Intervention de François Pillet

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 7 décembre 2016 à 9h05
Proposition de loi relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse — Examen du rapport pour avis

Photo de François PilletFrançois Pillet :

Je voudrais tout d'abord remercier le rapporteur pour avis. Sur un sujet qui soulève des débats de manière récurrente, et qui, même s'il me semblait apaisé, est souvent agité à des fins différentes que la seule liberté des femmes, M. le rapporteur pour avis a su centrer son propos sur une analyse juridique très fine de cette proposition de loi, qu'il a développée au plan constitutionnel comme au plan conventionnel. Sa démonstration me paraît juridiquement très convaincante.

J'aimerais seulement intervenir sur un autre aspect du sujet. Nous avons eu récemment au Sénat des débats sur la liberté d'expression. J'ai le sentiment que ceux qui s'avançaient alors avec le masque de défenseurs de cette liberté le font aujourd'hui tomber.

Lors de l'examen du projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté, nous avons déposé, avec mes collègues Alain Richard et Thani Mohamed Soilihi, des amendements visant à corriger certains dérapages sur Internet. Cette initiative a eu le succès que l'on sait. Un de ces amendements visait à modifier la durée de la prescription pour un article en ligne ; un autre tendait à permettre la requalification par le juge des faits dénoncés par un pauvre hère devant un tribunal. Un dernier avait pour objet de lutter contre les excès d'Internet sur le fondement de la responsabilité civile de droit commun. De ces amendements, on a dit - argument d'une grande qualité juridique -, qu'ils étaient liberticides...

J'ai lu avec beaucoup d'intérêt certains journaux, hier très excessifs dans leur condamnation de ces amendements, aujourd'hui très à l'aise pour considérer que le présent texte ne porte pas atteinte à liberté expression. Les masques tombent.

Le Sénat ne doit pas se laisser donner des leçons en matière de libertés publiques : il en toujours été le défenseur. Je suis stupéfait par ce texte si éloigné de ce qu'on peut attendre d'un texte pénal. Si l'on emprunte cette voie, rien n'empêchera de créer de nouveaux délits d'entrave punissant tous ceux qui luttent sur Internet contre des lois d'intérêt général, tels les adversaires, au mépris de la santé de leurs propres enfants, de toute vaccination obligatoire ... Cela ouvrirait des débats bien plus vastes ! Ce qu'il faudrait obtenir, c'est que les sites étatiques soient référencés avant les autres.

Restons-en à l'avis protecteur des libertés fondamentales de notre rapporteur.

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