Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les décisions en matière d’infrastructures de transport ne sont pas aisées, notamment lorsqu’il s’agit d’engager de grands chantiers, nécessairement coûteux. Mais une fois son opportunité établie, le projet arrêté doit suivre son cours.
Depuis 1974, l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle connaît une forte croissance de son trafic. Devenu le deuxième aéroport d’Europe, près de 65 millions de passagers y ont transité en 2015. Avec l’aéroport d’Orly, il constitue la porte d’entrée vers d’autres destinations françaises.
Outre les retombées économiques engendrées par l’implantation d’entreprises étrangères, l’aéroport de Roissy Charles-de-Gaulle revêt dès lors un caractère stratégique, la France demeurant en 2015 le pays le plus visité au monde. Cette année-là, le tourisme représentait 7, 3 % de notre PIB.
Paris s’étant portée candidate à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et de l’Exposition universelle de 2025, il est impératif d’anticiper la gestion des flux, alors que les transports publics de la région capitale sont déjà saturés.
Aussi, le présent projet de loi ne prétendait pas engager un nouveau débat sur l’opportunité de la future liaison ferroviaire Charles-de-Gaulle Express qui doit relier la gare de l’Est à l’aéroport de Roissy en vingt minutes, toutes les quinze minutes, ce gain de temps et de fiabilité étant considérable.
Il est désormais urgent de fixer le cadre juridique visant à relancer, enfin, la création de cette ligne, dont l’entrée en service est prévue pour 2023. Tel est l’objet du présent projet de loi, que nous examinons une nouvelle fois.
Toutefois rien n’empêche, pendant le temps long de la construction, d’améliorer l’information des usagers, qui est loin d’être suffisante pour des personnes n’ayant jamais pris la ligne B du RER.
Report modal vers le transport ferroviaire, meilleure image de la capitale, confort accru et, surtout, une gestion des flux plus rationnelle, dans un contexte de hausse permanente de la fréquentation de la ligne B du RER : je ne reviendrai pas sur les bénéfices de ce projet, qui ont longuement été débattus.
En première lecture, nous avons regretté l’existence d’une équation à deux inconnues.
Ces deux écueils persistent ou, du moins, les problématiques n’ont pas été totalement résolues. Je veux parler, d’une part, de l’impact de la mise en service de la nouvelle ligne sur les usagers des trains du quotidien et, d’autre part, du financement, que la commission chargée de l’enquête publique a qualifié de « lacunaire ».
S’agissant de la coexistence de deux usages différents sur un même tronçon de la ligne CDG Express, il faut comprendre les craintes rationnelles des usagers de la ligne B du RER.
Aujourd’hui, 870 000 personnes fréquentent quotidiennement cette ligne, et nous connaissons bien les nombreux incidents – quasi quotidiens – survenant toute l’année. Ils sont le résultat direct du sous-investissement chronique, dont les conséquences ont été désastreuses pour notre réseau ferroviaire depuis plus de 30 ans.
En outre, le prix du billet fixé à 24 euros pour un aller simple risque d’être dissuasif, et constitue une réelle préoccupation. Pour une famille, notons-le, il pourrait demeurer plus économique de prendre un taxi. Pour les plus patients, il leur suffirait de payer 10 euros par personne avec la ligne de RER B.
Cela pose donc le problème, à la fois, des effets réels du Charles-de-Gaulle Express sur le désengorgement de la ligne B du RER et du modèle économique de l’exploitation, bien qu’il soit considéré comme rentable.
Comment rendre ce projet plus acceptable ?
Premièrement, il faut s’engager financièrement et durablement dans l’investissement des trains du quotidien, partout en France, mais aussi, et surtout, en région parisienne. C’est une priorité revendiquée par le Gouvernement.
Deuxièmement, il faut être le plus clair possible sur le financement.
Le projet de loi tend à créer une dérogation à la fameuse règle d’or instaurée lors de la réforme de 2014 et visant à maîtriser la dette du gestionnaire du réseau ferré national, qui s’élève à plus de 40 milliards d’euros. Le Sénat s’est vivement inquiété de cette mesure très contestable, adoptée au prétexte que le projet serait rentable.
Le Gouvernement semble avoir entendu une partie de ces préoccupations, notamment celles qui ont été exprimées par les compagnies aériennes, opposées à la taxe sur les billets d’avion de 1, 40 euro – auparavant 1 euro – qui a été repoussée à 2024.
Des précisions ont été apportées quant à la répartition du capital de la société de projet : aux 400 millions d’euros prévus pour SNCF Réseau et Aéroports de Paris s’ajoutent désormais 100 millions d’euros d’avances remboursables de la part de ce dernier. Il aurait été souhaitable de connaître, à ce stade, la participation non confirmée, mais néanmoins décisive, de la Caisse des dépôts et consignations.
Mes chers collègues, sans vouloir donner un blanc-seing et conscient, je viens de le dire, des difficultés qu’il reste à surmonter, le groupe du RDSE votera les conclusions de la commission mixte paritaire et permettra ainsi l’adoption de ce projet de loi, très attendu pour le territoire francilien.