Intervention de Nicole Bricq

Délégation sénatoriale aux entreprises — Réunion du 3 novembre 2016 à 8h30
Compte rendu par mme élisabeth lamure du déplacement de la délégation à bruxelles sur le thème de la simplification des normes le 20 octobre 2016

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Je rappelle tout d'abord que le Conseil de simplification pour les entreprises a été formellement créé le 9 janvier 2014. C'était un ministre qui était chargé de ces questions au départ. La composition du Conseil de simplification est mixte, puisqu'il y a des chefs d'entreprise, des parlementaires, des administrateurs et des experts. Il se réunit une fois par mois, sous la coprésidence de Mme Françoise HOLDER, qui est à la tête des boulangeries Paul, et de M. Laurent GRANDGUILLAUME, qui est député de la Côte-d'Or. Depuis peu, le Conseil de simplification s'est doté d'un secrétaire général, en la personne de M. Gérard HUOT, ancien président de la chambre de commerce de l'Essonne. Comme les chambres de commerce ont été régionalisées, il s'est défait de ses fonctions pour se consacrer à cette tâche. Il s'est beaucoup impliqué dans les mesures de simplification, et fait le lien avec les ateliers, qui sont source de propositions, et avec les chefs d'entreprise.

Le Conseil de simplification sélectionne certaines mesures proposées par les ateliers, les transmet à l'exécutif, et tient un tableau de bord pour suivre leur mise en oeuvre. Le Conseil s'adresse essentiellement au secrétaire d'État à la réforme de l'État et à la simplification, qui est rattaché au Premier ministre, ce qui lui donne une force exécutive sans pour autant disposer d'administration en propre. Il doit donc convaincre ses collègues de la nécessité des mesures de simplification. Chaque semestre, le Conseil annonce un train de mesures avec plus ou moins de solennité, un par an étant présenté par le Président de la République. Le Président Hollande a souhaité, début 2014, mettre en place un Conseil stratégique de l'attractivité chargé de veiller sur la capacité du territoire français à attirer des entreprises étrangères : c'est sous sa présidence que le Conseil stratégique de l'attractivité réunit tous les six mois des dirigeants d'entreprises, notamment étrangères et les invite à mesurer les efforts que la France fait dans le domaine de la simplification de la vie des entreprises.

Le train de mesures qui a été récemment adopté par le Conseil de simplification est composé de 48 nouvelles mesures de simplification, qui ne concernent pas toutes les entreprises. Parmi elles, une dizaine de mesures sont propres aux entreprises. Les autres mesures concernent le plus souvent les particuliers, comme le principe du « silence vaut accord ».

Il y a principalement quatre grands types de mesures : des mesures d'information, d'expérimentation, de réglementation et d'application des lois. Une mesure très importante à mes yeux consiste par exemple à informer en une seule fois les entreprises de l'ensemble des démarches à effectuer pour leur installation. Cela est déterminant pour les entreprises étrangères, qui rencontrent de grosses difficultés pour s'installer en France. C'est Business France qui se chargera, à l'échéance de juin 2017, de réunir, avec la coopération des directions des finances publiques, des douanes, de la sécurité sociale, et du travail, les informations nécessaires aux entreprises qui voudront s'installer en France, et qui n'auront dès lors plus besoin de démarcher séparément chacune de ces administrations.

Concernant l'expérimentation, le précédent ministre de l'économie, Emmanuel Macron, a demandé à son secrétaire d'État à la simplification de mener des expérimentations réglementaires. Celles-ci permettent de lever temporairement les barrières réglementaires pour permettre la réalisation de nouveaux projets. Si l'expérimentation est concluante, on propose alors sa généralisation. Un appel à projets a été lancé fin juin, dont les lauréats seront connus fin décembre. Cette pratique très prometteuse, qui est nouvelle en France, est assez répandue dans les autres pays européens.

Les mesures de réglementation, qui visent à renforcer l'attractivité française, sont également très importantes. L'une d'elle intéressera les départements qui se sont spécialisés dans la logistique, notamment ceux qui sont situés autour des grandes voies de communication : il est proposé d'assouplir les règles de conception des entrepôts logistiques pour la prévention des sinistres. L'échéance est prévue pour le premier semestre 2017. Je pense cependant que les Directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) risquent d'opposer une certaine résistance à cette mesure très forte.

Quelques mesures concernent ensuite les textes d'application, qui auraient existé dans tous les cas, mais qui figurent quand même parmi les 48 mesures de simplification. Nous avons par exemple proposé la communication du bulletin de paie par voie électronique. Même si un amendement à la loi travail a ensuite indiqué qu'il n'était pas possible d'emprunter seulement la voie électronique, cette mesure simplifie grandement la vie des entreprises. La loi Rebsamen sur le dialogue social, qui consiste à harmoniser les règles en matière de franchissement du seuil de 300 salariés, est également très utile. Cette loi, qui a été votée en 2015, est aujourd'hui effective. L'organisation par voie électronique des élections professionnelles, malgré les résistances qu'elle a entraînées, est aussi une mesure importante.

Le travail du ministre chargé de la simplification est de harceler ses collègues pour obtenir des résultats. Il est en lien avec le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique, les services du Premier ministre, et quelques fois l'Élysée. Il est arrivé que des résistances de la part de ministres aient été surmontées par l'engagement du Président de la République. Les résistances peuvent aussi provenir de l'administration.

Pour conclure, le Conseil de la simplification a commandé une étude au cabinet Ernst & Young pour chiffrer, à partir des études d'impact du Gouvernement, le gain que les 242 mesures annoncées par le Conseil représentent pour les entreprises : ce gain est de plus de 5 milliards d'euros par an. Parmi les mesures les plus efficaces en termes de gains, le rapport cite l'allègement des obligations d'établissement et de publication des comptes, avec près de 400 millions d'économies annuelles, et le dispositif « marché public simplifié », qui serait synonyme de 5,5 millions d'euros d'économies.

La Déclaration sociale nominative, entièrement dématérialisée, est par ailleurs très importante. Cette mesure, qui se substitue à 24 déclarations sociales, remporte la palme d'or des mesures les plus bénéfiques pour les entreprises en permettant à ces dernières de réaliser 3,7 milliards d'euros d'économies par an. Elle concernera les entreprises du régime général à partir de janvier 2017, et toutes les autres à partir de juillet. Malgré tout, nous sommes loin du dispositif du « one in, one out », pour lequel avait plaidé le ministre Thierry MANDON.

Le Conseil de simplification pousse ainsi les ministres à se soucier de simplification dans les lois qu'ils font voter, et à user d'un droit d'initiative, qu'ils n'utilisent pas assez. Par ailleurs, les débats y sont très faciles, notamment parce qu'y participent des chefs d'entreprises et non les organisations consulaires ou patronales. On peut néanmoins regretter que la mise en oeuvre soit défaillante : des ordonnances, censées être prises, ne le sont jamais. Il faut donc surveiller l'exécution des lois.

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