Je remercie notre présidente pour ce compte rendu tout à fait exhaustif. Pour ma part, je souhaiterais évoquer deux des quatre thèmes évoqués lors de la conférence : la dimension sociale de l'Union économique et monétaire et l'investissement en Europe.
La présidence slovaque avait souhaité débuter la conférence par une session consacrée aux sujets sociaux d'actualité. Je rappelle que l'Union européenne exerce sa compétence en matière sociale sur la base de l'article 153 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) ; les initiatives européennes ont vocation à soutenir et compléter l'action des États membres, conformément au principe de subsidiarité. Il existe un ensemble d'indicateurs de manière à mieux coordonner les politiques sociales mais aussi à empêcher l'aggravation des disparités au sein de l'Europe et plus particulièrement au sein de l'Union économique et monétaire, qui pourraient s'avérer très périlleuses. C'est donc l'objet des réflexions actuelles en Europe : comment mieux coordonner et rapprocher les politiques sociales ?
Il a ainsi été question de la révision de la directive de 1996 sur les travailleurs détachés. Une divergence de points de vue est très rapidement apparue entre les parlementaires des États d'Europe centrale et orientale et des États baltes et ceux des États membres les plus anciens, les premiers considérant que la directive actuellement en vigueur était suffisante et les seconds estimant que la proposition de révision présentée par la Commission européenne en mars 2016 était légitime. Cette proposition suggère notamment de limiter la durée du détachement à deux ans et d'appliquer obligatoirement les conventions collectives aux travailleurs détachés. À l'initiative de la Pologne, de la Roumanie et de la République tchèque, onze parlements nationaux ont adopté un avis motivé dans le cadre de la procédure dite du « carton jaune » car ils considèrent que la proposition ne respecte pas le principe de subsidiarité. La Commission européenne a toutefois décidé de maintenir le texte, ce que l'une de nos collègues hongroises a très vivement critiqué durant la réunion. La discussion n'est pas allée plus loin, notamment en raison du format de la conférence, mais nous avons clairement perçu qu'il existait là un point de blocage conséquent et que la poursuite des négociations sur ce texte, pourtant essentiel, serait difficile. La suggestion de soumettre au vote un relevé de conclusions à l'issue de chaque réunion me semble être un moyen de faire progresser l'Union européenne dans l'association des parlementaires nationaux.
Le deuxième thème que je souhaitais évoquer est le projet de « socle européen de droits sociaux », annoncé par le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker en 2015. La rapporteure du Parlement européen sur ce sujet, Maria Joao Rodrigues, originaire du Portugal, a lancé un appel en faveur de l'adoption d'un « code de convergence » en matière sociale fixant des objectifs cibles qui seraient examinés dans le cadre du semestre européen, et ce afin de montrer aux citoyens que l'Union européenne peut contribuer à garantir une certaine sécurité socio-économique. Par ailleurs, s'agissant de la prise en compte des critères sociaux dans le cadre du semestre européen, et en particulier de la procédure pour déséquilibre macroéconomique, nous avons pris connaissance d'une étude universitaire indiquant que les résultats étaient, à ce jour, peu tangibles.
Ainsi, beaucoup reste à faire pour renforcer la dimension sociale de la zone euro. La conférence a néanmoins confirmé qu'il existait des attentes très fortes en la matière, de la part d'un grand nombre de nos collègues des parlements nationaux et du Parlement européen.
J'en viens à la session consacrée à l'investissement en Europe, à laquelle j'ai activement participé. Nos collègues slovaques, en tant qu'organisateurs de la conférence, ont soulevé la question de la mise en place d'un programme commun d'investissement en tant qu'instrument de stabilisation macroéconomique au sein de la zone euro. Pour la plupart des intervenants, le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS), créé dans le cadre du « plan Juncker », n'est pas suffisant et ne répond pas à la fonction de stabilisation. Il a toutefois le mérite de mobiliser des ressources supplémentaires de la part d'investisseurs privés, conformément à sa finalité. J'ai également rappelé les premiers résultats particulièrement encourageants du plan d'investissement pour les petites et moyennes entreprises (PME). Comme j'ai pu le constaté durant le contrôle budgétaire que j'ai mené au premier semestre 2016, il existe une forte demande pour les instruments financiers de prêt et de garantie en faveur des PME ; en outre, il est à souligner que l'effet de levier observé pour ces instruments est supérieur à 15.
J'ai le plaisir aussi de souligner qu'il a été décidé hier par le Conseil de l'Union européenne de prolonger le FEIS et de faire porter son objectif de 315 à 500 milliards d'euros d'investissement. Il a également été proposé de diversifier la localisation géographique des investissements ainsi que les secteurs susceptibles d'en bénéficier, en intégrant les secteurs de la défense et de la sécurité, ce qui était une revendication française. La cible des investissements contribuant à la lutte contre le changement climatique est quant à elle portée à 40 %. Une ambition nouvelle a été affichée hier, ce dont on peut se réjouir.
En revanche, les divergences concernant l'investissement public sont également apparues lors de la réunion de l'Eurogroupe du 5 décembre. Le souhait de la Commission européenne d'un effort supplémentaire de 0,5 % du produit intérieur brut européen pour dynamiser l'investissement public s'est heurté, une nouvelle fois, à la résistance de l'Allemagne et des Pays-Bas.
Enfin, je rejoins la conclusion de la présidente concernant la nécessité de faire évoluer le format de la conférence de l'article 13 pour laisser plus de place au débat entre parlementaires et aboutir à des conclusions plus affirmées.