M. Pointereau a posé la question de l'appréciation de l'efficacité des mesures compensatoires. Lorsque j'ai parlé du manque de compétences de la maîtrise d'ouvrage, je tiens à souligner que les services déconcentrés de l'État n'adoptent pas une démarche de sanction, mais d'accompagnement : c'est bien la philosophie que nous essayons de développer. Il ne s'agit pas d'adopter une approche radicale, mais de travailler avec la maîtrise d'ouvrage pour lui faire prendre conscience de l'importance de la séquence ERC et de la pertinence des mesures à définir. L'avis du CNPN se fonde sur la pertinence des mesures, eu égard aux enjeux locaux spécifiques. Il s'agit de permettre à la maîtrise d'ouvrage d'avoir une compréhension fine des mesures proposées.
Vous avez raison de dire qu'il ne s'agit pas d'une science exacte. Le Commissariat général au développement durable y est particulièrement sensible. La mesure du service écosystémique rendu par la nature fait encore l'objet de travaux de recherche et nous savons combien il est difficile de « monétariser » la valeur d'un écosystème. Si l'implantation d'un ouvrage est décidée dans un endroit, c'est aussi parce qu'il bénéficiera d'un certain nombre d'atouts naturels. Il est assez dur de nous reprocher de nous préoccuper uniquement de la régularité de la procédure, alors que nous cherchons à faire en sorte que le territoire s'approprie véritablement le projet. Les ordonnances concernant la participation du public visent précisément à assurer une bonne appropriation par le territoire. Les aller-retour entre les services de l'État et la maîtrise d'ouvrage permettent en général d'aboutir à un avis favorable.
En ce qui concerne l'obligation de résultat, vous avez raison de dire qu'elle ne saurait être absolue, ce serait faire preuve d'une arrogance suprême. L'obligation de résultat que nous envisageons porte sur la réalisation des mesures proposées.
La problématique de l'espace, quand on parle de compensation, est une vraie question. L'artificialisation croissante de notre territoire nécessite la mise en place de mesures de compensation, qui peuvent entraîner des conflits d'usages, notamment agricoles. Nous y sommes très sensibles. C'est la raison pour laquelle il est important de mener une réflexion sur la question des équipements et sur la restauration d'un certain nombre d'espaces. Il existe beaucoup de friches qui devraient être réutilisées. Or, pour un maître d'ouvrage, il est beaucoup plus onéreux de restaurer une friche industrielle pour y installer une zone commerciale que d'artificialiser un espace naturel ou agricole. Un vrai travail doit être mené avec les services déconcentrés de l'État et les porteurs de projets pour valoriser la restauration des friches, en montrant l'intérêt qu'il y a à restaurer un milieu pour s'y installer.
Enfin, la question du suivi nous pose des problèmes techniques qui ne sont pas insurmontables. Il faut organiser la remontée des données - pour l'instant, des documents dont le format est difficilement exploitables -, mais le Commissariat général au développement durable dispose d'une expertise en matière de big data, et il est tout à fait possible de créer une plateforme de suivi qui a vocation à être ouverte et fera très vraisemblablement l'objet de crowd sourcing. À terme, cet outil facilitera le travail des services déconcentrés de l'État. Nous sommes tout à fait confiants sur la faisabilité de ce projet, mais il faut encore créer l'infrastructure informatique, ce qui nous prendra environ dix-huit mois. Nous disposerons alors d'un outil beaucoup plus précis et performant. Cette question m'inquiète beaucoup moins que celles du calcul du service écosystémique rendu ou de l'artificialisation des sols.
Quant au « porter à connaissance », il incombe aux préfets...