Intervention de Annick Billon

Réunion du 7 décembre 2016 à 14h30
Généralisation des contrats de ressources — Rejet d'une proposition de résolution

Photo de Annick BillonAnnick Billon :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la présente proposition de résolution invite le Gouvernement à prendre les mesures nécessaires afin de généraliser la pratique, actuellement restreinte, des contrats de ressources.

Ces contrats ont vocation à organiser la captation et la distribution de l’eau potable.

Il s’agit plus précisément de mutualiser les coûts liés à cette activité. Plus simplement, l’idée est de répartir la charge de l’exploitation des nappes phréatiques entre tous les usagers, et non de la faire peser sur les seuls abonnés du syndicat exploitant.

Cela concerne surtout les petites structures, communes ou syndicats.

La préoccupation mentionnée ne concerne pas mon département, la Vendée, qui a pris la sage décision depuis plus de cinquante ans de mettre en œuvre une solidarité territoriale entre les communes bien pourvues en eau brute et celles dont les ressources sont faibles, voire nulles. Ainsi, que l’on habite au pied du barrage ou sur une île, la ressource en eau potable est distribuée en quantité et en qualité pour un prix unique à tous les habitants. Le coût péréqué prend en charge l’ensemble des charges mutualisées. À ce titre, la Vendée à travers son syndicat départemental Vendée Eau fait souvent office de référence nationale.

Je prendrai un exemple concret : pour notre périmètre de la nappe du Dogger, le cas est assez simple, l’irrigation étant quasiment le seul usage. Sur les réserves appartenant au syndicat mixte Vendée Sèvre Autise, ce sont bien les usagers, c’est-à-dire les irrigants, qui financent les soldes après subvention par une redevance au prorata de leur volume.

L’outil de gestion existe déjà et est proposé par l’agence de l’eau sous forme de contrat territorial de gestion quantitative. Sur un autre secteur, cet outil est doublé avec un contrat territorial eau potable, porté par un syndicat d’eau. Les deux structures se coordonnent et les contrats se complètent et se croisent, sous la coordination de l’agence de l’eau.

La proposition de résolution vise donc à généraliser une solution technique qui ne profiterait pas à tous les départements. Pour autant, sa généralisation dans les départements organisés différemment du mien se justifie-t-elle ?

Je considère comme vous, chers collègues, que l’eau est un bien commun et que sa gestion « doit être guidée par les impératifs de cohérence, d’équité et d’efficacité ».

Cependant, cette proposition de résolution soulève plusieurs remarques d’ordre technique.

Premier point, la répartition de la propriété des volumes d’eau pose problème. Elle peut être bloquante en termes de motivation des collectivités à s’investir depuis la mise en place des organismes uniques, qui sont en charge de la gestion et de la répartition des volumes d’eau prélevés à usage agricole.

La structure « gemapienne », chargée des milieux aquatiques, est bien l’investisseur, mais les volumes d’eau appartiennent aux organismes uniques et sont ventilés directement aux irrigants. Cette dissociation du contenu et du contenant est un vrai problème puisque les collectivités qui investissent pour protéger les milieux n’ont, une fois l’ouvrage réalisé, plus aucune emprise ni sur la répartition équitable des volumes entre tous ni sur la gestion des prélèvements en fonction des incidences sur le milieu, par exemple en période de sécheresse.

Si l’on veut que le système d’une gestion collective fonctionne, il faut que la collectivité qui œuvre soit bénéficiaire unique de l’attribution du volume, comme dans le cas d’un barrage d’eau potable, où c’est bien le syndicat d’eau qui bénéficie du volume et non chacun des usagers.

Avant de s’engager sur de nouveaux contrats, il serait peut-être souhaitable de résoudre les incompatibilités entre organisme unique et collectivité à compétence GEMAPI.

Deuxième point, la gestion quantitative se fait par rapport à différents usages divisés en trois grandes lignes : industrie, eau potable, irrigation. La compétence qualité sera aussi divisée entre assainissement, restauration des milieux, industrie et agriculture. La compétence GEMAPI ne portent ni sur l’industrie, ni sur l’eau potable, ni sur l’assainissement. La coordination ne se fera donc pas au niveau des EPCI ou des regroupements, mais s’opérera au niveau des SAGE qui essaient de fixer un consensus entre tous, sachant que les objectifs de chaque usage ne sont pas les mêmes. Par exemple, sur mon territoire, pour le volet qualitatif, l’objectif de teneur en nitrates est indifférent pour l’irrigation, de 50 milligrammes par litre pour l’eau potable et de 25 milligrammes par litre pour le milieu.

Les efforts à réaliser n’étant pas partagés et n’étant pas les mêmes pour tous, il importe de savoir sur quelle base mutualiser les coûts.

Troisième et dernier point, la logique de solidarité entre amont et aval, prônée par le texte, existe déjà dans le cadre des SAGE, les schémas d’aménagement et de gestion des eaux, mais aussi de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, qui préconise le regroupement des EPCI au sein de syndicats mixtes de bassins versants, avec deux niveaux : les établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau, ou EPAGE, et les établissements publics territoriaux de bassin, ou EPTB.

On peine donc à savoir où veulent en venir les auteurs de ce texte, qui expriment à la fois le principe de libre administration des collectivités tout en suggérant que le législateur puisse assujettir ces dernières à des obligations et à des charges.

Il faut donc veiller à ce que ces contrats soient encouragés et non imposés, et à ce que les communes qui s’y engagent le fassent sur la base du volontariat.

Certes, l’idée de base des contrats de ressources est séduisante, mais l’exposé des motifs demeure bien vague à propos du financement visé. S’agit-il du monde agricole, de l’aquataxe, des industriels ?

Enfin, il importe de savoir ce que deviennent les nombreux autres outils en place.

En conclusion, bien que ce texte parte d’une intention louable, l’absence de clarté du dispositif et de ses modalités de mise en œuvre conduira le groupe UDI-UC à exprimer des votes divers. En l’état, cette proposition de résolution ne permet pas d’expliquer efficacement comment atteindre une véritable péréquation des charges d’exploitation sur tout le territoire.

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