Nous transmettons nos meilleurs voeux de rétablissement à Michel Berson, rapporteur spécial. Je vous présente les crédits de la recherche en son nom.
Ils diminuent en 2016, à périmètre constant, de 3,3 % sur les autorisations d'engagement, à 10,6 milliards d'euros ; et de 1,1 % sur les crédits de paiement, 10,9 milliards d'euros. À périmètre courant, les crédits de paiement augmentent de 1,8 % en raison du rattachement au programme 190 de 321 millions d'euros destinés à financer une partie du démantèlement des installations nucléaires du Commissariat à l'énergie atomique (CEA). Le financement de ces opérations était jusqu'ici partiellement assuré par la revente de titres Areva par le CEA à l'État et transitait par le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
Selon Michel Berson, la préservation des crédits affichée par le Gouvernement doit être saluée et relativisée. La part des programmes « Recherche » dans le PIB a connu, hors PIA, une diminution de 6 % de 2011 à 2014. La dynamique des dépenses de fonctionnement et de personnel menace la capacité d'investissement de certains organismes, affectés en cours de gestion par les surgels. Les crédits alloués à la recherche dans les contrats de projet État-région diminuent.
La baisse de 119 millions d'euros du budget de la recherche, votée en seconde délibération, n'est selon Michel Berson acceptable ni sur le fond, si sur la forme. Elle porte essentiellement sur les programmes « Recherche » et plus particulièrement sur le programme 193 « Recherche spatiale » qui voit ses crédits réduits de près de 5 %. La contribution française à l'Agence spatiale européenne (ESA) va devoir être réduite, augmentant la dette de financement dont la France devra tôt ou tard s'acquitter. Ces diminutions sur les programmes « Recherche » s'accompagnent d'une augmentation de 100 millions d'euros sur les programmes « Enseignement supérieur ». Depuis plusieurs années, les crédits alloués à la recherche servent de variable d'ajustement aux augmentations décidées dans d'autres domaines. Ce « coup de rabot » remet en cause la sanctuarisation des crédits de la recherche. C'est pourquoi Michel Berson propose de rétablir les 119 millions d'euros supprimés.
La baisse des crédits et des taux de succès des appels à projet de l'Agence nationale de la recherche (ANR) se poursuit. En 2016, les crédits d'intervention de l'ANR devraient passer de 575,1 millions d'euros en 2015 à 555 millions d'euros en 2016, avec une érosion progressive du taux de projets financés, amplifiée par l'augmentation du nombre de projets soumis. Le taux de succès est tombé à 10 %, ce qui est peu incitatif pour les équipes de recherche. Une certaine résignation les gagne. Elles essuient des refus sans recevoir de critique claire sur le fond de leurs projets.
Le développement des ressources propres des organismes de recherche, qui passe en partie par des financements par projet, exige une facturation à coûts complets et des préciputs réalistes. Le préciput reste fixé à 11 %, loin du taux de 25 % des programmes européens « Horizon 2020 » qui devrait être la référence. Le préciput de l'ANR devait passer de 11 % à 15 % mais le règlement financier de l'agence ne prévoit aucune évolution sur ce point. De même, la règle demeure la facturation à coût marginal et non à coût complet ; le paiement de la prestation ne recouvre alors que l'exact surcoût lié au programme, sans quote-part pour les charges de personnel permanent. On le voit, les organismes de recherche ne trouveront pas dans ces ressources propres beaucoup de marges de manoeuvre. Ce problème, grave pour certains opérateurs, n'a que deux solutions : ou bien l'État augmente le préciput et généralise la facturation à coûts complets, ou bien il renonce à promouvoir les ressources propres.
La situation de l'emploi scientifique est préoccupante et appelle des mesures fiscales ciblées. Dans le secteur public, face à la baisse des départs à la retraite, certains organismes de recherche ne disposent d'aucune marge de manoeuvre. La baisse du nombre de départs réduit mécaniquement le nombre d'embauches de chercheurs, d'ingénieurs et techniciens. Les remplacements de ces départs se font du reste rarement à un taux de un pour un, en raison des contraintes budgétaires fortes qui pèsent sur les opérateurs.
Dans le secteur privé, la modulation actuelle de l'assiette du CIR en faveur de l'embauche de jeunes docteurs n'aplanit guère les difficultés. Le nombre de docteurs recrutés en entreprise reste faible. Michel Berson présentera un amendement au projet de loi de finances rectificative, afin de conditionner l'application du seuil de 5 % à l'embauche de docteurs ou à un effectif important de docteurs au sein du personnel de recherche salarié. Le taux de mise en réserve, d'une importance cruciale puisque la plus grande partie des crédits gelés sont annulés, diffère selon le ministère de rattachement de l'organisme de recherche. Ainsi, un même opérateur financé par plusieurs programmes relevant de ministères différents peut connaître plusieurs taux de mise en réserve pour ses différentes subventions. Le taux de mise en réserve devrait pourtant être modulé au regard des contraintes effectives des opérateurs et non selon un critère formel, qui dépend du hasard et de l'histoire de l'organisme de recherche. On touche là aux limites de la logique par mission prévue par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) de 2001 : car les missions budgétaires, correspondant chacune à une politique publique de l'État, ne se sont pas imposées en matière d'arbitrages budgétaires, ceux-ci continuant d'être pris au niveau ministériel. Selon Michel Berson, des travaux devraient être engagés pour constituer un budget unifié de la recherche, sans pour autant rattacher l'ensemble des opérateurs au ministère de la recherche, afin d'autoriser des arbitrages globaux et équitables.
Sous le bénéfice de ces observations, il propose d'adopter les crédits de la mission tels que modifiés par l'amendement qui les rehausse de 119 millions d'euros.