Intervention de Gisèle Gautier

Réunion du 18 janvier 2006 à 15h00
Égalité salariale entre les femmes et les hommes — Discussion d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Gisèle GautierGisèle Gautier, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord rappeler l'importance capitale du texte que nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture. En effet, à travers des dispositifs parfois un peu techniques, nous allons de façon concrète contribuer à la modernisation du fonctionnement de notre économie et de notre société.

Sur le fond, nous devons délivrer un message très clair, placé sous le signe de l'équité, aux entreprises, aux 12 millions de femmes en activité dans notre pays et à toutes celles qui vont se présenter sur le marché du travail.

Rappelons quelques chiffres : dans notre pays, les femmes représentent 82 % des actifs à temps partiel et 80 % des salariés dont le revenu est inférieur au SMIC, ce qui est considérable. En revanche, elles sont moins de 5 % parmi les membres des conseils d'administration et moins de 10 % parmi les dirigeants d'entreprise.

Si on observe, dans le même temps, que les femmes sont désormais souvent plus diplômées que les hommes - c'est un fait -, on est bien obligé de constater une anomalie globale. De toute évidence, la culture d'entreprise est encore perfectible en matière d'égalité des chances entre les hommes et les femmes.

Mes chers collègues, certains estiment désobligeant de laisser entendre que nous prenons des mesures en faveur des femmes au moment où notre pays a besoin que leur activité génère des impôts et des cotisations sociales, qui sont essentiels pour la résorption de déséquilibres aujourd'hui reconnus comme excessifs. Pour ma part, je crois avant tout qu'il serait absurde, quelle que soit la conjoncture, de baisser les bras face aux injustices et au gâchis humain qui en résulte.

Sur la forme, la définition dans la loi d'un objectif à cinq ans en matière d'égalité des rémunérations me paraît parfaitement identifiable par les partenaires sociaux. Le texte comporte à la fois une logique de résultat autour de laquelle les entreprises peuvent se mobiliser, mais aussi - il faut le souligner - des mécanismes incitatifs assez puissants comme, - vous l'avez dit, madame la ministre, mais il est important de le répéter - le refus d'extension qui sera systématiquement prononcé lorsqu'une convention de branche, conclue au niveau national, ne comportera pas de disposition relative à la suppression des écarts de salaire entre les femmes et les hommes.

À titre personnel, j'insisterai très rapidement sur deux aspects du texte qui concernent la participation des femmes au fonctionnement de l'entreprise.

En premier lieu, je me félicite du consensus qui se manifeste en faveur du principe d'une présence équilibrée des femmes et des hommes dans les comités d'entreprise et parmi les délégués du personnel. C'était l'une des recommandations qui avait été formulée par notre délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.

J'ajoute, même s'il est difficile de légiférer sur ce point, qu'il me paraît essentiel de généraliser au sein des entreprises la présence d'une interlocutrice à l'écoute des salariées pour améliorer les possibilités de médiation et de dialogue.

Par ailleurs, l'un des aspects les plus sensibles des dispositions restant en navette est la féminisation des conseils d'administration des entreprises du secteur privé.

Sur le principe, en première lecture, notre délégation aux droits des femmes s'est prononcée très logiquement en faveur de cette mesure qui, à l'évidence, est conforme à l'égalité des chances.

Traditionnellement, nous le savons bien - les faits et les statistiques le prouvent -, on confie plus volontiers aux femmes des responsabilités dans le domaine social, la communication, les affaires culturelles ; d'ailleurs, il en est de même en politique. Je dis « traditionnellement », car les choses évoluent plus vite que prévu. Voilà encore quelques mois, qui aurait imaginé qu'une femme deviendrait présidente du MEDEF ? Et je ne parle que du secteur économique. Madame la ministre, vous avez vous-même évoqué les femmes qui sont récemment devenues chef d'Etat.

Les changements s'accélèrent. On le constate, le pouvoir économique et financier n'est plus une sorte de domaine réservé aux hommes. Pour que les conseils d'administration de nos entreprises ne restent pas en retrait de cette évolution, il nous suffit aujourd'hui de nous prononcer sur la disposition votée par l'Assemblée nationale en première lecture comme en deuxième lecture.

S'agit-il d'une mesure improvisée à la hâte ? On pourrait se poser la question. Je note, à ce sujet, que le Gouvernement, qui avait fait preuve, le 11 mai 2005, lors de la première lecture du texte à l'Assemblée nationale, d'une certaine prudence, a, semble-t-il, pris le temps de la réflexion et fait évoluer sa position. Il a en effet donné, le 12 décembre 2005, à l'occasion de la deuxième lecture à l'Assemblée nationale, un avis résolument favorable à cette disposition. Vous avez alors précisé, madame la ministre, que « fixer un objectif, au demeurant bien modeste, avec un taux de 20 % qui n'a rien d'inatteignable, constitue un signe fort ». Je souscris pleinement à ces propos.

S'agissant des conséquences concrètes que l'on peut attendre de l'adoption de ce texte, je rappellerai un fait démontrable de façon parfaitement objective : la présence de femmes au sein des organes dirigeants d'une entreprise est un gage de bonne santé financière, sociale et économique. C'est là non pas l'affirmation de groupes de pression féministes, mais le constat d'experts indépendants.

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