Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, souveraineté nationale à l’égard de la propriété agricole, indépendance alimentaire de la France, c’est à ces enjeux que nous rappelle brutalement l’affaire des 1 600 hectares du Berry.
Dans le temps qui m’est imparti, j’aborderai deux points : d’une part, les questions que soulèvent les établissements publics de financement et de restructuration, les EPFR, en milieu rural et leur contribution possible au financement de l’action des SAFER ; d’autre part, la question de la responsabilité en matière de réduction de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques.
L’extension du périmètre des EPFR existants antérieurement à la création des nouvelles régions, comme c’est le cas en ce moment en Occitanie, se traduira par des prélèvements fiscaux supplémentaires effectués directement auprès des contribuables des territoires ruraux et hyper-ruraux. Sur ces territoires à faible pression foncière, les sommes, de près de 15 euros par habitant, prélevées tous les ans serviront surtout à porter des opérations foncières en milieu urbain. C’est une bonne chose. En revanche, ce qui pose problème est la solidarité de fait entre des territoires en difficulté, voire en grande difficulté, en milieu rural à l’égard de zones urbaines, sans retour vers les zones rurales sur lesquelles les projets justifiant de tels portages sont, hélas, rares.
Une fois de plus, ces mécanismes de prélèvement se traduisent par un appauvrissement de territoires ruraux et hyper-ruraux déjà en butte à de grandes difficultés. Parmi ces difficultés figurent l’installation des jeunes agriculteurs et la capacité à maintenir durablement l’activité agricole, ainsi que la rémunération des agriculteurs qui prennent leur retraite.
Par ailleurs, faute de moyens financiers suffisants, cela a été dit, les SAFER ne peuvent pas toujours faire face correctement à leur mission première.
Dans le département dont je suis élu, le Gers, pour la viticulture, l’utilisation de sociétés de portage foncier au capital desquelles figurent des adhérents coopérateurs et même des salariés non coopérateurs permet d’apporter une réponse à l’installation de jeunes viticulteurs sur des parcelles qu’ils n’auraient pu ni acheter ni même louer.
Si cette pratique, développée par l’union de coopératives de Plaimont, apporte une réponse à l’enjeu de portage du foncier tout en la liant à son exploitation, je considérerai comme utile et constitutif d’un juste retour des choses que les SAFER bénéficient, dans le cadre d’une régulation à définir, d’une partie des fonds prélevés par les EPFR sur les territoires ruraux et hyper-ruraux.
Une grande loi sur la gestion du foncier permettrait d’aborder ce sujet et de servir l’indispensable développement des territoires ruraux sans affaiblir les EPFR dont les ressources disponibles parfois considérables posent question. Un bon sujet de travail législatif en perspective pour la prochaine législature…
Le second point, que je veux aborder rapidement, est celui de la mise en œuvre expérimentale des certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques prévus à l’article 10 de cette proposition de loi.
L’enjeu sanitaire et la pression sociale pour une alimentation saine et de qualité justifient pleinement ces dispositions, et je salue le travail du ministre, qui a engagé notre agriculture, au travers de la loi d’avenir, dans la triple performance économique, sociale et environnementale.
J’entends plaider au cours de cette discussion générale, comme je l’ai fait en commission, contre l’idée selon laquelle cette mesure et les pénalités qu’elle prévoit induiraient un handicap de productivité. Pourquoi considérer d’emblée que la situation restera en l’état et que des pénalités devront être payées ? Pourquoi ne pas miser sur notre capacité collective à trouver et à mettre en œuvre des solutions correctives efficaces ?