Intervention de Nathalie Depoire

Commission des affaires sociales — Réunion du 1er février 2017 à 9h35
Table ronde sur la problématique de la qualité de vie au travail des personnels hospitaliers avec des représentants des syndicats infirmiers

Nathalie Depoire, présidente de la coordination nationale infirmière :

Avec le sentiment d'abandon que ressentent les soignants, cela fait du bien de percevoir de l'intérêt et une volonté de changement dans vos questions.

Revenir sur les 35 heures ? Cela ne me semble pas à l'ordre du jour. Aujourd'hui, l'hôpital, totalement déstructuré, est obligé de rappeler des agents pendant leurs congés sans respecter les règles. On nous rappelle mais nous ne récupérons jamais. Dans le meilleur des cas, c'est payé en heures supplémentaires. Des soignants en arrivent à avoir 300 heures au compteur à la fin de l'année. Au bout d'un moment, c'est l'épuisement. Pour des raisons évidentes de difficultés financières, il y aura toujours des volontaires. Mais il faut y mettre un terme, si nous ne voulons pas voir encore plus de personnes absentes pour cause de maladie... L'équilibre entre la vie professionnelle et vie familiale n'est pas pris en compte.

Quelles seraient nos propositions ? Rechercher l'adéquation des effectifs aux besoins réels et non pas, comme aujourd'hui, au nombre de lits. Il faut prendre en compte les soins. L'encadrement des étudiants fait aujourd'hui partie des missions mais n'est pas pris en compte financièrement. Si nous devons remplacer une collègue malade, nous ne pouvons plus l'assurer. Le résultat, c'est que nous perdons ce compagnonnage si important, comme le lien avec les centres de formation. Les étudiants sont hypersollicités, par exemple pour remplacer un aide-soignant malade, et insuffisamment accompagnés. C'est ce qui explique le taux d'abandon très élevé, comme celui des infirmiers qui quittent la profession après deux ans d'exercice.

Le management est important : le cadre est le moteur de l'équipe. Dans chaque formation des professionnels de santé, des modules sur la qualité de vie au travail et les risques psychosociaux devraient être ajoutés - c'est bien. Mais demeure une question de fond : le management est-il seulement une gestion des effectifs ou veut-on un cadre très présent qui supervise aussi la qualité des soins ? Nous tenons à une formation complète, au niveau master. Nous avons aussi des attentes sur la reconnaissance des compétences : aujourd'hui, une formation ou un diplôme universitaire ne sont pas reconnus.

Il faudrait revenir à une formation spécialisée en psychiatrie : la formation polyvalente depuis 1992 ne convient pas. Les infirmiers généralistes, au niveau licence, pourraient se spécialiser en psychiatrie au niveau master.

Nous sommes favorables à l'exercice en pratique avancée. Il est essentiel de reconnaître une autonomie infirmière et un droit de prescription... Mais on pourrait parler de cela pendant des heures.

Il ne suffit pas de convoquer les syndicats pour faire du dialogue social. Il arrive qu'un projet fasse l'unanimité des syndicats contre lui. La loi prévoit, dans ce cas, qu'il faille revoir la copie ; mais il n'en est rien, on nous présente le même texte ! On peut parler d'esprit contestataire. Mais cela ne devrait plus arriver.

La mutualisation des moyens médicaux au sein des GHT n'est pas une sinécure. Courir d'un établissement à l'autre, assumer de plus en plus de charges médicales, tout cela engendre une fatigue importante qui joue sur la santé et les relations dans les équipes courant après le médecin pour obtenir prescription...

Passer à l'ambulatoire nécessite une formation : lorsqu'un patient est pris en charge sur une seule journée, on ne peut pas imaginer qu'il reparte avec ses questions et sans éducation aux soins ! Autre point, souvent oublié : l'ambulatoire aspire les patients les plus autonomes qui ne sont plus, dès lors, en hospitalisation traditionnelle où se concentrent les plus dépendants. Or, au lieu de renforcer les effectifs, on les diminue. Cherchez l'erreur !

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