Intervention de Françoise Gatel

Commission des affaires sociales — Réunion du 6 décembre 2016 à 15h15
Proposition de loi relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Françoise GatelFrançoise Gatel :

Je m'associe à mes collègues pour remercier les rapporteurs. La question de l'extension du délit d'entrave est apparue en septembre dernier lors de l'examen du projet de loi Égalité et citoyenneté par la commission spéciale, au détour d'un amendement que le Gouvernement a déposé par voie électronique, sans aucun contact direct avec la commission ni aucune explication. Le Gouvernement a invoqué « un phénomène grave en termes d'atteinte au droit » ainsi que des « conséquences quantitativement importantes ». Je m'interroge sur la découverte spontanée et soudaine de ce phénomène. On pourrait tout aussi bien s'attaquer à des sites contestables relatifs à la vaccination ou à d'autres questions de santé.

Considérer que le travail des assemblées consiste à donner des signaux, c'est porter une atteinte grave à la fonction du Parlement. Nous ne sommes pas des lanceurs d'alerte. Nous sommes des législateurs, censés échapper aux arguments fulgurants qui surgissent en période électorale, aux diabolisations et manipulations comme il s'en est produit en septembre dernier. Nous sommes aussi là pour écrire un droit qui puisse s'exercer, que le juge sera en mesure d'appliquer, ce qui suppose que nous l'écrivions bien.

Le texte tel qu'il nous arrive de l'Assemblée nationale pose un problème de proportionnalité de la peine car on situe les allégations destinées à dissuader le recours à l'IVG dans le champ pénal, alors que ce n'est le cas pour aucune autre forme de liberté d'expression. Les arguments développés par M. Mercier sur le respect de la Constitution et du droit européen ont leur poids.

Je m'interroge aussi sur ce que signifie le fait de dénoncer un délit d'entrave en matière d'information. Ne peut-on pas y voir un aveu du Gouvernement sur son incompétence en matière de communication ou du moins sur l'insuffisance de sa campagne d'information sur l'IVG ? Le droit à l'IVG n'est pas anodin. Il ne va pas sans vulnérabilité, ni fragilité. Si certains sites d'information sont plus efficaces que celui du Gouvernement, pourquoi le ministère ne s'attache-t-il pas les services d'une agence de communication performante ?

Le rapport du Haut Conseil indique que le Gouvernement a attendu 2014 pour mettre en place son numéro vert. La campagne d'information est confiée au planning familial, ce qui implique forcément une inégalité, dans la mesure où les moyens qui sont alloués à celui-ci varient selon les départements. Pourquoi le Gouvernement ne contraint-il pas les ARS à financer des cellules d'appels téléphoniques ?

On a dit que le Sénat avait subi la pression des lobbies sur ce sujet. Je n'ai jamais rencontré un seul de leurs représentants, ni reçu un seul mail. On dit aussi que nous développons des positions confuses, hostiles à l'IVG. Ce n'est pas le cas. La loi est la loi. Et pour reprendre ce que disait Simone Veil en 1974, « il faut faire preuve de beaucoup d'humilité ». Je me contenterai de déposer un amendement contre la diffusion d'informations de nature malveillante.

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