Quoique l'Assemblée nationale ait fait un premier travail autour de ce texte, un problème d'intelligibilité demeure : les députés ont intégré dans une même phrase l'intention des auteurs du délit et les moyens par lesquels ce délit peut être constitué. Or, les règles du droit pénal voudraient que ces deux éléments soient bien distingués. De plus, la rédaction n'atteint pas totalement l'objectif poursuivi. Elle ne prend en compte que les pressions s'exerçant sur les femmes s'informant dans les centres pratiquant des IVG. Mon amendement COM-4 ne change pas la définition du délit - en fait, l'objectif poursuivi ne nécessite que peu de changements à l'actuel article L. 2223-2 - mais il vise « tout moyen » par lequel peuvent s'exercer les pressions morales et psychologiques, afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur le fait que la communication par voie électronique en fait partie. De plus, il précise que les personnes cherchant à s'informer sur l'IVG, notamment sur Internet, peuvent être reconnues victimes de ces pressions. Il ne s'agit donc pas seulement des femmes venant s'informer dans les centres.
L'énumération qui figure dans le texte de l'Assemblée nationale comporte un risque de contradiction ou d'oubli. Je vous propose d'en rester à l'expression « par tout moyen », suffisante pour permettre au juge de faire son travail d'appréciation en s'appuyant si nécessaire sur le compte rendu des débats.
Mon amendement ne change pas les termes dans lesquels la liberté d'expression est aujourd'hui conciliée avec l'infraction. L'objet du délit ne change pas : il s'agit toujours d'empêcher ou de tenter d'empêcher la réalisation ou l'information sur une IVG. Bref, il propose un texte qui s'en tient aux termes juridiquement nécessaires pour caractériser le délit.
L'amendement COM-1 de Mme Gatel propose une nouvelle rédaction de l'article unique pour créer un régime distinct de mise en cause, dans le cadre de la responsabilité civile, s'agissant de la diffusion ou de la transmission d'allégations trompeuses en matière d'IVG. Nous souhaitons tous trouver une solution afin que le texte atteigne ses objectifs. Cependant, le dispositif proposé pose plusieurs problèmes.
Tout d'abord, il juxtapose deux régimes distincts pour des faits similaires d'entrave à l'information. L'article L. 2223-2 prévoit déjà une sanction pénale en cas de pressions morales et psychologiques exercées dans un but dissuasif sur les femmes cherchant à s'informer sur l'IVG dans les établissements concernés. On ne peut faire coexister deux dispositifs pour des faits aussi proches, car des personnes mises en cause pourraient être poursuivies sur les deux chefs d'accusation. D'ailleurs, la peine prévue par l'article L. 2223-2 est, comme toutes les peines pénales, une peine maximale qui est toujours modulée par le juge en fonction de la gravité des faits.
De plus, la formulation de l'amendement pose problème car la référence à l'intention malveillante n'est pas suffisamment définie. Les auteurs des allégations présenteront toujours celles-ci comme favorables aux personnes qui cherchent à s'informer. De même, la précision que les allégations induisent « manifestement » en erreur posera des difficultés d'interprétation. Enfin, les sanctions pourraient être plus importantes que ce que prévoit la proposition de loi : possibilité pour le juge de prescrire toute mesure en urgence, amende de 30 000 euros pour tous les co-responsables. De façon plus générale, le dispositif des amendes civiles n'est pas encore entré en vigueur et fait l'objet de critiques importantes, notamment parce qu'il n'offre pas les mêmes garanties en matière de droit de la défense. Je souhaite donc le retrait de l'amendement.