Intervention de Alain Milon

Réunion du 7 décembre 2016 à 14h30
Extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Alain MilonAlain Milon :

En effet, comment apporter la preuve irréfutable que la consultation des sites en question est l’élément déclencheur du renoncement au recours à l’IVG ? Au mieux, elle ne peut constituer qu’un élément supplémentaire dans une action en justice, mais je doute que cela n’aboutisse, ou alors nous entrerons dans une dimension très inquiétante de restriction dangereuse de la liberté d’expression.

D’ailleurs, n’existe-t-il pas déjà des instruments juridiques pour réprimer l’abus de faiblesse ou de situation d’ignorance ?

Évidemment, en contrepoint de cette proposition se dresse la liberté d’expression, inscrite à l’article XI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

Madame la ministre, mes chers collègues, lors du vote de la loi Veil, le député catholique Eugène Claudius-Petit, qui ne fit jamais mystère de ses convictions, vota la loi en affirmant, entre autres : « Je lutterai contre tout ce qui conduit à l’avortement, mais je voterai la loi. »

Cette position justifierait-elle aujourd’hui, madame la ministre, la qualification de délit d’entrave ? Nous le constatons bien, à trop vouloir répondre aux questions de société, par définition complexes et transversales, au moyen de mesures spécifiques et parcellaires, on ne résout rien, on ne régule rien, on ne pacifie rien. Or l’une des missions de la loi et du droit est bien justement de réguler et de pacifier les relations sociales. Mais votre texte ne s’inscrit malheureusement pas dans cet objectif.

L’atteinte insidieuse que vous portez à cette liberté publique fondamentale ne risque-t-elle pas d’être le prélude à d’autres coups de boutoir ? Les bons sentiments ne suffisent pas à définir une politique.

Pour l’ensemble de ces raisons, qui tiennent tant au fond qu’à la forme, au degré d’imprécision, source d’insécurité juridique à venir, à la précipitation, qui fait de ce texte un texte de circonstance non abouti, et malgré les efforts louables de Mme la rapporteur, le groupe Les Républicains votera majoritairement contre cette proposition de loi.

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