Intervention de Marie-Hélène Des Esgaulx

Réunion du 10 janvier 2017 à 14h30
Autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes — Discussion en troisième lecture et adoption définitive d'une proposition de loi et d'une proposition de loi organique dans les textes de la commission

Photo de Marie-Hélène Des EsgaulxMarie-Hélène Des Esgaulx :

Il faut parfois le dire, mes chers collègues !

Je tiens également à saluer la volonté de rapprochement de notre collègue député, Jean-Luc Warsmann, rapporteur de l’Assemblée nationale, qui a grandement contribué à ce résultat final. Nous avons ainsi démontré que les deux chambres du Parlement pouvaient travailler ensemble de manière exemplaire.

Sur le fond, le rapporteur nous a présenté le dispositif, très équilibré, auquel nous sommes parvenus, mais j’insisterai sur trois points, qui m’ont tenu particulièrement à cœur tout au long de ce parcours législatif.

Tout d’abord, l’Assemblée nationale a adopté sans modification, dès la première lecture, l’article 1er de la proposition de loi organique, qui prévoit que la création d’une autorité administrative ou publique indépendante relève de la compétence exclusive du législateur. C’est un point essentiel. Le Parlement devra donc expressément consentir à la création d’une telle structure, et cela ne pourra plus être fait par assimilation successive ou « à l’insu de son plein gré »…

S’agissant du sort à réserver aux quarante-deux autorités existantes, les débats successifs aboutissent, finalement, à vingt-six – notre proposition de loi initiale n’en retenait que vingt –, en se fondant sur des critères d’indépendance bien identifiés, à savoir l’existence d’un pouvoir normatif, de régulation ou de sanction qui soit effectif.

Bien sûr, j’ai personnellement quelques interrogations sur les adjonctions opérées en séance publique, car les critères d’indépendance ne paraissent pas totalement remplis par certaines autorités. Je suis en total accord avec Jacques Mézard : je regrette qu’un critère de « visibilité », sans véritable contenu juridique, ait pu justifier la reconnaissance du Médiateur national de l’énergie – ce n’est pas raisonnable – ou le maintien de la Commission nationale du débat public.

N’oublions pas que la prolifération de ces « objets juridiques non identifiés », comme les qualifiait excellemment le doyen Gélard dans son rapport d’information publié en juin 2014, entraîne un délitement de l’État et nuit à la lisibilité de l’action publique.

J'en viens au deuxième point que je souhaite aborder. L’accord, auquel les deux assemblées sont parvenues sur les dispositions du statut général des autorités administratives ou publiques indépendantes, assure un corpus de règles garantissant l’indépendance de leurs membres et favorisant une diversification bienvenue de leur profil. Il conforte également les règles déontologiques, qui sont dorénavant exigeantes, notamment en ce qui concerne le contrôle renforcé sur les obligations déclaratives des membres et les limitations de leurs activités professionnelles, y compris après la cessation de leur mandat.

Le dispositif, tel qu’il a été adopté, permet le recrutement de membres hautement qualifiés – praticiens ou experts des secteurs économiques qu’ils doivent réguler –, tout en prévenant d’éventuels conflits d’intérêts.

Troisième point, le texte qui est soumis aujourd’hui à notre vote permet un contrôle parlementaire renforcé des autorités administratives ou publiques indépendantes.

En soumettant les nominations aux fonctions de président à la procédure prévue au dernier alinéa de l’article 13 de la Constitution, ce contrôle pourra s’effectuer de manière plus intense. En effet, le Sénat, après avoir souhaité que l’ensemble des autorités relève de cette procédure, s’est rallié à la position de l’Assemblée nationale, qui privilégie une stricte interprétation de cet article 13, qui n’évoque que les fonctions revêtant « une importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation ».

Finalement, sur les vingt-six autorités administratives ou publiques indépendantes qui sont qualifiées comme telles par la loi, seules les nominations à la présidence de six autorités ne sont pas soumises à la procédure de l’article 13 de la Constitution. C’est une avancée considérable.

En revanche, je me félicite que l’Assemblée nationale, en deuxième lecture, se soit ralliée à la position du Sénat pour confier au Président de la République, et, concomitamment, soumettre au contrôle parlementaire la nomination des présidents de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.

Cela illustre parfaitement la volonté du Parlement de mieux suivre et contrôler l’action de ces autorités, qui exercent une influence significative sur l’exercice des droits et libertés par nos concitoyens ou sur le fonctionnement de la vie économique et sociale de notre pays.

En conclusion, je souhaite insister sur l’importance de ces deux textes qui souhaitent simplifier et rationaliser l’action publique, en mettant fin au dysfonctionnement institutionnel induit par la prolifération des autorités administratives ou publiques indépendantes. Jacques Mézard et moi-même évoquions un État dans l’État ; nous avions raison, et il était vraiment nécessaire d’intervenir.

Pour moi, il s’agit d’une première étape, qui met en place un cadre et des moyens d’action permettant d’exercer un véritable contrôle démocratique. C’est à nous, mes chers collègues, qu’il revient maintenant de faire vivre ce contrôle, en utilisant la boîte à outils que ces deux textes mettent à notre disposition.

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