Intervention de Gérard Larcher

Réunion du 20 décembre 2016 à 14h30
Éloge funèbre de louis pinton sénateur de l'indre

Photo de Gérard LarcherGérard Larcher, président :

Vous vous souvenez de la stupeur qui nous a saisis, le 17 novembre dernier, lorsque nous avons appris la disparition brutale de notre collègue Louis Pinton, à l’ouverture de la séance de questions d’actualité au Gouvernement.

Avec Louis Pinton, c’est une figure majeure de la vie politique de l’Indre au cours de ces dernières décennies et un sénateur de la République estimé de tous qui nous a quittés.

C’est au nom du Sénat que j’ai prononcé, le 24 novembre, l’éloge de Louis Pinton en l’église Saint-André de Châteauroux, où nous lui avons rendu hommage en présence de plusieurs d’entre vous : Mme la présidente Jacqueline Gourault, nos collègues Catherine Deroche, Rémy Pointereau, Éric Doligé et, bien sûr, le sénateur de l’Indre, Jean-François Mayet, ainsi que Mme Frédérique Gerbaud, suppléante de Louis Pinton, qui nous a désormais rejoints dans cet hémicycle.

Cet adieu émouvant au milieu des siens, au milieu de très nombreux maires en écharpe, au côté de son successeur au conseil départemental et de ses collègues conseillers départementaux, dans cette terre de l’Indre, au cœur du Berry, qui lui était si chère et qu’il avait si fidèlement servie, devait trouver son écho au palais du Luxembourg. C’est ce qui nous réunit cet après-midi.

Louis Pinton était particulièrement attaché au Sénat de la République, où il avait succédé le 22 novembre 2007 à Daniel Bernardet. Il croyait profondément au rôle de notre assemblée, au point de renoncer en janvier dernier à la présidence du conseil départemental de l’Indre, à laquelle il s’était dévoué sans compter depuis 1998.

Né à Bonnat, dans la Creuse, où il repose désormais, Louis Pinton avait accompli ses études secondaires aux lycées de Guéret et de Périgueux et au collège Sainte-Barbe à Paris, avant de se former, pour accomplir sa vocation de vétérinaire, à l’École nationale vétérinaire de Toulouse. Il commença à exercer en milieu rural à Argenton-sur-Creuse en 1974, avant de s’installer en 1980 à Orsennes, dans ce département de l’Indre qu’il n’allait plus quitter. Moins de trois ans plus tard, Louis Pinton devint maire d’Orsennes, fonction qu’il occupera durant trois mandats successifs.

C’est en 1998 que Louis Pinton, qui avait été élu conseiller général en 1992, a succédé à la tête de l’assemblée départementale à Daniel Bernardet, qu’il avait connu dès les années 1970, qui fut en quelque sorte son guide en politique et auquel le liait une profonde amitié.

Louis Pinton, comme Daniel Bernardet, était profondément lié aux élus locaux et à son territoire. Il avait conservé de l’exercice de sa profession de vétérinaire en milieu rural un sens du contact et une parfaite connaissance des territoires, dont il porta ici la parole avec force. Il se voulait d’abord homme de terroir, ce qui n’excluait en rien la force de ses convictions.

Il préférait la sincérité vraie entre les hommes et les femmes et savait écouter, sa courtoisie et sa discrétion allant de pair avec une autorité naturelle qu’il mettait au service de ses mandats pour les accomplir avec rigueur.

Louis Pinton présida durant dix-huit ans aux destinées du conseil général, puis du conseil départemental, avec bon sens et rigueur, ce qui passait par une gestion des deniers publics à la fois exigeante et généreuse. Il fit ainsi de l’Indre – ce qui n’est pas rien en ces périodes difficiles – le département le moins endetté de France, cette maîtrise de la dépense publique n’empêchant pas une politique d’investissements dynamique dans le domaine des transports, de l’éducation, de l’environnement ou du numérique.

Louis Pinton voulait faire de l’Indre un département attractif, au cœur de ce Berry qui constitue l’un des plus vieux terroirs agricoles de notre pays.

L’Indre s’est aussi fixé pour objectif, sous sa direction, une politique sociale active à laquelle il était particulièrement attaché. J’ai eu ainsi le bonheur d’inaugurer à ses côtés, le 18 septembre 2015, après une très belle assemblée générale des maires, une réalisation originale du département qui illustre l’attachement de Louis Pinton à la réinsertion sociale et sa générosité : la « ferme thérapeutique » de l’établissement public départemental Blanche-de-Fontarce a pour vocation l’accueil de jeunes adultes rencontrant des difficultés sociales et psychologiques. Ce fut un moment particulièrement chaleureux et très personnel, dont je me souviens avec émotion. Par les témoignages reçus encore très récemment, qu’ils émanent des accueillants et des accueillis, je sais que cette émotion a été partagée.

Lorsqu’il prit l’initiative, en janvier, d’anticiper l’application de la loi sur l’exercice des mandats en décidant de quitter la présidence du conseil départemental, Louis Pinton pouvait légitimement dresser un vrai bilan de son action à la tête du département de l’Indre.

Louis Pinton était depuis neuf ans notre collègue. Il fut, depuis 2007, un de ces élus qui font la richesse du Sénat, défenseur infatigable et vigilant des intérêts de son département et du territoire, tout en exprimant toujours avec conviction et détermination sa vision des sujets engageant l’avenir de notre pays. Je le revois ici, au haut de cet hémicycle, au côté de Jean-François Mayet, légèrement penché, le regard attentif, le cheveu blanc en brosse, suivant avec attention nos débats. Lui, le réservé, s’exclamait parfois, et sa voix portait, quand il entendait ce qui lui paraissait le contraire de la vérité, parce que, son exigence, c’était la vérité !

Membre du groupe Les Républicains, Louis Pinton participa, tout au long de son mandat sénatorial, aux travaux de la commission des affaires sociales qu’il éclairait de ses compétences d’élu de terrain. Il était aussi membre de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation et participait en connaisseur aux travaux du groupe d’études Élevage.

La pondération de Louis Pinton n’empêchait pas la force dans l’expression de ses convictions, lorsqu’il l’estimait nécessaire. Je me souviens – notre collègue Bruno Retailleau était présent – de sa position vigoureuse lors du débat récent sur la déchéance de nationalité qu’il considérait « comme un débat stérile qui détourne l’attention du seul objectif valable dans les circonstances actuelles, à savoir la lutte intensive contre le terrorisme ». Les événements d’hier nous invitent à méditer ces propos.

Mes chers collègues, Louis Pinton a consacré l’essentiel de sa vie publique à ses mandats d’élu local et de parlementaire. Il était un élu exemplaire et une personnalité très attachante.

Il y a quelques semaines, je l’avais chargé d’une mission sur les modes de gestion des collectivités territoriales en ces temps de « rareté » financière, appelés à durer. Notre métier commun de vétérinaire nous avait construit un mode de raisonnement : l’observation pour poser un diagnostic, l’analyse pour formuler un pronostic, la décision pour engager un traitement. Ces « vertus » ne sont pas inutiles dans la vie publique !

Louis Pinton avait une grande sensibilité cachée sous une « carapace » parfois un peu rugueuse. Il était, au fond, un humaniste.

À nos collègues du groupe Les Républicains et à ceux de la commission des affaires sociales, j’exprime à nouveau, au nom du Sénat, toute notre sympathie.

Je souhaite aussi redire à sa famille, à ses enfants, à Jean-François Mayet, à Frédérique Gerbaud, qui nous rejoint dans cet hémicycle où nous avons vu siéger son père François, et à tous leurs proches les condoléances très sincères de chacun des membres du Sénat de la République, ainsi que la part personnelle que je prends à leur peine.

La mémoire de Louis Pinton restera vivante.

Avant de donner la parole à M. André Vallini, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, je tiens à saluer la présence à ses côtés de M. Michel Sapin, ministre de l’économie et des finances, qui n’est pas étranger au département de l’Indre.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

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