société du Grand Paris finance une étude à hauteur de 100 000 euros pour chacune d'elles afin de préparer les aménagements des espaces publics environnants.

Au-delà, pour ce qui est des opérations d'aménagement, il s'agira d'une collaboration entre les collectivités territoriales et leurs outils d'aménagement quand elles en ont déjà - sociétés d'économie mixte ou établissements publics d'aménagement de l'État - mais si les maires souhaitent que nous nous impliquions, nous le ferons bien volontiers.

Pour ce qui est de l'affaire de Massy-Valenton, les décisions n'ont pas été prises. Cela rejoint plusieurs questions qui ont été posées sur la rocade TGV, qui constituait un projet SNCF très intéressant, mais qui n'a pas fait l'objet de décisions pour l'instant.

Là où le sujet se pose, sur la ligne 14, les travaux préparatoires vont permettre d'intégrer, le moment venu, le choix de la ligne TGV pour Orly, soit qu'elle s'arrête à Pont-de-Rungis, soit qu'elle s'arrête à l'aéroport d'Orly proprement dit. La décision ne nous appartient pas, mais ce sera possible avec la configuration du réseau que nous préparons.

Michel Berson a rappelé les questions qui se posent pour la ligne 18. C'est effectivement un débat qui persiste. Certains riverains des villages de l'Essonne et des Yvelines au bord de la vallée de Chevreuse refusent en effet le tracé en viaduc. Le surcoût, en souterrain, serait de 150 millions d'euros pour cette seule partie, mais si on l'enterrait à cet endroit, il faudrait le faire sur l'ensemble de la ligne. Cela représente un surcoût de 900 millions d'euros, ce qui est totalement irréaliste.

Je précise à Michel Berson que les estimations actuelles pour la ligne 18 sont de 2,73 milliards d'euros, ainsi qu'en a décidé le conseil de surveillance en novembre dernier, et d'environ 2 milliards d'euros pour la partie allant jusqu'à Saint-Quentin. La décision que nous avons prise est de ne pas interrompre la construction des viaducs, ce qui n'a pas de sens, mais de demander à notre maître d'oeuvre d'étudier le tracé entre Orly et Saint-Quentin en un seul tenant.

Éric Doligé est revenu sur les PPP : autant les PPP avec recettes commerciales n'étaient pas envisageables, autant on aurait pu penser aux PPP que nous connaissons dans les départements pour la construction de collèges, pour lesquels la collectivité paie des loyers. C'est un schéma qui aurait pu se concevoir. Nous le savons tous, financièrement, cela aurait coûté plus cher, puisque les sociétés privées empruntent à un taux plus élevé, mais on aurait peut-être gagné du temps et de l'argent en délais. C'est un débat qui a été tranché par le Gouvernement précédent avant que je ne prenne mes fonctions. On aurait pu concevoir des sociétés de projet par ligne qui fassent appel à des investisseurs privés. Ce n'est pas le choix qui a été fait. Aujourd'hui, il paraît difficile de revenir dessus.

Vous avez évoqué le sujet des fouilles archéologiques. C'est un vrai sujet. Des fouilles archéologiques peuvent en effet provoquer un certain retard, comme sur la ligne 15 Sud. On pouvait s'y attendre, la périphérie proche de Paris ayant eu beaucoup d'implantations humaines depuis l'âge de fer. On a ainsi trouvé des sites mérovingiens, et même, à Vitry, un os de mammouth ! Il faut donc vraisemblablement, au-delà du diagnostic, réserver un certain temps pour les fouilles. Ceci a été intégré dans le calendrier des travaux pour six mois environ, en espérant que les fouilles n'iront pas au-delà.

Je crois avoir répondu aux questions qui ont été posées. S'agissant du TGV, la rocade est un projet SNCF...

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