Nous examinons aujourd'hui le projet de loi autorisant l'approbation d'un accord avec le Tadjikistan relatif à la construction d'une tour de contrôle sur l'aéroport de sa capitale, Douchanbé.
Notre pays entretient des relations diplomatiques avec le Tadjikistan depuis 1992, alors même qu'au lendemain de la dislocation de l'empire soviétique, ce pays était secoué par une guerre civile qui a duré cinq ans. C'est le pays le plus pauvre de la Communauté des États indépendants puisque 40 % de la population vit avec moins de 2 dollars par jour et un million de Tadjiks sur 8,5 millions travaillent en Russie et au Kazakhstan.
Les échanges économiques comme les échanges culturels et techniques sont limités, même si la présence des entreprises françaises progresse. Les relations bilatérales se déploient essentiellement dans le domaine de la coopération militaire. Dans le cadre du soutien apporté par le Tadjikistan à la coalition internationale anti-terroriste après les attentats du 11 septembre 2011, l'aéroport de Douchanbé a accueilli, quasiment gratuitement et sans condition contraignante, entre janvier 2002 et octobre 2014, un détachement aérien français (DETAIR) en appui aux opérations de l'armée française en Afghanistan, lors de l'opération extérieure PAMIR. Un accord relatif aux conditions de déploiement et de stationnement temporaire des forces armées françaises a été ainsi signé, en décembre 2001, dans le cadre de deux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU et des opérations de lutte contre le terrorisme international. Le DETAIR a assuré le transit de 89 000 militaires et a effectué 11 000 missions d'aérotransport et d'appui. Il a également accueilli, entre 2005 et 2007, 3 Mirage 2000 et 3 Mirage F1 CR remplacés par 3 Rafale à partir de mars 2007, ainsi qu'un avion ravitailleur d'octobre 2009 à juillet 2010. Je rappelle que, à l'époque, tous les déplacements des militaires et officiels français passaient par Douchanbé afin de rejoindre Kaboul ou Kandahar.
En contrepartie de cet accueil, la France s'est engagée à prendre en charge la construction d'une nouvelle tour de contrôle au profit des autorités tadjikes. Le ministère de la défense avait déjà financé, à titre de compensation et pour ses propres nécessités opérationnelles, d'importants travaux de rénovation de l'aéroport. Ils ont été effectués par le 25e régiment du Génie de l'Air, pour un montant total de 7,1 millions d'euros afin d'allonger la piste et réhabiliter les parkings de stationnement pour nos avions. En outre, la société Vinci Airports a construit un terminal pour passagers pour un montant total de 49 millions d'euros, la France ayant accordé un prêt gouvernemental de 20 millions d'euros au Tadjikistan. La construction de cette tour de contrôle constitue donc la dernière campagne de travaux de cette coopération dite « de compensation ». Elle est d'autant plus importante que le Tadjikistan est un pays très montagneux, enclavé, sans accès maritime, qui a besoin d'un aéroport international moderne pour favoriser son développement. Les entreprises françaises en tireront également bénéfice, d'autant que le prolongement de la liaison Douchanbé-Francfort jusqu'à Paris, exploitée actuellement par une compagnie privée tadjike, est envisagé. Il serait donc possible d'obtenir une ligne Paris-Francfort-Douchanbé qui pourrait faciliter le déploiement de nos entreprises.
Le présent accord a donc pour objet de régir les conditions de mise en oeuvre de la construction de cette tour de contrôle, ainsi que le statut du personnel des forces armées françaises et du personnel civil français au Tadjikistan pendant la durée de l'opération. Les travaux de construction devraient durer 15 mois et débuteraient courant 2016 pour s'achever en principe en 2018. Le montant total des dépenses engagées pour la phase de conception s'élève déjà à 259 000 euros. Le montant total prévisionnel des travaux et prestations s'élève à 5,7 millions d'euros, auquel s'ajoutent marginalement 42 400 euros pour la phase « Garantie de parfait achèvement ».
Les agents publics civils et militaires de la partie française ne travailleront sur ce projet qu'au titre de la maîtrise d'oeuvre et de la conduite d'opération. Un officier et un sous-officier du Service d'infrastructure de l'armée seront sur place pour suivre les travaux, et des missions ponctuelles de la Direction générale de l'Aviation civile et du Service national des infrastructures portuaires s'y rendront pour des visites de contrôle ou en cas de difficulté. Cet accord offre des facilités, des exonérations ainsi que des garanties procédurales et juridictionnelles aux personnels des forces armées françaises et aux personnels civils, par un renvoi au statut des personnels administratif et technique des missions diplomatiques de la convention de Vienne du 18 avril 1961.
Les appels d'offres n'ont pas encore été lancés. Les entreprises françaises, dont certaines sont bien placées, peuvent espérer décrocher des marchés intéressants. Je pense ici à Thalès qui pourrait éventuellement fournir des équipements pour cette tour de contrôle et pour d'autres aéroports du pays, tandis que l'École nationale de l'aviation civile pourrait, elle, participer à la formation des contrôleurs aériens. L'agence japonaise de coopération internationale (JICA) est également très bien positionnée avec une proposition de financement de plusieurs millions de dollars pour l'achat d'équipements et des formations de personnel.
À Dakar jusqu'à cette nuit dans le cadre du sommet de la Paix et de la Sécurité, j'ai pu constater que les Japonais sont devenus des partenaires essentiels dans le cadre de l'aide au développement, aussi bien sur le G5 du Sahel que sur cette partie de l'Afrique.
Sur le plan commercial, plusieurs marchés sont en cours avec des entreprises françaises comme Airbus et ATR (Avions de transport régional). Cet accord conclu pour la durée de l'opération prendra fin au terme de la garantie de parfait achèvement, soit vers décembre 2019.
En conclusion, je recommande l'adoption de ce projet de loi pour permettre une ratification rapide de cet accord. En effet, si la relation avec le Tadjikistan est excellente, le mécontentement croît quant à la lenteur de notre procédure car ce pays a ratifié cet accord seulement trois mois après sa signature en juillet 2015. La construction rapide de cette tour de contrôle sur l'aéroport de Douchanbé est donc essentielle pour la crédibilité de la parole de la France et la bonne poursuite de nos relations bilatérales.
L'examen en séance publique devrait avoir lieu le mercredi 21 décembre 2016, selon la procédure simplifiée, ce à quoi je souscris.