Intervention de Jérôme Guillouët

Commission d'enquête Atteintes à la biodiversité — Réunion du 22 décembre 2016 à 11h05
Audition des représentants de la fédération nationale des chasseurs et de la fédération nationale de la pêche en france

Jérôme Guillouët, responsable technique de la Fédération nationale de la pêche en France :

En tant que responsable du pôle technique de la FNPF, je voudrais évoquer le travail qu'effectue notre réseau pour les milieux aquatiques. Comme le disait ma collègue, nos fédérations et nos associations réalisent des opérations de restauration et de protection des milieux aquatiques et des peuplements piscicoles, ce qui leur confère une vaste expertise technique et une très bonne connaissance du territoire dont elles ont la gestion.

À ce titre, les fédérations de la pêche recourent à ces mesures de compensation écologique et font très souvent figure d'opérateurs à part entière.

Je souhaite me faire l'écho d'un certain nombre de réactions provenant des fédérations départementales de la pêche sur la séquence ERC.

Tout d'abord, il semblerait que la première phase de la séquence, les mesures destinées à éviter les atteintes environnementales, est très souvent passée sous silence, soit parce qu'elle a effectivement été éludée, soit parce que nos structures n'ont pas été associées au programme à ce stade de la séquence.

Il semble que le constat soit identique pour la deuxième phase de la séquence, celle consistant à réduire les atteintes à la biodiversité : on observe que cette réduction est souvent circonscrite aux seules obligations réglementaires et que les fédérations ne sont pas très souvent impliquées.

En revanche, les fédérations de la pêche sont consultées au moment de la troisième phase, celle de la compensation, et uniquement à ce stade. Cela n'est pas sans poser de problèmes : non seulement c'est un peu tard mais cela crée très souvent des crispations en raison de la lourdeur des dossiers à traiter et de l'urgence imposée, d'autre part. C'est d'autant plus vrai que les structures n'ont en général qu'un chargé de mission ou deux, et donc des moyens limités.

Pour prolonger la réflexion, j'ajouterai que certaines fédérations se plaignent du fait que les compensations sont insuffisantes au regard des effets sur la biodiversité. Il existe même quelques cas assez complexes pour lesquels aucune compensation n'est réalisable : je pense notamment à des territoires comme les têtes de bassin ou à des projets qui affectent certaines espèces protégées exceptionnelles.

Il est assez fréquemment souligné aussi que la compensation se limite au strict périmètre du projet. Évaluer les effets d'un projet sur un cours d'eau ne peut se faire qu'en envisageant un continuum : quand on prévoit d'affecter un cours d'eau, on ne se contente pas de provoquer des effets sur la seule zone du projet. Il y a bien d'autres conséquences, en particulier en aval du cours d'eau.

Un autre point a été mis en avant, celui de l'équivalence fonctionnelle entre l'impact et la compensation : les organismes rencontrent des difficultés pour trouver des sites de compensation, problème accru par le manque de maîtrise foncière. En respectant le principe d'additionnalité écologique, les maîtres d'ouvrage se retrouvent assez vite à l'étroit et peinent à trouver des sites de compensation.

On observe d'ailleurs que les maîtres d'ouvrage comme l'administration ont une vision parfois trop stricte de la compensation des projets d'infrastructure en ne considérant que le linéaire ou la surface et en omettant de réfléchir en termes de fonctionnalité.

La compensation des atteintes à la biodiversité est souvent négligée au cours de la phase des travaux. Parfois, certaines mesures compensatoires sont mises en oeuvre avec beaucoup de retard, et ce pour diverses raisons. Pour certaines espèces particulièrement fragiles, le mal est fait.

Enfin, certaines mesures compensatoires sont engagées sans que le maître d'ouvrage n'ait de réelle certitude sur leur efficacité. Plusieurs raisons peuvent l'expliquer, notamment le fait que l'écologie n'est pas une science exacte.

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