Intervention de Jean-Yves Roux

Réunion du 1er février 2017 à 14h30
Transport sanitaire héliporté — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean-Yves RouxJean-Yves Roux :

Je remercie très sincèrement Alain Bertrand et les membres du groupe du RDSE, auteurs de la présente proposition de loi, d’avoir mis en lumière le quotidien de nombreux ruraux et montagnards : le transport sanitaire héliporté.

Comme l’ont très justement fait remarquer les précédents orateurs, cette proposition de loi répond à deux enjeux majeurs, auxquels je ne peux qu’être sensible : faire progresser l’accès réel à un hôpital à moins de trente minutes du lieu de prise en charge de l’urgence sanitaire ; améliorer la coordination des transports sanitaires héliportés.

L’accès de la population à des soins de premiers secours en moins de trente minutes était et demeure une priorité du Gouvernement. Il s’agissait de l’un des engagements du pacte territoire-santé 1, lequel a, à ce titre, été reconduit dans le cadre du deuxième pacte territoire-santé. Je suis heureux que cet objectif, indispensable à une politique d’aménagement du territoire efficace, ait commencé à se traduire dans les faits. Je suis pour autant très attentif à ce que cet objectif puisse reposer sur un diagnostic plus précis, prenant en compte la topographie des territoires, les variations de populations, mais aussi la totalité des acteurs du transport sanitaire héliporté, disponible et formé.

Le transport sanitaire héliporté revêt ainsi une signification toute particulière en montagne, en milieu rural et dans les îles. Je crois utile de le rappeler, en montagne, la distance moyenne pour accéder à un SAMU ou un SMUR est de vingt-sept kilomètres, soit trente à quarante-cinq minutes par la route, contre quinze à trente-cinq minutes par hélicoptère.

Certains départements, comme le mien, les Alpes-de-Haute-Provence, sont particulièrement concernés. La prise en charge de l’urgence sanitaire et l’objectif d’accessibilité à moins de trente minutes passent donc nécessairement par l’hélicoptère.

Nous disposons à ce jour de nouveaux outils législatifs et réglementaires pour prendre en compte les spécificités territoriales et affiner les implantations de moyens en conséquence.

L’instruction du 24 novembre 2016 relative à l’actualisation du diagnostic des populations situées à plus de trente minutes d’un accès aux soins urgents a donné aux ARS la mission d’« actualiser le diagnostic pour 2015 et 2016 des populations situées à plus de trente minutes d’un accès aux soins urgents et de mesurer les progrès effectués. » Le diagnostic final est attendu pour la fin du premier semestre de cette année.

En parallèle, la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne a introduit la possibilité pour les ARS de compléter plus précisément cette évaluation. L’article 1434-3 du code de la santé publique précise que le schéma régional de santé « comporte, le cas échéant, un volet consacré aux besoins de santé spécifiques des populations des zones de montagne, notamment en termes d’accès aux soins urgents et d’évacuation des blessés, et tenant compte des spécificités géographiques, démographiques et saisonnières de ces territoires. »

À n’en pas douter, la stratégie nationale de transport sanitaire héliporté que les auteurs de la présente proposition de loi appellent de leurs vœux devrait tirer le plus grand bénéfice de ces diagnostics réactualisés.

J’en viens à la coordination des moyens mis en œuvre. Je crois effectivement efficace de privilégier non une mutualisation, mais une véritable coordination, permettant d’agir en complémentarité des savoir-faire comme des équipements.

À ce titre, l’ARS ne me paraît pas le seul échelon pertinent pour aboutir, en temps normal comme en temps de crise sanitaire grave, à la mise en place d’une stratégie de transport héliporté pleinement opérationnelle.

Vous me permettrez, mes chers collègues, de regretter ainsi que le rôle des acteurs de la sécurité civile ne soit pas mieux identifié et n’ait pas fait l’objet d’auditions plus poussées.

La sécurité civile, dont il faut louer la très grande technicité et la parfaite connaissance des territoires, est en effet indispensable à la mise en œuvre de stratégies territoriales de transport sanitaire par hélicoptère pleinement efficientes.

Les hélicoptères de la sécurité civile peuvent très bien réaliser des missions de secours à personne. Mais, inversement, les hélicoptères SAMU ne peuvent pas effectuer de missions de secours, à plus forte raison de secours complexe : durant la nuit, pendant des périodes d’intempéries météorologiques, par exemple.

En effet, même si ces missions ne sont pas les plus nombreuses « quantitativement », elles sont fondamentales. Seuls les hélicoptères de la sécurité civile et de la gendarmerie peuvent les réaliser.

De la même manière, la sécurité civile et l’armée sont en première ligne en cas de drame sanitaire de grande ampleur. Mon département a malheureusement été le théâtre du crash de la Germanwings qui a mobilisé, durant de nombreux jours, tous les acteurs de secours en montagne, à une très grande échelle, bouleversant aussi le recours plus quotidien au transport sanitaire héliporté.

Il y a donc, je le crois, nécessité de mieux prendre en compte ces savoir-faire, comme la spécificité des flottes utilisées, dans la mise en œuvre des futurs schémas d’implantation territoriale de transport sanitaire par hélicoptère.

La coordination de deux directions, l’une relevant de l’organisation des soins, l’autre de la sécurité civile, avec, en cas de besoin, un commandement bicéphale, me paraît dans ce contexte plus pertinente.

Enfin, une plus grande efficacité de la coordination du transport sanitaire héliporté passera aussi nécessairement par un accès suffisant et itinérant à la téléphonie mobile, y compris dans les territoires les plus isolés. C’est une bataille que nous devrons mener en parallèle.

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