Intervention de Jean-Vincent Placé

Réunion du 10 janvier 2017 à 14h30
Autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes — Discussion en troisième lecture et adoption définitive d'une proposition de loi et d'une proposition de loi organique dans les textes de la commission

Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous examinons aujourd’hui en troisième lecture la proposition de loi organique et la proposition de loi, déposées par les sénateurs Marie-Hélène Des Esgaulx, Jean-Léonce Dupont et Jacques Mézard, qui visent à instaurer un statut unique pour les autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes.

Nous avons eu, depuis plusieurs mois, de longs et passionnants débats sur les propositions issues du travail d’une commission sénatoriale. Et nous avons depuis lors fait un long chemin, qui a, je crois, permis d’entendre les différentes positions, et qui a surtout permis de trouver des conciliations prenant en compte des positions différentes, mais pas forcément opposées.

On le sait, le problème est loin d’être simple. Il avait déjà été soulevé par plusieurs rapports parlementaires. La commission d’enquête du Sénat, qui a précédé ces propositions, concluait : « La prolifération de ces autorités contribue de plus en plus fortement à l’illisibilité et au dysfonctionnement du système institutionnel, alors même que la volonté de simplification administrative doit constituer une ardente obligation, afin de redonner tout son sens et son efficacité à l’action publique. »

Cette conclusion sur la nécessité de simplifier et d’apporter une lisibilité est largement partagée sur les bancs du Parlement, et le débat autour de la création d’un statut général est un débat ancien et récurrent. L’initiative sénatoriale ne pouvait donc que susciter l’intérêt.

Il est vrai que, depuis la création en 1978 de la CNIL, la Commission nationale de l'informatique et des libertés, première autorité administrative indépendante, bien d’autres ont été créées, dans des domaines divers, avec des finalités diverses, et avec des modes de fonctionnement également très divers. Je me dois cependant de souligner que la création de ces autorités a répondu à des problématiques d’intérêt général, avec notamment l’objectif d’assurer de nécessaires régulations dans des secteurs où c’était indispensable et où ce type d’autorités constitue une réponse adaptée. Il est important de ne pas l’oublier.

Si la volonté de simplifier ne peut qu’être partagée, notamment par le secrétaire d’État en charge de la simplification, les difficultés apparaissent dès lors que l’on s’intéresse aux dispositions qui composeraient ce statut, puisqu’il s’adresse à des autorités fort différentes.

Je pense par exemple aux garanties offertes en matière de déontologie et d’indépendance ou à la rationalisation des modes de fonctionnement. Autant de questions sur lesquelles le Gouvernement avait d’ailleurs engagé un travail depuis plusieurs années, comme le processus de mise en commun de certaines fonctions supports des services du Premier ministre et des AAI visant à réduire les coûts et à développer un mode de fonctionnement collaboratif entre les services ou la mise en place par diverses lois de règles communes.

Les propositions de loi que nous examinons aujourd’hui visent à aller au-delà, en créant une liste limitative des autorités reconnues en tant qu’autorités administratives indépendantes, et en précisant les modes de fonctionnement et de nomination, mais également les modalités de contrôle et en unifiant le statut de leurs membres.

Le texte, tel qu’il a été présenté en première lecture au Sénat, a largement évolué. Les amendements, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, ont contribué à modifier, préciser, voire réévaluer certaines dispositions. Je veux d’ailleurs souligner, au-delà de nos divergences de vues sur certains points, la qualité du travail réalisé tant par les sénateurs que par les députés, notamment par les rapporteurs de ces textes. La tâche n’était pas simple !

La position du Gouvernement a d’ailleurs également évolué, puisque, dans sa version initiale, le texte n’avait pu recevoir notre assentiment. En effet, il n’allait pas dans le sens du travail gouvernemental très important engagé sur les AAI et pouvait même présenter des dispositions allant à l’encontre de décisions récentes prises par le législateur ou le Gouvernement, ou soulevant de réelles questions de constitutionnalité.

Je ne puis que constater, avec la plus grande satisfaction, que le texte que nous examinons aujourd’hui a pris en compte nombre des remarques formulées par le Gouvernement et a révisé des dispositions qui apparaissaient problématiques. De même, des équilibres ont été trouvés entre les assemblées, notamment sur la liste, les règles de fonctionnement, de déontologie et les incompatibilités.

Les rapporteurs ont très bien travaillé, et je souscris à nombre des compromis qui ont été trouvés.

Permettez-moi cependant d’exprimer quelques regrets sur des dispositions qui risquent d’être pénalisantes pour certaines de ces AAI. Je pense notamment aux règles d’incompatibilité avec des activités professionnelles, qui mettent en difficulté les recrutements dans les AAI relevant d’une technicité très importante. En effet, une trop grande restriction en amont et en aval de l’exercice de leurs membres engendrera de la complexité dans des secteurs où les experts et les talents viennent parfois à manquer. Je pense aussi à certaines autorités qui n’ont pas été intégrées dans la liste des autorités administratives indépendantes et qui semblaient pourtant répondre aux critères arrêtés par ce texte.

Toutefois, l’équilibre est parfois complexe à trouver, et le compromis est un signe de la bonne santé de notre démocratie.

En conclusion, je vous remercie une nouvelle fois, mesdames, messieurs les sénateurs, du travail de très grande qualité que vous avez réalisé sur ces textes et j’exprime, au nom du Gouvernement, un sentiment favorable à leur égard.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion